Élever des enfants dans un monde violent

7 juin 2016 14:30 Mis à jour: 19 juillet 2017 17:16

De la télévision, aux jouets de guerre jusqu’à la dernière superproduction d’Hollywood, les enfants sont entraînés de nos jours par une importante quantité d’images violentes. Bien que la majorité de cette violence soit suggérée, plusieurs recherches indiquent qu’elle pourrait profondément influer sur l’esprit des jeunes gens. Plus de 3000 études montrent une forte corrélation entre la consommation de médias violents et un comportement agressif.

On parle de limiter la violence à la télévision depuis les années 1950, mais la brutalité et les bains de sang à l’écran n’ont fait qu’augmenter avec le temps. Selon un rapport de 2003, l’enfant américain moyen aura vu à ses 18 ans 200 000 actes de violence, incluant 40 000 meurtres.

Cela ne se limite pas bien entendu seulement à la télévision. Une étude de la Fondation Henry J. Kaiser démontre que neuf des dix jeux vidéos les plus vendus contiennent de la violence. Près de la moitié de tous les jeux contiennent une forte violence, et 18 % prennent la violence comme thème principal.

Selon Jan Arnow – auteur experte internationalement reconnue sur les effets de la violence et de la résolution de conflit – nous vivons dans une culture où les enfants sont essentiellement entraînés à haïr et à avoir peur.

« Prenez la télévision, les films et les jeux vidéos d’il y a 10 ans, ce n’était pas aussi prononcé que maintenant. Mais notre culture se désensibilise de plus en plus et ils doivent alors frapper plus fort pour regagner notre attention. Cela augmente chaque année, »  déclare-t-elle.

Jan Arnow s’est d’abord intéressé à l’augmentation de la violence dans les médias, il y a plus de 30 ans lorsqu’elle élevait ses propres enfants. Elle s’inquiétait de ce qui pourrait arriver si cette tendance continuait.

Elle a alors voyagé à travers le monde pour s’entretenir avec des jeunes gens vivant dans des régions de guerre et de conflit – la Palestine, Israël, l’Union Soviétique et l’Irlande du Nord – pour voir comment cette situation influençait leur vision du monde. Le trait commun était qu’aucun d’entre eux ne pouvait envisager de futur pour eux-mêmes.

« Vous leur demandiez,  »Que voudrez-vous faire quand vous grandirez ? » et ils vous regardaient comme si vous aviez 12 têtes. »Grandir ? Je ne vais pas grandir. Je serais mort avant ».  J’entends beaucoup cela, » raconte-t-elle.

Les chercheurs ont découvert que notre obsession culturelle avec la violence et le conflit a atteint un point de saturation où les enfants de pays en paix développent cette même perspective désespérée. Dans une étude récente, plus de 60 % s’inquiétaient de se faire tuer, et 19 % souhaitaient parfois être déjà morts.

« C’est exactement ce que nous voyons maintenant, » explique Arnow.

Sous le niveau de la vue
Certaines études suggèrent que plus les enfants sont exposés à des médias violents, plus ils deviennent aptes à penser à la violence comme un moyen socialement acceptable pour régler leurs problèmes. Chaque jour, 2 000 enfants sont attaqués à l’école, et près de 200 000 [ ndt : aux États-Unis ] manquent l’école de peur de se faire attaquer.

Certaines écoles soulèvent le problème de la brutalité qui va en s’accentuant. Comme les lois contre les tirs d’armes à feu, les crimes de haine, les abus domestiques, Arnow pense que ces efforts manque la racine du problème.

« Nous sommes intoxiqués par la violence en direct. C’est ce qui fait vendre le temps de télévision. C’est ce qui fait vendre la publicité. C’est ce qui fait vendre les films et les jeux vidéos – c’est tout cela. Et tant que nous essayons de le nier, nous masquons le sommet de l’iceberg, » dit-elle. « Nous devons remonter aussi loin que possible, à des choses que nous ne pouvons pas voir pour poser les questions au plus bas niveau possible – le niveau culturel. »

Les médias violents se sont graduellement étendus dans la culture occidentale pendant des décennies, les effets peuvent donc être plus difficiles à saisir.

