Le couvre-feu québécois n’avait aucun fondement scientifique révèlent des documents

Par Lee Harding
9 mars 2022 18:27 Mis à jour: 9 mars 2022 18:27

Les révélations selon lesquelles le gouvernement du Québec a ordonné un couvre‑feu Covid‑19 en décembre 2021, contrairement aux avis scientifiques, ont suscité des appels à des enquêtes sur les mesures sanitaires imposées au Québec et dans d’autres juridictions à travers le Canada, dont celle de deux groupes de droits civils et constitutionnels.

« Des professionnels de la santé publique de Montréal et de l’institut de santé publique [du Québec] ont dit explicitement et directement au chef de la santé publique qu’il n’y avait aucune preuve scientifique pour cela », a déclaré Joseph Hickey, directeur exécutif de l’Ontario Civil Liberties Association (OCLA), à Epoch Times.

« Nous ne pouvons pas les fournir parce que nous n’en avons pas. Et dans ce court laps de temps, nous ne pouvons pas essayer de faire une étude ou quoi que ce soit de ce genre. Tout ce que nous avons, c’est l’expérience de l’année dernière (…) Ce n’est pas une bonne idée. Faites autre chose si vous devez faire quelque chose », c’est en ces termes que M. Hickey a paraphrasé le conseil reçu par le gouvernement du Québec.

M. Hickey faisait référence à des documents internes récemment obtenus par Radio‑Canada, montrant que le bureau du Dr Horacio Arruda, alors directeur de la santé publique du Québec, avait sollicité, dans un courriel envoyé au matin du 30 décembre 2021, des preuves scientifiques pour justifier un deuxième couvre‑feu (celui‑ci devait être décrété l’après‑midi même).

L’institut de santé publique de la province répondait alors n’avoir aucune analyse de ce type et ne pas pouvoir en produire dans un délai aussi court. Malgré cela, le Québec a imposé un couvre‑feu de 22 h à 5 h du matin.

Les documents obtenus par Radio‑Canada comprenaient aussi le contenu d’un examen éthique préparé par les responsables de la santé de Montréal au début du mois de décembre 2021. Cet examen éthique montrait que les responsables de la ville s’opposaient au couvre‑feu face à des données scientifiques trop limitées. Ils s’inquiétaient, par ailleurs, des répercussions sur les populations vulnérables. Cette évaluation éthique n’a été rendue public qu’après le tollé des journalistes et de l’opposition dans sa forme non expurgée.

Invité à justifier le couvre‑feu lors d’une conférence de presse le 30 décembre, le premier ministre du Québec, François Legault, invoquait le « gros bon sens ». Moins de deux semaines plus tard, le Dr Arruda posait sa démission, mettant en avant le scepticisme du public sur « la crédibilité de nos opinions et notre rigueur scientifique ».

Samuel Bachand, avocat québécois du Centre de justice pour les libertés constitutionnelles, a déclaré que ces révélations étaient « significatives, mais non surprenantes ».

« Maintenant, nous avons la preuve. C’est la démonstration que le gouvernement du Québec, tout au long de ces deux années, a agi sur la base non pas d’une justification rigoureuse au regard des droits et libertés protégés et constitutionnels, mais simplement sur une base opportuniste », a‑t‑il expliqué lors d’une interview.

« Nous n’avions pas même besoin du courriel pour savoir que c’était basé sur un postulat irrationnel, un postulat inqualifiable, et qui prenait les Québécois pour des enfants et des incompétents. »

D’énormes dommages causés

Douglas Farrow, professeur de théologie et d’éthique à l’Université McGill de Montréal, a déclaré à Epoch Times que la situation appelle une commission royale.

« Pourquoi [le gouvernement québécois] a‑t‑il continué à confiner et à tenir enfermer des citoyens en bonne santé s’il n’avait pas de preuves tangibles que c’était efficace ? Pourquoi a‑t‑il sacrifié tant de choses pour si peu, en blessant tant de gens pour en sauver si peu ? » demande M. Farrow.

