Faible mobilisation aux départementales: un scrutin aux enjeux illisibles?

Écrit par David Vives, Epoch Times
23.03.2015
  • Philippe Grosvalet (PS), président socialiste du Conseil général de Loire-Atlantique, le 22 mars, avant le vote du premier tour des départementales à Saint-Nazaire. (Jean-Sébastien Evrard/AFP/Getty Images)

Alors que le projet de réforme territoriale bat son plein, il aurait paru de bon sens d’avoir, pour les Français, une meilleure information sur les enjeux électoraux.

«Séisme politique», «crise de la démocratie», entend-on au sujet de ce premier tour des élections, qui confirme, comme on pouvait l’attendre, un taux d’abstention très élevé. La portée du message exprimé dans les urnes fait s’interroger nombre de spécialistes et observateurs de la vie politique de notre pays. Pour autant, l’opposition des Français à la politique du gouvernement ne cache-t-elle pas l’incompréhension de l’enjeu du scrutin? En effet, beaucoup d’éléments ont contribué à rendre cette élection départementale illisible.

Les transports scolaires, la gestion des collèges ou l’entretien des routes, parmi toutes les compétences relatives aux départements ont, semble-t-il, moins attiré l’attention des médias et les prises de positions politiques que la transformation du scrutin en référendum national sur la politique actuelle du gouvernement. Il faut dire qu’en pleine réforme territoriale, et avec un mode de scrutin unique, même les observateurs aguerris ont du mal à suivre le rythme.

Le rôle des départements, encore flou pour le PS et l’UMP

Pour commencer, le principe même du département est loin de faire l’unanimité dans la classe politique; au point d’être le premier visé dans le projet de simplification du «mille-feuille» administratif. En janvier 2014, Jean-François Copé proposait de fusionner conseils généraux et départementaux en supprimant purement et simplement les départements.Idée séduisante dans un premier temps, puis finalement rejetée.

«Les départements exercent des compétences de proximité qu’aucune autre institution ne peut remplir. Les communes n’ont pas la puissance financière pour le permettre, la région est trop loin du terrain et les communautés de communes n’ont jamais pris en Ile-de-France», conclut Patrick Devedjian, président des Hauts-de-Seine.

Au PS, après avoir un temps proposé leur suppression, on a également fait machine arrière. La Nouvelle Organisation Territoriale (NOTRe), une loi destinée à transférer des compétences aux nouvelles grandes régions, a finalement renforcé les compétences des départements dans les domaines du social et de l’éducation. Le FN a pour sa part réclamé leur maintien. Cependant, cette prise de position peut être nuancée, car le parti d’extrême droite ne connait pas l’implantation territoriale des grands partis et ne se prononce pas clairement sur le projet de simplification.

La réforme territoriale actuellement en cours se donne pour but de clarifier le rôle des échelons administratifs, d’organiser les compétences et de réaliser des économies. Cependant, le dispositif, qui divise en deux le nombre de régions, n’a pas pour autant donné de précisions sur la répartition des compétences entre les différents échelons administratifs. De plus, il n’entrera en fonction qu’après la désignation des conseillers départementaux. Impossible, donc, de savoir sur quoi travailleront les futurs élus.

Les Français, majoritairement attachés à leur département

D’après les différentes enquêtes d’opinion, l’abstention ne saurait être comprise comme une indifférence des Français par rapport à leur département. D’après un récent sondage Ifop, seuls 29% des Français connaissent le nom du président de leur conseil général. Et 52% se déclarent pour la suppression pure et simple de ce dernier (contre 60% en 2014).

Au sujet du transfert de compétences, une majorité de Français souhaitent le maintien des départements. Mais dès que l’on rentre dans le détail, il faut être «un acharné de la démocratie locale, un lecteur du quotidien régional ou un militant, de préférence âgé, pour se souvenir de qui fait et préside quoi», analyse Ouest France, qui a commandité le sondage.

Il apparaît également que les Français résidant dans les départements ruraux sont les moins enclins à la suppression des conseils généraux; ce sont aussi les sondés les moins enclins au transfert de compétences des départements aux régions. Il sera intéressant de noter qu’au premier tour, ce sont ces départements, comme l’Aude, qui ont le plus mobilisé leurs électeurs.

Dans ces départements, la présence des services sociaux est déterminante. Avec la réduction du nombre de régions, il est à parier que le département deviendra un échelon de proximité indispensable pour pouvoir appliquer une politique sociale, et pas seulement dans les zones rurales. Raison de plus, s’il fallait encore s’en convaincre, pour éviter les débats nationaux dans un scrutin local…