Arnow fut surprise d’être sollicitée pour mener un programme de résolution de conflit dans les écoles cubaines, car elle avait entendu qu’ils n’avaient de problème avec la violence à l’école. Mais les administrateurs lui ont dit que tout cela avait changé avec l’arrivée des jeux vidéos.

« Ils ont expliqué :  »Nous n’avions pas de problème avant que ceux qui sont partis reviennent avec des consoles de jeux vidéo et des jeux violents, » rapporte Arnow.  »Ils ont pu voir une augmentation dans la violence, dans le harcèlement et les conflits non résolus dans leurs écoles. Cela dit tout. » »

L’instruction médiatique
Dans son nouveau livre, « Dans la ligne de mire : Élever des enfants dans un monde violent, » (In the Line of Fire: Raising Kids in a Violent World),  Arnow donne 400 conseils utiles qui peuvent selon elle protéger des effets néfastes.

Une des bases de ces conseils est d’aider les enfants à développer une instruction médiatique. Selon Arnow, les jeunes gens qui acquièrent ces compétences, même s’ils consomment des médias violents, seront moins aptes à être influencés par eux.

Développer ces compétences requiert les conseils et la participation des adultes. Arnow encourage les parents à « trouver la morale dans la folie » en regardant les programmes que leurs enfants regardent, jouant aux jeux vidéos auxquels leurs enfants aiment jouer, pour les amener à avoir une pensée critique sur ce qu’ils voient.

Une méthode qu’Arnow a utilisé sur ses propres enfants s’est montrée très efficace. « Je leur ai donné des cahiers, et leur ai dit :  »Nous allons regarder la télé toute la semaine », ce qu’ils ont bien sûr apprécié. Je leur ai fait noter chaque remarque raciste qu’ils entendaient. J’ai fait faire à un autre enfant la même chose avec la violence. Et ils ont tout écrit dans leurs cahiers en regardant la télévision pendant une semaine, » explique-t-elle. « Ils furent abasourdis de voir combien de choses semblaient normales à des jeunes enfants de 10 ou 12 ans, tout en les influençant directement. À partir de ce moment, ils furent plus prudents en écoutant ou en regardant quoi que ce soit. »

Arnow ne croit pas qu’il soit nécessaire de faire ces exercices tout le temps, mais une fois de temps en temps ils peuvent avoir un fort impact. « Essayez de nouvelles choses pour leur faire comprendre. Être instruit aux médias les aidera pendant toute leur vie. »

À propos de « Dans la ligne de mire »
Le livre d’Arnow est organisé en listes de sujets, avec des citations et d’autres courts passages qui parlent aux lecteurs occasionnels préférant le digérer petit à petit. Il offre également des liens vers des sites internet et d’autres ressources pour ceux voulant creuser plus à fond un sujet particulier.

Les chapitres couvrent un vaste panel de sujets comme les crimes de haine, la psychologie, le marketing des jouets de guerre et le harcèlement virtuel. Bien que le livre soit basé sur des études scientifiques, beaucoup s’opposent aux cibles d’Arnow, comme l’obsession pour les armes aux États-Unis. Le chapitre « Les armes nous définissent » consacre plusieurs pages à confronter des croyances populaires comme le mantra des possesseurs d’armes « Les armes ne tuent pas les gens, les gens tuent les gens » et l’idée qu’avoir des gardes armés dans les écoles sécurisera les enfants.

« Bien qu’il n’y ait pas de liens établis entre la présence de gardes armés et des écoles plus sûres, près d’un tiers de nos écoles ont déjà des gardes armés dans leurs locaux et la demande pour le maintien de l’ordre à l’école en a fait le secteur se développant le plus rapidement dans le domaine de la sécurité, » indique le livre.

« Dans la ligne de mire » est un livre avec un programme ambitieux et sa promotion de la non-violence est quelque chose dont nous pouvons tous nous inspirer. « Les enfants élevés aujourd’hui seront nos dirigeants de demain. S’ils croient que la violence est une stratégie appropriée pour gérer un conflit, alors c’est une perspective effrayante. »

Version originale : Raising Kids in a Violent World

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