Laissez parler les petits papiers

Écrit par Aurélien Girard, Epoch Times
16.02.2015
  • «… l’environnement apaisant du lac Léman n’a permis que de cadrer ce sur quoi elles porteront lorsque, couteaux entre les dents, les négociateurs se retrouveront à Bonn au mois de juin.». (Historicair/Wikimedia)

Une demi-page par pays, 193 positions nationales sur les efforts à faire pour limiter l’impact du changement climatique et permettre la survie de l’espèce humaine.  Les petits papiers des différentes visions se sont entassés, froissés puis partiellement synthétisés à Genève la semaine dernière pour arriver à un document de 86 pages préparatoire à la Conférence sur le Climat prévue en novembre à Paris.

À la sortie des négociations la semaine dernière, un satisfecit onusien pour avoir conclu les négociations plus tôt que prévu, toutes les opinions étant exprimées. Des négociations qui n’en étaient pas vraiment: l’environnement apaisant du lac Léman n’a permis que de cadrer ce sur quoi elles porteront lorsque, couteaux entre les dents, les négociateurs se retrouveront à Bonn au mois de juin. Et, avec les différentes options posées dans chacun des 103 articles du protocole d’accord, tout est aujourd’hui possible – y compris d’arriver à un texte ne froissant personne mais ne permettant rien.

Point positif réel, la Conférence sur le Climat de Paris, au mois de novembre, est très sérieusement préparée. Tous craignent, les Français en tête – c’est le privilège de l’hôte sur qui retombe, soit la gloire d’un succès, soit l’opprobre d’un échec - de renouveler le dialogue de sourds des négociations de Copenhague en 2009. Celles-ci n’avaient pu accoucher que d’un désaccord massif: ni mécanisme de financement international des efforts de réduction des émissions de CO2, ni objectifs engageants d’efforts dans la transition énergétique. Si les gouvernements présents acceptaient d’envisager des objectifs à atteindre en 2050 – soit bien après la mort des signataires, cette volonté devenait fumée quand ils étaient posés pour 2020.  Copenhague s’était donc conclu par une déclaration non-contraignante «affirmant» la volonté de limiter le réchauffement climatique à +2 degrés d’ici 2100,  et laissant une grande zone de flou sur le devenir du protocole de Kyoto. Un nouvel accord contraignant est donc urgent, comme est urgent qu’il puisse adresser plus que 15% de la pollution mondiale – les absents du protocole de Kyoto - Chine, Inde, Russie, Etats-Unis – générant 85% des émissions de CO2.

Le document à options de Genève contient toutes les possibilités, les points de négociation comprenant, pour n’en citer que quelques uns, le nombre d’années après lequel un signataire a le droit de sortir de l’accord pour redevenir un pollueur libre; la possibilité – ou pas – de sanctions pour non-respect de l’accord ; la possibilité – ou pas – de voir le respect de ses engagements contrôlé.  Le préambule marque tout particulièrement les différences de vues exprimées, certaines des options d’écriture mettant toutes les nations face à la même responsabilité, tandis que d’autres considèrent que les pays développés portent la «responsabilité historique» des émissions de gaz à effet de serre et doivent donc assumer la plus grande part des efforts à venir, les pays en développement pouvant eux, «démarche humanitaire», augmenter leurs émissions. On se console en voyant dans toutes les options d’écriture le changement climatique reconnu comme une des plus grandes menaces pour la capacité de l’humanité  à s’alimenter et à survivre. Reconnu aussi le fait que la «limitation des dommages» que représenterait une limitation de la hausse des températures de 2 degrés d’ici 2100 implique l’arrêt total des émissions de gaz à effet de serre d’ici cinquante ans.  Plus de fumée, plus de fumée,

                        «Laissez parler les petits papiers

                        A l'occasion, papier chiffon

                        Puissent-ils un soir, papier buvard

                        Vous consoler.»