« Cette question doit être posée non seulement au Québec, mais dans tout le pays. C’est la question de la responsabilité pour les énormes dommages causés à la santé et au bien‑être de la population, à l’ensemble de l’économie et à la règle de droit. Il doit y avoir une commission royale composée de juges impartiaux pour l’examiner et déterminer les formes requises pour les tenir pour responsables. »

Selon M. Farrow, certains décideurs étaient tétanisés, et agissaient « comme des incompétents effrayés », d’autres « travaillaient à partir de motifs très différents pour des fins très différentes », étant donné leur insistance pour déployer une politique néfaste et sans fondements.

« Nous avons toutes les raisons de croire que certains ont vu là une occasion de faire progresser la psychologie et l’infrastructure nécéssaire pour mettre en place un système d’identification numérique, un système qui changera fondamentalement le tissu même de la vie canadienne. Ce n’est pas un hasard si cette question est devenue un sujet majeur et l’objet d’une législation. Cela aussi devrait faire l’objet d’une enquête judiciaire. »

Mais M. Farrow suppose que la mise en place d’une commission d’enquête ne se fera pas sans combat.

« Ni les incompétents ni les intrigants ne veulent d’une telle enquête, bien sûr. En fait, la frénésie de mensonges et de mesures punitives dirigées contre le Convoi de la liberté nous indique que nos hommes politiques, aux niveaux provincial et fédéral, cherchent désespérément à éviter une telle enquête et la responsabilisation à laquelle elle doit mener. Nous ne devons pas leur permettre d’y échapper. »

Une mesure sévère

M. Hickey affirme que ni la science ni le bon sens n’ont été employés dans la mise en place du couvre‑feu, ce que démontre le mieux un élément « complètement ridicule et injustifiable », l’interdiction de promener son chien.

« Le gouvernement était prêt à appliquer des mesures de guerre draconiennes sans aucune base de preuve ou d’expérience. »

« Cette sordide affaire de couvre‑feu québécois est un exemple qui met en évidence ce que le gouvernement est prêt à le faire. C’est un pur abus de pouvoir, et de nombreuses politiques liées au Covid étaient de cet acabit. »

De son côté, le ministère de la Santé du Québec déclarait antérieurement à Epoch Times que des « études d’observation » prouvaient que les couvre‑feux pouvaient empêcher les rassemblements, ce qui était « utile à un moment où le nombre de cas restait élevé dans la population générale ».

La porte‑parole Marjorie Larouche ajoutait : « Nous sommes d’avis que le couvre‑feu est une mesure sévère qui ne devrait s’appliquer que lorsque d’autres mesures de réduction de la transmission ont été mises en place et ne démontrent pas les effets souhaités, comme ce fut le cas au début du mois de janvier. »

Pour sa part, l’OCLA s’est toujours opposée aux mesures de confinement, les jugeant non scientifiques. En avril 2020, l’avocat Denis Rancourt publiait un rapport de 13 pages selon lequel les gouvernements de tout le Canada avaient suspendu les droits civils dans une « guerre [qui] n’était pas nécessaire et mal conçue », sans « base probante pour soutenir le confinement de la population générale » et alors que « les rapports d’experts scientifiques [disaient] que le confinement causait beaucoup plus de décès associés au Covid‑19. »

  1. Hickey estime que le Québec et d’autres juridictions doivent fournir plus de réponses.

« Les Canadiens ne doivent pas oublier que ces politiques ont été extrêmement graves, très dommageables pour de nombreuses personnes. Ils doivent exiger des comptes, ils doivent exiger des enquêtes, et ils doivent exiger des mécanismes pour s’assurer que ce type de politiques draconiennes ne soient pas de nouveau mise en œuvre à l’avenir sans aucun fondement. »

« Cela a été [une] énorme parodie scientifique, ce qui s’est passé au cours des deux dernières années, et nous devons corriger cela pour aller de l’avant en quelque sorte. »

En sa qualité de membre du Centre de justice, M. Bachand a déposé une requête en révision judiciaire à la Cour supérieure du Québec au nom de l’Église baptiste de Saint‑Augustin et de son pasteur, le révérend Guillaume Roy, face à la décision du gouvernement du Québec de rendre obligatoire le passeport vaccinal dans les lieux de culte. Il place plus d’espoir dans les tribunaux que dans les enquêtes publiques.

« Dans le cadre de ces actions en justice, les fonctionnaires seront interrogés. Ils seront sous serment et ils seront forcés de répondre. »

« Je suis pour les enquêtes publiques, mais c’est plus un geste symbolique ».

Isaac Teo a contribué à cet article.

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