Amnesty International: fermeture des camps de travail en Chine, le nom change, les mauvais traitements restent

Écrit par Stephen Gregory, Epoch Times
20.12.2013
  • La photo montre l’entrée du camp de travail de Masanjia, tristement connu pour les traitements brutaux et les abus sexuels. Le 15 novembre dernier, le régime chinois annonçait l’abolition des camps de rééducation par le travail. (Epoch Times)

À quel moment le fait de vouloir fermer un système qui détient, torture et maltraite arbitrairement des milliers de personnes peut-il ne pas être une bonne nouvelle?

Réponse: lorsque le régime chinois annonce la fermeture de son système de camps de rééducation par le travail tout en utilisant d’autres moyens de détention arbitraire pour persécuter les mêmes groupes, de la même façon qu’avant.

Il semble que c’est ce qui est en train de se passer, selon un rapport d’Amnesty International publié mardi dernier. Basé sur 60 interviews d’individus réalisées ces quatre dernières années dans toutes les régions de Chine qui ont été détenus dans des camps de travail ou ont subi d’autres formes de détention arbitraire, le rapport Changer la soupe mais pas le médicament? – Abolir la rééducation par le travail en Chine  donne un aperçu de la façon dont le régime chinois applique sa promesse d’abolir le système de camps de travail.

Le Parti communiste chinois (PCC) a utilisé les camps de rééducation par le travail comme un outil essentiel de répression politique. Ils ont commencé à apparaître dans les années 1950 pour détenir ceux que le Parti désignait comme ses ennemis en raison de leur appartenance de classe ou leur pensée incorrecte.

Les «contre-révolutionnaires» et les «droitistes» étaient punis dans les camps et en théorie, leur détention ne coûtait rien à l’État, puisqu’ils étaient contraints d’effectuer des travaux forcés.

Ces dernières années, la population des camps a recueilli une nouvelle sorte d’«ennemis». Les camps détiennent les pratiquants de Falun Gong, les pétitionnaires (ceux qui ont fait appel auprès des responsables du PCC des injustices qu’ils ont subies), les défenseurs des droits de l’homme, les activistes pour la démocratie, les blogueurs sur Internet, les activistes de l’environnement, les Chrétiens clandestins, les Tibétains et les Musulmans Ouigours, ainsi que les toxicomanes et d’autres criminels communs.

Les camps de travail sont restés arbitraires. Ainsi un policier peut incarcérer une personne dans un camp de travail pour trois ans, sans le bénéfice d’un procès, ni même un mandat de perquisition. Aucune archive publique n’existe des détenus ou de leurs condamnations.

Une fermeture?

Corinna-Barbara Francis, chercheuse spécialisée de la Chine pour Amnesty International, a expliqué que l’annonce faite par le PCC le 15 novembre sur la fermeture des camps de travail est moins que ce qu’elle laisse voir.

Mme Francis a confié à NTD Télévision: «Ce que notre recherche a montré est que bien qu’ils puissent abolir cette forme particulière de détention arbitraire, ils utilisent d’autres méthodes de détention arbitraire pour prolonger certains types de punition et de persécution envers une majorité des groupes qui étaient jusque-là pénalisés dans le système des camps de rééducation par le travail».

Selon Amnesty International, certains camps vont simplement changer la signalisation à l’entrée de leurs bâtiments. Ce qui autrefois avait la forme d’un camp de rééducation par le travail devient un camp de traitement des toxicomanes. Après le changement de la signalisation, la même population reste à l’intérieur de l’enceinte.

D’autres camps sont réadaptés à d’autres fins. Ce qui était un camp de rééducation par le travail peut devenir un centre de lavage de cerveau.

Lorsque les camps sont réellement fermés, les détenus sont souvent simplement acheminés vers un autre camp de travail ou une autre forme de détention arbitraire, comme les centres de lavage de cerveau, les classes d’éducation légale, les prisons noires ou les instituts psychiatriques. Les détenus politiques, les pétitionnaires et les pratiquants de Falun Gong en particulier reçoivent ce traitement, selon le rapport d’Amnesty International.

