Le blanchiment du trafic d’enfants en Chine

17 janvier 2017 07:55 Mis à jour: 2 mai 2017 21:26

Depuis des années, les parents chinois doivent faire face à une éventualité atroce : voir leur enfant enlevé pour être vendu dans un vaste trafic. Ce problème insoluble est particulièrement répandu et des dizaines de milliers de nouveau-nés disparaissent chaque année.

Le savoir-faire qui s’est développé autour de la traite des enfants – impliquant la police, les médecins, les infirmières et les hôpitaux – explique l’ampleur du phénomène.

La création d’un faux certificat de naissance, voilà la clef d’un tel enlèvement. Une fois le bébé volé, un intermédiaire vient soudoyer le personnel de l’hôpital pour créer un certificat de naissance qui sera intégré dans les données informatiques de l’établissement ; c’est à ce moment précis qu’ on blanchit efficacement toute l’action, l’identité de l’enfant est transformée et de nouveaux parents peuvent venir le chercher.

Peu importe que l’hôpital soit efficace, certains médecins veulent gagner plus d’argent.
– Zhao Dapeng

« Lorsque j’ai obtenu pour vous un certificat de naissance, vous pouvez aller vérifier auprès de l’hôpital. Et si vous pouvez accéder au dossier médical, vous savez que le certificat est bon », explique Zhao Dapeng, 32 ans, qui a participé à ce type d’opérations pendant cinq ans.

Zhao a offert son témoignage à un journaliste de l’hebdomadaire Beijing News, entré en contact avec lui grâce à un informateur. Zhao recevait 100 000 yuans pour un certificat (15 000 euros) qu’il pouvait retirer en deux semaines dans différents hôpitaux ou maternités du pays.

« Peu importe que l’hôpital soit efficace, certains médecins veulent gagner plus d’argent. Leur salaire ne s’élève qu’à 3 000 ou 4 000 yuans [400 à 600 euros] par mois », explique Zhao. Une telle opération rapporte de l’argent aux médecins, aux directeurs des hôpitaux, aux infirmières et à tous les intermédiaires nécessaires pour créer les faux certificats.

« Les faux certificats de naissance sont enregistrés dans la base de données informatiques de l’hôpital, exactement comme les vrais », ajoute-t-il.

Une femme tient sa fille, dans la maternité d’Antai à Pékin, le 26 janvier 2012. (Ed Jones / AFP / Getty Images)

Selon l’Evening News, en novembre 2014, la police a secouru cinq enfants qui avaient été enlevés à leurs parents biologiques dans le comté de Tongfang, dans la province du Fujian, dans le sud de la Chine. Deux couples de parents avaient blanchi leurs adoptions en inscrivant les nouveau-nés dans le système chinois d’enregistrement des ménages après avoir payé plus de 20 000 yuans (environ 3 000 euros) pour de faux certificats de naissance.

L’enquête sur cette affaire a révélé l’étendue de la fraude. Les autorités ont constaté que le médecin corrompu qui vendait les certificats – Liang Shaoquan, le directeur du Centre de santé de Tieyongzhen dans le Guangdong – avait soudoyé ses infirmières pour créer de faux dossiers médicaux qui développaient en détail les étapes d’une grossesse et d’un accouchement qui n’avaient jamais eu lieu.

Liang a été condamné à une peine d’un an de prison, en juillet 2015 pour corruption et abus de pouvoir.

Plus de 70 000 enfants sont enlevés chaque année,

Des fonctionnaires ont également été impliqués. En août, Liu Xin, de la Commission de la santé et du planning familiale du comté de Longhui, dans la province du Hunan, a été arrêté après avoir été pris la main dans le sac en train de marchander des certificats de naissance qui fonctionnaient comme des chèques en blanc en pouvant être immatriculés plus tard.

Selon le nouveau site d’information The Paper, un intermédiaire, Xiong Mingzhong, les revendait ensuite sur Internet pour des prix allant de 7 500 à 15 000 euros.

Plus de 70 000 enfants sont enlevés chaque année, selon des estimations rapportées par la presse chinoise, moins de 0,1% d’entre eux sont retrouvés et rendus aux parents.

La facilité avec laquelle on peut acheter de tels certificats de naissance sur le marché noir aggrave le problème des enlèvements. Sans ces certificats, les parents adoptifs ne seraient pas en mesure d’envoyer les enfants à l’école et il serait plus facile pour les parents biologiques de localiser leurs nouveau-nés.

Une célèbre plate-forme en ligne conçue pour faciliter le contact entre des couples qui souhaitent adopter et ceux qui souhaitent abandonner leurs enfants a été impliquée. M. Zhou, le fondateur de la plate-forme Fulfilling Dreams of Adoption, a été reconnu coupable d’avoir vendu plus d’une centaine de faux certificats de naissance et d’avoir fait un bénéfice de plus de 90 000 euros, a rapporté Xinhua en septembre 2014.

M. Zhou a utilisé la populaire application chinoise WeChat pour trouver des acheteurs et organiser la vente via une bijouterie de façade sur Taobao, l’e-bay chinois. Il a été arrêté suite à une enquête menée par la police qui couvrait 27 provinces et qui a entraîné plus d’un millier d’arrestations, finalement 382 enfants adoptés ont pu retrouver leurs vrais parents.

Voilà des années que des magasins en ligne fonctionnent comme la bijouterie de Zhou sans rencontrer d’obstacles et proposent « des certificats de naissance haute qualité ». En 2013, un journaliste du Global Times a contacté l’une de ces boutiques, en s’enquérant s’il était possible d’obtenir un certificat de naissance.

« Vous pouvez l’obtenir, [vous êtes] parent », lui a-t-on répondu.

Version originale: China’s Child Laundering Industry

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