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Entretien exclusif avec le président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain

Écrit par Patrice-Hans Perrier, La Grande Époque
29.11.2009
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  • Michel Leblanc, président de la CCMM(攝影: Yanick Dery / 大紀元)

Le président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM) est le premier invité de cette série d’entretiens. Michel Leblanc est en poste depuis janvier 2009 et assume les responsabilités de planification, de gestion et de coordination sans oublier le suivi de l’ensemble des opérations de la CCMM.

Il s’agit, de l’avis des gens de communication de l’organisme, d’un gestionnaire qui possèderait «une solide connaissance des enjeux métropolitains». C’est un peu ce que nous avons voulu mettre à l’épreuve au gré d’un bref entretien permettant au principal intéressé de mettre sur la table certaines des priorités qu’il a déjà cernées pour la prochaine décennie.

Dans le contexte de la présente crise, il semble que Montréal fasse mieux que ses consœurs canadiennes, à un point tel que certains n’hésitent pas à parler d’une recrudescence de sa vitalité économique. Le phœnix renaîtra-t-il de ses cendres? Toujours est-il que certains se frottent déjà les mains suite au fameux plan dévoilé par le président américain afin de mettre en branle une dizaine de réseaux de trains à grande vitesse, une initiative qui ferait de Montréal un nouveau hub de première importance sur la côte est nord-américaine.

Un peu plus de six mois plus tard, nous avons rencontré le président de la CCMM afin de prendre le pouls des nouveaux horizons qui se profilent dans l’observatoire de cet organisme de consultation, d’analyses stratégiques et de support à notre classe entrepreneuriale.

La Grande Époque (LGÉ) : Nous sommes toujours en pleine crise économique, parlez-nous de la relance et du repositionnement de Montréal. Justement, la volonté de l’administration Obama d’implanter une desserte de TGV qui passerait par Montréal (voir l’article au lien suivant : http://www.lagrandeepoque.com/LGE/Canada-/-Quebec/Michael-Ignatieff-tente-damadouer-les-municipalites-quebecoises.html) pourrait nous permettre de relancer notre industrie du matériel roulant, qu’en pensez-vous?

Michel Leblanc (M.L.) : D’entrée de jeu, j’aimerais souligner que Montréal figure parmi les villes nord-américaines souffrant le moins de la présente récession. Quand on parle de la relance de notre métropole, il faut prendre en compte que le nombre de fermetures, de reprises en main ou de faillites n’y est pas aussi élevé qu’ailleurs […] ce qui nous permet d’être optimistes. Nous pouvons donc tabler sur les raisons de cette bonne performance, qui traduisent la réalité des grands projets sur les rails depuis longtemps.

Le projet d’une desserte de TGV, d’un point de vue continental, vient s’ajouter aux grands chantiers montréalais et québécois qui sont, déjà, en cours de réalisation. La réaction de la CCMM à ce projet de TGV, dans une approche continentale, est fort intéressée… en autant que cette desserte projetée passe par Montréal. Il s’agit, en effet, d’un projet très porteur puisqu’il s’agit d’un mode de transport rapide pour nous relier avec de grands axes urbains, mais aussi parce qu’il fera appel à des technologies qui sont maitrisées par un de nos fleurons industriels : Bombardier. Finalement, cette nouvelle desserte correspond avec la volonté de prendre en compte les objectifs de réduction des GES [gaz à effet de serre], puisqu’il s’agit d’un mode de transport beaucoup plus écologique que l’avion par exemple.

Mais, il y a aussi d’autres projets prioritaires. Une réalité qui commande un certain pragmatisme, histoire de bien ordonner la séquence de mise en œuvre de nos stratégies de développement économique et commercial. D’un point de vue métropolitain, il y a des projets d’aménagement de dessertes en transport en commun locales, à l’instar de la prolongation d’une ligne de métro vers l’est ou de la navette ferroviaire, qui nous aideront à aller de l’avant. Dans le même ordre d’idées, il ne faudrait pas oublier les projets de rénovation du réseau routier, incluant des voies réservées pour le transport en commun. On pense, ici, aux grands projets de mise à niveau de l’échangeur Turcot ou de la rue Notre-Dame. Un accès ouest-est important pour le centre-ville et pour le port de Montréal, dans un contexte où cette infrastructure est de la plus haute importance pour notre métropole.

LGÉ : Qu’en est-il de la volonté du gouvernement Charest de mousser une nouvelle desserte d’énergie vers la Nouvelle-Angleterre, avec la mise en fonction de la centrale La Romaine par exemple, un partenariat énergétique qui pourrait aider à repositionner Montréal sur l’échiquier économique?

M.L. : J’observe que cette nouvelle desserte aura un effet économique structurant pour Montréal mais, encore une fois, de façon indirecte. C’est évident que les mégas projets hydroélectriques, au niveau du savoir-faire de nos grandes sociétés de génie-conseil, auront des retombées vitales pour le grand Montréal métropolitain. À travers ces grands projets, il y a la capacité pour le Québec et pour Montréal de réaliser d’importants bénéfices en raison de l’effet d’entrainement qui sera induit. Ainsi, à l’instar de l’Alberta, ce redéploiement de la filière énergétique nous permettra de faire baisser les impôts, de créer un fond dédié à l’héritage naturel, d’améliorer les finances publiques et, chemin faisant, d’attirer de nouveaux investisseurs.

Si le Québec parvient à jouir des retombées anticipées il s’agira d’un effet positif restructurant pour Montréal. Le remplacement des énergies fossiles, très dommageables pour l’environnement, par des formes d’énergies moins polluantes nous permettra de nous positionner dans le peloton de tête des économies émergentes.

