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Au Liban, le virus chamboule les mariages et une industrie longtemps florissante

mai 1, 2020 13:00, Last Updated: mai 1, 2020 13:30
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Maya et Rakan rêvaient d’un mariage féérique au Vatican, mais c’était sans compter un invité imprévu. Le nouveau coronavirus les a contraints à convoler en justes noces dans une église au Liban, sans tambour ni trompette et avec moins de dix convives.

Le printemps inaugure au Liban le bal des mariages, souvent extravagants, et met en branle la machine des « wedding planners », ces organisateurs dont certains offrent même leurs prestations dans les riches monarchies du Golfe.

Cette année toutefois la saison est bouleversée par la maladie de Covid-19. Et l’industrie du mariage, longtemps prospère mais déjà impactée par la crise économique, est aujourd’hui en berne.

Cérémonie dans une « église vide »

Maya Khadra s’est résignée à une cérémonie dans une « église vide », dans le petit village de Chemlane au sud de Beyrouth.

A l’église Notre-Dame des Secours, le couple a célébré son union sous la pluie, en présence de leur famille restreinte.

« Le coronavirus a tout chamboulé, même notre mariage », déplore la jeune mariée de 26 ans aux grands yeux verts, coiffée d’une couronne de roses blanches.

« Le Vatican a appelé pour nous dire que tous les mariages étaient annulés pendant neuf mois. »

Avec son fiancé Rakan Ghossein, ils pouvaient choisir d’attendre. Ils ont opté pour des noces discrètes dans leur pays.

« Personne ne sait quand le coronavirus prendra fin, et puis reporter c’était perdre du temps », explique cette journaliste.

-Maya Khadra et Rakan Ghossein posent pour une photo, avec des proches, lors de leur mariage à l’église Notre-Dame-d ‘Assistance dans le village de Shemlan au sud de Beyrouth le 25 avril 2020Photo par ANWAR AMRO / AFP via Getty Images.

Dans un salon de l’église, la sœur de Maya enchaîne les appels vidéo sur WhatsApp, les amis voulant féliciter les époux. Leur absence est « la chose la plus difficile », déplore la mariée.

Même pas un déjeuner familial

Dans la cour, le père du fiancé est insatisfait. Il aurait voulu inviter « mille personnes », comme il dit l’avoir fait pour ses six autres enfants.

Après la cérémonie même pas un déjeuner familial, chacun va rentrer chez soi. Mesures de confinement obligent.

Le Liban a enregistré officiellement 725 cas, dont 24 décès, multipliant les précautions: fermeture de l’aéroport et des restaurants, couvre-feu nocturne et interdiction des rassemblements dans les lieux de culte.

Adieux aux célébrations, et à l’industrie du mariage

Et même si un plan de dé-confinement en cinq étapes est prévu, les rassemblements restent interdits. Au grand dam des couples qui disent adieux aux célébrations, et de l’industrie du mariage.

Car au Liban, le coût des fêtes de mariage peut aller jusqu’à plusieurs centaines de milliers de dollars: la noce, animée par la musique des DJ ou les bouquets de feux d’artifice, immortalisée par des photographes et même des drones bourdonnant, s’accompagne de buffets gargantuesques.

Ces coûts hors-norme ont poussé les banques à proposer même un crédit mariage.

Le business est juteux, surtout avec les milliers de jeunes expatriés, installés parfois dans les pays du Golfe, qui aiment organiser la fête dans leur pays natal.

Seulement une brève cérémonie

Chanel Fayad et son fiancé ont reporté leur mariage de quelques semaines. Avant la crise, ils avaient prévu un dîner dans un restaurant avec leurs amis.

Mais « nous allons seulement avoir une brève cérémonie », affirme la jeune institutrice de 29 ans par téléphone à l’AFP.

-Un prêtre libanais effectue la cérémonie de mariage de Joanna et Marc, à laquelle seuls des proches parents ont assisté au milieu de la pandémie de COVID-19, à l’église Saint-Georges dans la région de Hadath, à l’est de la capitale Beyrouth, le 18 avril 2020. Photo par IBRAHIM AMRO / AFP via Getty Images.

Pour elle, la situation ne s’améliorera pas après la pandémie, le pays étant englué dans sa pire crise économique depuis la guerre civile (1975-1990). « On se dirige vers bien pire, économiquement parlant. »

L’industrie du mariage génère annuellement des millions de dollars selon les professionnels du secteur, et entretient des milliers d’emplois, y compris dans les secteurs annexes -restauration, hôtellerie, art floral.

Mais Pamela Mansour Mhanna, copropriétaire de l’agence d’événementiel Mine, reconnaît que la situation est désastreuse.

« Plus de 75% de nos événements ont été annulés », déplore-t-elle, estimant que la pandémie et la crise économique représentent un « double défi ».

A l’avenir, elle souhaite capitaliser sur ses « activités à l’étranger », après avoir fondé il y a quelques mois une filiale à Ryad.

Dans l’immédiat au Liban, elle espère un allègement des restrictions.

Pour le prêtre Hanna Khadra, qui a célébré l’union de Maya et Rakan, les mariages ne doivent être ni annulés ni reportés.

« L’amour est plus fort que le coronavirus ou que la mort », dit-il en souriant. « L’amour ne saurait être reporté ».

 

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