Wen Jiabao place les réformes de la société chinoise au centre du débat

Écrit par The Epoch Times
07.05.2012

  • Le Premier ministre chinois Wen Jiabao salue les journalistes en arrivant à la conférence de presse à la clôture du Congrès national du peuple, au Grand Palais du Peuple le 14 mars à Pékin. Wen fait pression pour mettre fi n à la persécution du Falun Gong et réhabiliter les militants pour la démocratie du 4 juin1989. (Staff: Lintao Zhang / 2012 Getty Images)

Les nombreux discours du Premier ministre chinois Wen Jiabao prônant les réformes politiques indispensables à la société chinoise, n’ont jusqu’alors jamais abouti à de réels changements au sein du parti communiste au pouvoir. Après la récente affaire Bo Xilai, le Premier ministre a pris position pour la réhabilitation du Falun Gong, des militants pour la démocratie du 4 juin 1989 et a soutenu des réparations à leur encontre. Cette prise de position d’une figure politique haut placée a lieu dans le contexte de la mise en place du nouveau gouvernement fin 2012, et semble montrer les prémices d’un profond changement en Chine.

 

Lorsque Wang Lijun, ancien chef de la police de Chongqing et bras droit de Bo Xilai, chef du Parti communiste de Chongqing, a tenté de faire défection au consulat des États-Unis le 6 février, il a attiré l'attention de la communauté internationale sur les prélèvements d'organes forcés du régime à l’encontre des pratiquants de Falun Gong. Dans un discours prononcé en 2006, il s'était vanté d'avoir supervisé des «milliers» d'opérations de prélèvement d'organes en tant que chef de la police de Jinzhou dans la province du Liaoning. Bo Xilai était alors gouverneur de la province de Liaoning de 2000 à 2004 et donneur d’ordre de Wang Lijun.

Au cours d’une réunion interne à Zhongnanhai, le siège du gouvernement de Pékin, au sujet de l’incident Wang Lijun, Wen Jiabao a dénoncé les prélèvements d’organes et la participation de Bo Xilai dans ces actes, la province du Liaoning ayant été nommée en 2006, l’«épicentre» des prélèvements d’organes en Chine.

Selon Bill Gertz, journaliste spécialisé sur les questions de Sécurité nationale aux États-Unis, un officiel américain a déclaré que Wang Lijun aurait également fourni des informations concernant un complot organisé par Bo Xilai et Zhou Yongkang, afin de perturber la succession au pouvoir du futur dirigeant Xi Jinping, ceci en préparant un coup d’état. Après que Wang a été ramené à Pékin pour les besoins de l’enquête, les observateurs s’attendaient à un geste fort de Pékin sur cette affaire.

Le 14 mars, Wen Jiabao a annoncé lors d’une conférence de presse tenue à la clôture du Congrès national du peuple: «Le présent Comité municipal du Parti de Chongqing et le gouvernement municipal doivent réfléchir sérieusement et apprendre de l’incident Wang Lijun». Les observateurs du PCC ont d’ailleurs souligné la gravité d’une telle condamnation venant d’un officiel du Parti. Le jour suivant, la presse d’État annonçait que Bo Xilai avait été limogé de son poste de chef du Parti à Chongqing et l’agence de presse Xinhua avait précisé qu’il avait été renvoyé et mis en examen.

Construire la future société chinoise

Dans sa conférence de presse du 14 mars, Wen Jiabao a fait référence à la bataille qui fait rage pour construire l’avenir de la Chine en lançant cet avertissement: «Une tragédie historique comme la Révolution culturelle peut se produire à nouveau», se détachant ainsi de la faction maoïste du parti prônant la répression et la violence pour maintenir le pouvoir. Dans son intervention, il a décrit une Chine qui devait, soit aller de l’avant en se dirigeant vers les réformes, soit régresser dans une politique semblable à celle de la Révolution culturelle. «Sans le succès d’une réforme politique, la réforme économique ne pourra pas se faire. Chaque membre et chaque cadre du Parti devrait sentir l’urgence de la situation», a- t-il déclaré.

Le Premier ministre a également fait pression pour mettre fin à la persécution du Falun Gong – avec réparation à ses membres –, et réhabiliter les militants pour la démocratie de 1989, selon une source de Pékin. Sa proposition de réforme a tout de suite été contrée par Zhou Yongkang et la faction dirigée par l'ancien chef de file du régime, Jiang Zemin. Jiang, qui serait actuellement dans un état végétatif, a instrumentalisé la persécution du Falun Gong à partir de juillet 1999, et Zhou, comme ministre de la Sécurité publique de 2003 à 2007, et chef de la puissante Commission des Affaires politiques et législatives (CAPL) de 2007 jusqu’à présent, avait été fortement impliqué dans la mise en œuvre de la campagne de Jiang.

