Architecture traditionnelle, des trésors en voie de disparition

Écrit par Christine Lin, Epoch Times
21.05.2015
  • Bord du fleuve Yangtze, avant /après.

«En finir avec l’ancien et plébisciter le nouveau», tel semble être le leitmotiv général du régime communiste chinois vis-à-vis du patrimoine architectural du pays.

Nous avons tous encore en mémoire les récentes campagnes de démolition du vieux Pékin pour la construction du stade olympique pour les Jeux de 2008, ainsi que les nombreuses démolitions forcées des habitations de citoyens pour faire place à des gratte-ciel. En remontant un peu plus loin dans le temps, au cours de la Révolution culturelle, la Chine a vu des milliers de temples et de reliques, être détruits par l’armée. Ce processus d’effacement des traces du passé se poursuit encore aujourd’hui dans des régions comme le Tibet.

Toutefois, les icônes de l’architecture qui ont survécu continuent d’attirer des touristes, les incitant à s’interroger sur la richesse et la variété de l’histoire de la Chine.

Un rêve devenu réalité

Peter Shay, un photographe installé à Manhattan est tombé sous le charme des constructions anciennes chinoises lors de sa première visite à la Grande Muraille en 2007.

  • Bord du fleuve Yangtze, avant /après.

Excédé par la cohue des touristes à Badaling, la partie la plus visitée de la muraille, Shay s’est tourné vers des guides locaux qui l’ont amené voir Simatai, une section plus au Nord du mur.

Dans un courriel, il explique: «C’est là où ma fascination pour la magnificence de la Grande Muraille de Chine est née... En me projetant dans le passé, je sentais la présence des anciens bâtisseurs travaillant dans des conditions extrêmes, celle des guerriers armés de leurs flèches et de leurs épées, juchés sur les tours de garde, prêts à combattre les invasions des forces étrangères. C’est devenu, pour moi, une épopée vivante qui m’a emmené loin de la réalité des ruines où je me tenais».

Shay a rassemblé environ 500 photographies d’architecture prises essentiellement par des documentalistes japonais dans les années 1920 et 1930. Il a remarqué qu’environ 70 des constructions existaient encore et a décidé de les localiser et de les photographier sous le même angle que les clichés de l’époque dont il disposait.

Pour réaliser son rêve, Shay a sillonné 15 villes différentes en trois voyages en Chine, avant de publier son ouvrage «Photographing Chinese Architecture, A Century of Change» disponible sur iTunes et Kindle (Amazon).

Un siècle de bouleversements

Sur chaque page du livre, deux photos se font face, l’architecture telle qu’elle était, comparée à ce qu’elle est devenue aujourd’hui. Les ponts, les pagodes, et les pavillons ont plus ou moins gardé les mêmes formes. L’usure en a abîmé certains ; d’autres ont été habillés par de l’aménagement paysager, des travaux de peinture et des balustrades de protection pour les visiteurs.

  • Yonghe, avant/après.

Sur quelques plans contemporains – proprement pavés –, une certaine homogénéité transparaît, avec des gratte-ciel enveloppés de brouillard en arrière fond. On peut aussi percevoir l’impact de la dégradation environnementale et commerciale. Sur les rives du Yang-Tsé Kiang, on voit une tâche, c’était un petit village de pêcheurs niché dans une verdure abondante. Aujourd’hui, une énorme barge transportant des milliers de rondins soigneusement coupés navigue devant une publicité géante avec des caractères rouges pour un restaurant.

Toutes ces photos confirment qu’anciennement le pays était un lieu de paix. Il y avait plus d’endroit propices à la méditation et moins de commerces. Les temples n’avaient pas de café au rez-de-chaussée ou de boutiques de souvenirs à l’époque. Aujourd’hui, même si les dimensions physiques des bâtiments sont restées identiques, ils ont perdu de leur importance sociale, à mesure que la société fonce inexorablement vers l’avenir et considère peu le passé.

Les efforts locaux de préservation

Et pourtant Shay va découvrir qu’au niveau individuel, l’enthousiasme local pour les reliques culturelles est encore vivant.

Sa rencontre la plus mémorable a été avec un résident local du nom de Hou Qingshan, dont la ferme, située dans une vallée à environ 125 km au nord-est du centre de Pékin, disposait d’une vue imprenable sur la Grande Muraille à Jinshanling.

«Sans mandat officiel, M. Hou se comporte tout de même en gardien autoproclamé de cette portion éloignée de la Grande Muraille», explique Shay. «Il m’a amené à l’arrière de sa cour, sur un chemin escarpé de terre battue et de grosses pierres, qu’il avait lui-même conçu afin d’accéder à la paroi, lui permettant de soutenir la muraille et de la protéger des éléments extérieurs. En voyant la photo que j’avais apportée avec moi, comme modèle pour faire ma photo, ses yeux brillaient d’excitation... La gratitude que j’ai ressentie en cet instant dépassait tout ce que j’avais vécu au cours de mes douze semaines de voyage en Chine».

  • Yonghe, avant/après.

Shay déclare: «Je me souviens encore de l’aide inestimable et de la coopération des citoyens locaux, des chauffeurs de taxi et des employés gouvernementaux qui ont compris ma passion pour leur patrimoine et m’ont généreusement offert leur aide énorme dans la localisation des anciennes constructions».

Shay, qui est convaincu que le tourisme contribuera à la préservation de ces lieux historiques, exhorte les populations locales, les gouvernements et les visiteurs eux-mêmes à apprécier leur valeur intrinsèque. Pour lui, les perspectives économiques et le respect du patrimoine culturel ne sont pas incompatibles. Au contraire, en s’harmonisant, ils peuvent aboutir à un «équilibre de la société».

«En ce qui concerne l’architecture et l’héritage artistique chinois, mes espoirs personnels sont que la Chine et ses citoyens actuels et futurs, prennent conscience de l’importance de l’éducation et de la transmission des expériences du passé et du présent, afin que les générations futures comprennent, apprécient, respectent et enfin protègent, le patrimoine culturel unique qui existe sur leurs terres».

Version originale: Photographer Hunts Down China’s Next Endangered Species: Architecture