SCIENCES

Les astronomes découvrent un mystérieux amas de galaxies en miroir dans l’espace lointain et résolvent enfin un mystère cosmique

janvier 26, 2022 1:07, Last Updated: janvier 26, 2022 1:07
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Il y a quelques années, un étrange amas de galaxies « en miroir » a été découvert dans l’espace lointain, à des milliards d’années‑lumière de la Terre, et les chercheurs commencent maintenant à s’y retrouver. Comprendre les « miroirs déformants » de l’espace lointain a été essentiel pour percer le mystère.

Observer l’espace lointain avec le télescope spatial Hubble de la NASA, c’est un peu comme regarder dans un miroir déformant. Le tissu ondulé de l’espace, tordu par la gravité des objets célestes tels que les amas de galaxies lointaines, peut avoir le même effet qu’un miroir déformé, en étirant, en agrandissant, voire en éclaircissant les scènes situées à des distances plus éloignées – un phénomène connu des astronomes sous le nom de « lentille gravitationnelle. »

Cette lentille gravitationnelle permet aux chercheurs de l’espace d’étudier ce qui se cache derrière les objets intermédiaires qui causent la distorsion de la lentille elle‑même, tandis que cet étirement, cet agrandissement ou cet éclaircissement agit, en fait, comme une sorte de télescope naturel, en mettant en valeur les objets distants avec plus de détails qu’il ne serait possible autrement.

Une image miroir dans l’espace lointain ?

Mais un étrange phénomène lié à la lentille gravitationnelle a été découvert par Timothy Hamilton, chercheur au télescope spatial Hubble, en 2013 ; à l’époque, il ne savait pas quoi en faire. Alors qu’il effectuait des recherches sur les quasars (les noyaux flamboyants des galaxies actives), M. Hamilton est tombé sur ce qui ressemblait à une image miroir presque symétrique, avec des paires de bulbes galactique (des noyaux centraux de galaxies remplis d’étoiles) et trois traînées distinctes de chaque côté, se faisant face. Cette étrange observation symétrique a été baptisée « objet d’Hamilton », du nom de son découvreur.

Bien sûr, les chercheurs de la NASA ont déjà rencontré des phénomènes étranges dans l’espace, tels que des collisions de galaxies et des explosions d’étoiles. Il nous a pourtant fallu des années pour élucider le mystère de la cause de ce phénomène galactique. « Nous étions vraiment perplexes », a déclaré M. Hamilton à la NASA. « Ma première idée était qu’il s’agissait peut‑être de galaxies en interaction dont le bras était étiré par la force des choses. Cela ne collait pas vraiment, mais je ne savais pas quoi penser d’autre. »

« Hamilton’s Object » (Avec l’aimable autorisation de la NASA, ESA, Richard E. Griffiths (UH Hilo) ; Co-auteure : Jenny Wagner (ZAH) ; Traitement d’image : Joseph DePasquale (STScI)

Après avoir échafaudé des théories sans issue et sollicité l’aide de collègues, M. Hamilton et une équipe de plus en plus nombreuse, avec Richard Griffiths de l’université d’Hawaï à sa tête, ont finalement résolu l’énigme. Richard Griffiths avait vu un objet similaire dans une étude des amas profonds de Hubble et, en 2015, il a confirmé que l’effet de lentille gravitationnelle en était la cause. Ils ont déterminé que l’image symétrique était due à l’alignement parfait d’un amas de galaxies intermédiaire avec des objets de fond plus éloignés. Le rare effet de miroir est dû à des galaxies d’arrière‑plan qui chevauchent une ondulation dans le tissu de l’espace ‑ une quantité dense de matière noire (le tissu invisible de l’espace que les scientifiques ne comprennent pas encore complètement) causant une distorsion invisible.

Une ondulation invisible de matière noire dans l’espace

M.Griffiths a comparé cette distorsion étrange à l’observation du fond d’une piscine. « Pensez à la surface ondulée d’une piscine par une journée ensoleillée, qui montre des motifs de lumière vive au fond de la piscine », a‑t‑il déclaré. « Ces motifs lumineux sur le fond sont causés par un effet similaire à celui de la lentille gravitationnelle. Les ondulations à la surface agissent comme des lentilles partielles et concentrent la lumière du soleil en motifs brillants et ondulés sur le fond. »

Mais l’équipe avait encore un problème : elle ne pouvait pas identifier l’amas intermédiaire, qui était finalement à l’origine de l’effet de lentille. Normalement, cet amas est la première chose que les chercheurs voient ; les distorsions ultérieures sont observées au sein de cet amas. Les données du Sloan Digital Sky Survey ont permis de localiser l’amas au même endroit que les images de l’effet de lentille et de déterminer qu’il s’agissait d’une galaxie spirale barrée, apparemment de face, située à plus de 7 milliards d’années‑lumière. On a constaté que les images d’arrière‑plan étaient elles‑mêmes éloignées de plus de 11 milliards d’années‑lumière.

Cartographier l’invisible

Pour mieux comprendre les effets de la matière noire, le professeur Griffiths a fait appel à une experte de la théorie de la lentille gravitationnelle, Jenny Wagner, de l’université de Heidelberg en Allemagne, qui a utilisé un logiciel pour cartographier la matière noire à l’origine de la distorsion, et a conclu qu’elle était répartie de manière « régulière » dans l’espace à petite échelle.

« C’est génial que nous n’ayons besoin que de deux images miroir pour obtenir une échelle sur la façon dont la matière noire peut être épaisse ou non à ces positions », a déclaré Mme Wagner. « Ici, nous n’utilisons aucun modèle de lentille. Nous prenons simplement les [éléments] observables des diverses images et le fait qu’elles peuvent être transformées l’une en l’autre. Elles peuvent être repliées les unes sur les autres par notre méthode. Cela nous donne déjà une idée de la fluidité que doit avoir la matière noire à ces deux positions. »

La découverte de cette lentille gravitationnelle induite par la matière noire est importante, car les astronomes ne savent toujours pas exactement ce qu’est la matière noire, même près d’un siècle après sa découverte. « Nous savons qu’il s’agit d’une certaine forme de matière, mais nous n’avons aucune idée de la particule qui la constitue », a déclaré M. Griffiths. « Nous ne savons donc pas du tout comment elle se comporte. Nous savons simplement qu’elle a une masse et qu’elle est soumise à la gravité. La signification des limites de taille sur l’agglutination ou la régularité est qu’elle nous donne des indices sur ce que pourrait être la particule. Plus les amas de matière noire sont petits, plus les particules doivent être massives. »


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