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Vers une zoothérapie plus juste et plus agissante

Une zoothérapie sans perdants?

Écrit par Mathieu Côté-Desjardins, Epoch Times
15.09.2014
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Partager des espaces publics avec des animaux est un choix de plus en plus prisé chez les commerçants, il n’y a qu’à penser aux deux cafés pour chats qui ouvrent à Montréal, soit Le Café des Chats et le Café Chat L’Heureux. Jouant les «zoothérapeutes» malgré eux, plusieurs animaux sont amenés à avoir une nouvelle vocation. Est-ce juste d’espérer un rapport gagnant-gagnant entre les êtres humains et les animaux?

Sophie Lecompte fait sa maîtrise en philosophie et éthique animale. Elle travaille aussi pour Éduchateur, qui propose de la zooanimation, aussi appelée «comportement félin». Elle travaille également dans un refuge d’urgence où on apporte toutes sortes d’animaux, dans toutes sortes d’états. En plus de cela, plusieurs animaux de compagnie attendent chaque jour son retour à la maison. Ce qui l’intéresse avant toute chose est leur capacité à établir des liens et surtout que la relation soit «gagnante-gagnante» lors des interactions humaines.

Éduchateur offre des consultations privées à domicile ou par téléphone, des conférences et de la formation en compagnie de chats.

L’utilisation d’animaux dans un cadre professionnel demeure toujours un peu problématique pour Sophie. Bien qu’il soit encore difficile d’obtenir des contrats de zoothérapie au Québec, elle associe cela en partie au rapport plutôt douteux que nous entretenons avec les animaux. Considérer le bien-être de ces derniers est rarement pris au sérieux en tant que société.

«Il y a une différence énorme entre “utiliser” un animal et travailler avec un animal. Je dis souvent aux patients que mes chiens et chats sont mes collègues, mes collaborateurs, tout en spécifiant que je cherche à ce qu’ils soient stimulés en travaillant et qu’ils aiment le travail qu’ils font!», partage-t-elle.

Comme l’indique Mme Lecompte, un quotidien stimulant et enrichissant, physique et psychologique ne devrait pas être réservé uniquement aux êtres humains. Chaque animal a des besoins spécifiques selon son espèce ou sa race. «Malheureusement, la plupart des animaux de compagnie sont hypostimulés; de ce fait, les problèmes de comportement peuvent survenir et beaucoup d’abandons ont cette origine», soulève-t-elle.

  • La chienne Laïa fait beaucoup de bien autour d’elle, tout en faisant le plein de stimulations nécessaires à son bon développement. (Gracieuseté de Sophie Lecompte)

«Les animaux sociaux comme les chiens ont besoin de socialiser, ainsi des chiens régulièrement isolés et qui n’ont pas le moyen de socialiser avec d’autres chiens sont bien souvent malheureux. Ils ont besoin de courir, de sentir, d’explorer, de ronger, etc. Si on ne répond pas à ces besoins, le chien peut développer différents problèmes, comme le fait de japper excessivement pour garder le territoire, ronger différents objets aucunement destinés à la chose, etc. Toute son énergie ira dans ces activités», rappelle Sophie Lecompte.

«Quant aux chats, ils ont besoin de chasser pour survivre, de hauteurs pour surveiller leur territoire, de faire leurs griffes, de ronger, etc. Si on ne leur en donne pas l’occasion, entre autres, en les faisant jouer avec des jouets conçus à cet effet, ils pourront développer un problème d’agression, de prédation qui se manifestera par mordre les pieds, les chevilles, les mains et les bras. Il faut également mettre de l’importance sur la stimulation cognitive [capacité d’acquérir des connaissances]. Il existe différents jeux ou bols d’alimentation interactifs qui les font travailler à ce niveau», amène-t-elle.

«Tout apprentissage doit se faire avec du renforcement positif. Ainsi, ils sont heureux d’apprendre, de travailler et sont particulièrement à l’écoute», développe celle qui travaille constamment avec une panoplie d’animaux.

Refuges aux mille trésors

«Je vais favoriser l’adoption d’animaux en refuge ou venant d’autres endroits connexes au lieu de les acheter comme des objets dans un but d’offrir des services aux gens. Ils ont besoin d’une famille, il y en a des centaines de milliers dans cette situation. De plus, je vais sélectionner les animaux qui ont les caractéristiques correspondantes au travail demandé. Produire des animaux dans le but de faire de l’argent est, à mon sens, à abolir», mentionne celle qui a travaillé avec deux de ses chats et deux de ses chiens provenant d’un refuge.