Selon le rapport, les pétitionnaires sont le plus souvent envoyés dans les prisons noires. Les pratiquants sont le plus souvent envoyés vers les centres de lavage de cerveau, souvent connus sous l’appellation de centre d’éducation légale.

Les prisons noires sont des installations qui existent officieusement et les responsables nient la plupart du temps leur existence.

Ni les prisons noires ni les centres de lavage de cerveau n’ont de statut sous la loi chinoise. Comme les camps de travail, la détention dans ces endroits est arbitraire, sans implication des tribunaux.

«Les traitements abusifs, comme la torture et les mauvais traitements, sont répandus à la fois dans les prisons noires et les centres de lavage de cerveau», précise le rapport.

Falun Gong

Les camps de travail ont joué un rôle clé dans les efforts du PCC pour éradiquer la pratique spirituelle du Falun Gong, aussi appelé Falun Dafa.

La persécution du Falun Gong a commencé en 1999 sous les ordres de Jiang Zemin alors à la tête du PCC.

Jiang Zemin craignait la popularité de la pratique. Selon des chiffres officiels, 70 millions de personnes avaient commencé à pratiquer le Falun Gong (selon les pratiquants, le chiffre réel dépasse les 100 millions.) Il craignait aussi que les Chinois ne trouvent les enseignements du Falun Gong plus attrayants que l’idéologie communiste.

Le but de détenir les pratiquants est de les transformer, c’est-à-dire les pousser à accepter de renoncer à leur foi en Falun Gong.

Les camps de travail soumettent les détenus dès leur arrivée à des sessions d’étude intense et d’autocritique. On attend du détenu qu’il fasse preuve de regret pour ses croyances et qu’il signe des déclarations exprimant ses regrets.

Si le détenu s’entête à maintenir sa foi, les mauvais traitements sont alors appliqués, selon Amnesty, avec des formes «douces», comme la privation de sommeil qui s’intensifient et deviennent des séances de torture systématique et violente.

Selon Amnesty, en moyenne un tiers de la population des camps étaient des pratiquants de Falun Gong et dans certains camps, 100% des détenus étaient des pratiquants.

Selon des chiffres officiels du Ministère de la Justice cités par Amnesty, en 1999, les camps comptaient 310.000 détenus, un nombre qui a grimpé à 400.000 en 2007. Les données non-officielles laissent entendre que le nombre pourrait être bien plus élevé. 

Amnesty fait référence à ce qu’a dit un employé du système judiciaire chinois dans le magazine Caijing: la question de la façon de gérer le grand nombre de détenus des camps de travail qui étaient des pratiquants de Falun Gong pourrait avoir retardé de plusieurs années la décision d’abolir les camps de travail.

À l’heure où les camps ferment, le régime refuse de libérer les pratiquants qui n’ont pas été transformés.

Amnesty a découvert que lorsque des pratiquants doivent être libérés des camps de travail qui doivent fermer, des représentants du Bureau 610, un organe du parti chargé de la persécution du Falun Gong, se présentent et les envoient en détention dans un autre endroit. Ou dans certains cas, les responsables demandent aux membres de la famille de signer des déclarations garantissant le comportement futur du pratiquant.

Erping Zhang, porte-parole du Centre d’information du Falun Dafa, a commenté l’importance des découvertes du rapport d’Amnesty International.

«Le PCC est contraint de changer le nom des camps de travail en raison de leur triste réputation en Chine et hors de Chine» a-t-il expliqué. Tant que la politique du PCC de persécuter le Falun Gong ne change pas, cela fait peu de différence de changer le nom des centres ou des camps de détention illégale».

Version en anglais: Amnesty International: New Name, Old Abuses as Labor Camps Close in China

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