Un point à propos de l’éolien, j’ai tendance à croire que les projets envisagés [ici, notre interlocuteur fait allusion aux projets mis de l’avant par la société Boralex] sont basés sur des modèles économiques solides. Toutefois, la démonstration du plein potentiel de l’éolien comme source de remplacement est encore à faire. Pensons au fait que les volumes de demandes énergétiques des grandes villes commanderont l’implantation de parcs éoliens très performants pour lesquels nous devront consacrer des efforts en recherche et développement considérables. Ça sera prometteur, mais je ne suis pas un spécialiste.

LGÉ : Pour parler comme les Français, pourrait-on entrevoir un régime de développement de sociétés mixtes, où une société d’État est porteuse d’un grand projet à l’exportation qui ouvrira des portes à d’autres sociétés parapubliques ou privées apparentées?

M.L. : Définitivement, on peut envisager ce modèle. Mais, aussi, on peut arguer que le secteur privé génère une meilleure efficacité sur le long terme, option que j’ai tendance à retenir. Bien entendu, dans le cas d’un scénario de privatisation, une régie devra être mise sur pied pour protéger les prix à la consommation, faisant en sorte d’éviter que l’on tombe dans une situation de quasi-monopole.

LGÉ : En dépit de la perte de certaines industries, nous excellons toujours au niveau des entreprises biopharmaceutiques, de la recherche médicale et des autres créneaux dédiés aux sciences de la santé. Y aurait-il possibilité de développer des partenariats avec des intervenants sur la côte est américaine?

M.L. : En effet, dans le secteur des sciences de la vie, nous possédons de grandes sociétés pharmaceutiques qui investissent dans la région de Montréal. Prenez le cas de la production du vaccin contre la grippe H1N1, la recherche est en cours dans la région métropolitaine de Laval et la production est localisée dans la région de Québec.

LGÉ : Possède-t-on suffisamment de capital de risque et y a-t-il des anges qui sont prêts à supporter les nouveaux entrepreneurs, comme en Californie?

M.L. : Du capital de risque il y en a toujours eu, j’ajouterais même que la région métropolitaine est dans le peloton de tête au Canada. Toutefois, dans un contexte où le capital de risque se fait plus rare, la question des anges prend une importance accrue, surtout pour les jeunes entreprises en phase de démarrage (early stage) ou, paradoxalement, pour les vieilles entreprises qui tentent d’amorcer une relance de leurs activités (late stage).

Nous avons des fonds de démarrage dont le gouvernement du Québec assume la mise sur pied mais, en ce qui a trait aux anges, c’est une autre question. Pour avoir des anges investisseurs, il faut qu’il y ait suffisamment de richesse privée dans la société. Avons-nous un nombre assez élevé de millionnaires pour générer l’apparition de cette nouvelle classe d’investisseurs?

Quoi qu’il en soit, le premier défi consiste à nous assurer que les fonds de démarrage que nous avons mis en place seront en mesure de livrer la marchandise. L’autre défi concerne les institutions de financement privées, dans un contexte où il peut y avoir du financement sous-utilisé ou une prolifération de petites sociétés fragiles qui émergent ou pas assez d’encadrement proposé aux sociétés déjà en place. Tout dépendra, en définitive, de l’efficacité du transfert technologique [vers de nouvelles industries porteuses] qui sera financé par des sociétés de prédémarrage.

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LGÉ : Quels sont les créneaux porteurs montréalais que vous avez identifiés?

M.L. : C’est clair que, d’un point de vue montréalais, l’aéronautique représente un secteur résilient qui aura surmonté la crise et qui [malgré les retards causés par la récession] demeure toujours un secteur pilier de l’économie locale.

Dans le secteur des technologies de l’information, je pense au gaming ou au multimédia, il y a une pépinière de jeunes talents en pleine ébullition qui augure bien. Des sociétés comme CAE participent à ce boum multimédia, même si on qualifie leurs activités de serious gaming (en référence à leurs plateformes de simulation de vols aéronautiques).

Au-delà du secteur des sciences de la vie, il y a un énorme buzz à Montréal au niveau du secteur culturel montréalais. L’image de marque, le créatif, la valeur ajoutée à notre trait identitaire qui génère une vitalité créative bien de chez nous.

N’oublions pas la chaîne logistique qui part du Port de Montréal, incluant les lignes du CN et du CP, faisant en sorte que l’on approvisionne tout le Midwest américain. Un positionnement qui fait de Montréal un hub de distribution pour beaucoup de secteurs commerciaux ou industriels. Il s’agit d’un axe fondamental en définitive.

LGÉ : Finalement, parlons du domaine culturel. Toronto serait-elle en train de nous damer le pion (voir l’article au lien suivant : http://www.lagrandeepoque.com/LGE/Arts-et-cultures/Le-Rendez-vous-novembre-2007-Montreal-metropole-culturelle.html)? Comment conserver notre avantage comparatif dans le domaine des industries culturelles et des secteurs apparentés?

M.L. : Nous nous faisons [à la CCMM] un point d’honneur d’intéresser le monde des affaires à investir dans le domaine de la culture. Nous défendons le fait que la culture soit un «véhicule de création de richesse» et nos interlocuteurs du secteur privé en sont conscients. On doit aider le secteur privé à détecter des signaux, à saisir les opportunités d’investissement ou de partenariat à tous les niveaux. Aussi, notre rôle consiste à faire comprendre au milieu culturel l’importance de mieux s’organiser afin de favoriser d’éventuels partenariats avec le privé. En définitive, il faut transformer notre avantage créatif en force de frappe capable de générer une renaissance de ce secteur.

Plus de 204 720 056 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.