Sophie explique que la situation globale en matière du traitement des animaux est critique dans la province. «Pour ne nommer qu’un exemple, les refuges débordent et doivent tuer des centaines d’animaux par mois, particulièrement durant la période estivale. Il m’apparaît donc insensé de continuer à “produire” d’autres animaux de races, même si cela est “bien fait”», se permet-elle.

Le portrait serait tout autre s’ils étaient davantage inclus dans notre société comme compagnons et aidants. Elle cite l’exemple du café Chat l’Heureux, où les gens peuvent aller manger et boire en compagnie de chats qui ont été sélectionnés à l’aide de conseils de spécialistes en comportement félin. L’équipe est très sérieuse et attentive aux besoins des chats et, d’ailleurs, c’est la priorité du propriétaire de l’entreprise. «Le bien-être de ces derniers de première importance, sans compter que ce sont tous des animaux de refuges», précise l’aidante naturelle du monde animalier.

Les animaux de refuge ont aussi une qualité particulière, celle d’avoir une solide expérience de vie acquise dans diverses conditions, dans différents milieux. «Ils ont, pour la plupart, vu beaucoup de choses, ils ont pu vivre longtemps en refuge ou ce sont des animaux qui ont erré pendant une bonne partie de leur vie. Cela les rend particulièrement aptes à gérer différents stimulus et stress extérieurs. J’ai moi-même commencé à travailler avec l’un de mes chats comme rien n’arrivait à le stresser», raconte Sophie Lecompte.

Sélection délicate

Il y a plusieurs facteurs à examiner lorsqu’on choisit un animal pour la zoothérapie. La personnalité des animaux, leur vécu, l’âge auquel ils ont été séparés de leur mère, etc.

  • Sur le marché depuis quelques années, le bébé phoque robotisé, PARO, arrive à la rescousse de ces gens en besoin affectif qui n’est pas comblé par un ou des êtres vivants. Un modèle de «robothérapie» avec une touche humaine. (AIST Japan)

«Chaque animal se doit d’être considéré individuellement. Il faut être très conscient de ce qu’on fait avec celui-ci afin d’éviter les situations où il serait inconfortable», fait part l’amoureuse du milieu animal. Elle est persuadée qu’une formation en comportement animal est nécessaire afin d’être à l’aise avec tout leur langage corporel. L’aspect d’être capable de se concentrer sur l’animal est spécialement important, tout comme de le connaître. Dans certains cas, des zoothérapeutes vont “emprunter” un animal à d’autres personnes, ce qui peut compliquer la relation», relève Sophie Lecompte.

Le rapport humain-animal dans la zoothérapie à la possibilité d’être équilibré, tout en continuant d’innover dans le domaine. «Il existe un programme, «Book Buddies» (traduction libre : Copains de lecture), qui permet à l’enfant de lire à un chat pour les apaiser et les réconforter tous deux. Le tout a été initié par le refuge américain Animal Rescue League of Berks County. Comme le chat est en position de témoin, sans rapport de jugement, il devient le partenaire idéal pour un apprentissage chez le jeune. Cela contribue à ce qu’il puisse avoir une meilleure estime de lui-même», avance Mme Lecompte.

Celle qui vit 24 h sur 24 avec les animaux aborde très brièvement l’invention à la fois controversée et ingénieuse du robot thérapeutique PARO, un bébé phoque électronique japonais qui connaît un grand succès planétaire depuis son lancement, au prix d’environ 5620 $ US. Il s’agit d’un débat très connexe, tout aussi intéressant qu’inquiétant pour certains.

Liberté et son prix
«Dans les contrats de zooanimation que je reçois, il est bien stipulé que le bien-être de l’animal passe en premier. Si mon animal ne va pas bien une journée, je ne le forcerai pas. Au travail, s’il y a un inconfort, je peux partir à tout moment, c’est spécifié d’avance. Est-ce que tout le monde qui travaille en zoothérapie a ce souci? Sans être mal intentionné, on peut facilement pousser trop loin la limite de nos animaux sans être attentif», explique Sophie Lecompte.

«Dans les faits, je pourrais faire n’importe quoi avec mes animaux et ça passerait. N’importe qui peut s’improviser zoothérapeute, même éducateur, dresseur canin ou félin. Les écoles canines ont encore des techniques de punitions très graves telles que le collier étrangleur, la punition physique, l’ancienne méthode qui favorise la domination des chiens, alors que le renforcement positif a fait ses preuves. Il est toujours aussi facile de faire de l’argent sur le dos des animaux. Le client demeure, pour le moment, le seul qui peut filtrer les zoothérapeutes en exigeant des preuves de leurs expériences, des références, leurs diplômes, etc. Ce «laisser-aller» augmente les risques des mauvais traitements aux animaux», fait comprendre Sophie Lecompte.

Plus de 204 717 860 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.