Le 26 mars dernier, à la conférence annuelle du Conseil d’État au sujet de la corruption en Chine, Wen Jiabao a expliqué pourquoi le plus grand danger pour le parti communiste chinois provenait de ce problème, sujet dont il s’est servi pour une nouvelle fois justifier le besoin de réformer la politique chinoise. «Si ce problème n’est pas résolu, le pouvoir politique pourrait glisser des mains du PCC, et le Parti pourrait perdre son pouvoir dans le pays.»

 

  • Le Premier Ministre chinois Wen Jiabao, le 24 novembre lors de sa rencontre avec le Président russe Dimitry Medvedev. (SERGEI CHIRIKOV/AFP/Getty Images)(Stringer: SERGEI CHIRIKOV / 2010 AFP)

Une source basée à Pékin, connaissant les circonstances relatives au discours de Wen Jiabao, a déclaré à The Epoch Times que cette remarque s’adressait à Zhou, le Premier ministre ayant toujours considéré que la CAPL était la plus grande source de corruption en Chine. À la suite de cette conférence, des mesures restreignant les fonctions de Zhou au sein de la CAPL ont été adoptées.

 

Réhabiliter les dissidents du 4 juin et la pratique du Falun Gong

Selon certaines sources de Pékin proches du dossier, Wen Jiabao a maintes fois répété ces dernières années l’urgence de réhabiliter les dissidents de la place Tienanmen ainsi que les pratiquants du Falun Gong, en disant qu’ils ne devaient plus être traités comme des criminels mais bénéficier de dédommagements. Zhang Tianliang, reporter politique pour la chaîne de télévision New Tang Dynasty, a noté que Wen Jiabao a exhorté cette double réhabilitation, non seulement parce qu’il estime que c’est la meilleure chose à faire étant donné le lourd climat social actuel, le pays traversant un nombre de manifestations contre les autorités sans précédent, mais aussi parce que c’est un moyen pour lui de faire avancer son projet de réforme politique.

«Selon Wen Jiabao, réhabiliter le Falun Gong permettrait d’affirmer la liberté de conscience et l’indépendance de la justice, ce qui est le cœur de sa réforme politique», a déclaré Zhang Tianliang.»Quant au mouvement des étudiants de la place Tienanmen, il visait la démocratie, ce qui est l’objectif de Wen Jiabao pour sortir de la crise actuelle», a -t-il ajouté. «La reconnaissance des victimes du massacre de la place Tienanmen voudrait dire que le gouvernement admettrait qu’il n’a pas le droit d’user de la force militaire et de tuer pour enrayer les aspirations des citoyens pour la démocratie», a affirmé Zhang Tianliang. Selon lui, renoncer à la violence mènerait la Chine à une réelle réforme dans la société.

Selon une source basée à Pékin, Wen Jiabao serait particulièrement en colère contre les crimes de prélèvements d’organes forcés sur les pratiquants de Falun Gong. «Sans anesthésie, les prélèvements d'organes forcés et leur vente pour de l'argent, est-ce digne d’être un être humain ?» a-t-il dit, lors de la réunion des dirigeants du Parti. «Les faits de ce genre se sont passés pendant de nombreuses années. Nous sommes sur le point d’y mettre fin mais ce n'est pas encore tout à fait résolu.»

Sur cette question, Wen Jiabao aurait fait des reproches à Hu Jintao, lui assurant que sans de sérieuses réformes, «nous devrons tous, un jour, faire face à des enquêtes sur ce sujet». Cette source a également ajouté en citant Wen que «maintenant que l'incident de Wang Lijun est connu par le monde entier, il est possible de l'utiliser pour punir Bo Xilai et résoudre le problème du Falun Gong devrait être un choix naturel».

Shi Zangshan, un expert des affaires chinoises à Washington DC, a déclaré à The Epoch Times que Hu Jintao et Wen Jiabao n'avaient pas suffisamment de pouvoir et de morale politique pour combattre la faction de Jiang Zemin en recourant seulement aux outils de la corruption et de la lutte interne. Shi a estimé que Hu Jintao et Wen Jiabao devraient continuer ainsi de dénoncer les crimes de Jiang Zemin et Zhou Yongkang, ils y gagneraient sur le terrain moral dans les luttes intestines du Parti, et, comme l'opinion publique se retourne contre la faction de Jiang – 100 millions de Chinois sont persécutés sans compter leurs familles, amis, voisins, collègues, etc. -  ils pourraient l’emporter sur ce terrain.