En Syrie, le séisme met sous pression ONG et pays occidentaux

Par Epoch Times avec AFP
7 février 2023 10:20 Mis à jour: 7 février 2023 17:21

Le séisme de lundi en Turquie et en Syrie démultiplie le défi posé aux organisations humanitaires et aux pays occidentaux pour venir en aide à la population syrienne, en particulier dans la zone rebelle d’Idleb, dans le nord-ouest du pays.

Dès lundi, la communauté internationale s’est mobilisée pour la Turquie, acheminant sans délai l’aide d’urgence. Des pays comme la France, l’Allemagne ou les États-Unis ont également promis de secourir les victimes syriennes sans pour autant déclencher immédiatement les secours.

« La Syrie reste une zone d’ombre d’un point de vue légal et diplomatique », observe Marc Schakal responsable du programme Syrie de Médecins sans Frontières, exhortant à envoyer de l’aide « au plus vite ». 

Il redoute que les ONG locales et internationales ne soient dépassées dans un pays ravagé par douze années de guerre civile, mettant aux prises rebelles, dont certains instrumentés par des puissances étrangères, jihadistes, forces kurdes, et l’armée du gouvernement de Bachar al-Assad, soutenu par l’Iran, la Russie, et mis au ban des nations.

L’aide est d’autant plus cruciale que « la situation de la population était déjà dramatique », renchérit le professeur Raphaël Pitti, un responsable de l’ONG française Mehad, particulièrement inquiet pour la province d’Idleb.

Un unique point de passage

L’un des problèmes majeurs est l’accès à ce dernier grand bastion tenu par les rebelles et les jihadistes, qui compte 4,8 millions de personnes, dit-il.

La quasi de la totalité de l’aide humanitaire y est acheminée depuis la Turquie par Bab al-Hawa, l’unique point de passage, obtenue par résolution des Nations Unies.

Acheminer de l’aide depuis le territoire syrien contrôlé par Damas serait épineux diplomatiquement. Cela supposerait aussi que le régime officiel veuille bien la donner aux populations de la zone rebelle et que les belligérants s’accordent sur sa distribution.

Le passage de Bab al-Hawa, contesté par Damas et Moscou qui dénoncent une violation de la souveraineté syrienne, reste provisoire et a été réduit comme peau de chagrin au fil du temps. Sous la pression de la Russie et de la Chine, le nombre de points de passage est en effet passé de quatre à un.

Des habitants, aidés par des équipements lourds, à la recherche de victimes et de survivants à l’Idlib, tenue par les rebelles, à la frontière avec la Turquie. (Photo : OMAR HAJ KADOUR/AFP via Getty Images)

Bab al-Hawa pourrait ainsi être rapidement congestionné par l’afflux de matériels nécessaires pour aider la population.

Pourtant, les experts doutent de la possibilité que les anciens points de passage puissent être rouverts.

Le régime de Damas, sous le coup de sanctions internationales depuis le début de la guerre en Syrie en 2011, a pressé la communauté internationale de lui venir en aide alors que le bilan ne cesse de s’alourdir : plus de 1440 morts. Et plus de 3380 en Turquie, selon des données provisoires.

L’aide aux personnes en détresse « par tous les moyens possibles »

L’ambassadeur syrien aux Nations unies a assuré lundi à l’ONU que cette aide irait « à tous les Syriens sur tout le territoire ». Il a néanmoins posé comme condition que cette aide passe depuis l’intérieur du pays sous contrôle du régime.

« Les accès à partir de la Syrie existent, ils peuvent se coordonner avec le gouvernement et nous serons prêts à le faire », a fait valoir Fayçal Moqdad, rejetant en creux la possibilité d’acheminer de l’aide par des points transfrontaliers.

À Paris, comme à Berlin, les autorités bottent en touche.

« Il s’agit de venir en aide à des personnes en détresse après ce tremblement de terre et cette aide doit bien sûr atteindre les gens par tous les moyens possibles », souligne ainsi une source gouvernementale allemande tout en précisant que l’Allemagne utilisera les « canaux habituels » des ONG.

Un risque de distribution inégale de l’aide internationale

La France pourrait, elle, s’avérer moins présente « que dans d’autres crises » dans la mesure où elle est « gênée aux entournures » d’aller dans un pays dont elle ne reconnait pas la légitimité, estime Emmanuel Dupuy, président de l’Institut Prospective et Sécurité.

Raphaël Pitti estime que les zones, sous l’autorité de Damas, recevront très probablement l’aide internationale. « Comme cela a toujours été fait depuis dix ans ».

Mais le professeur redoute que la population d’Idleb notamment, « qui compte 2,8 millions de réfugiés », soit laissée pour compte, d’autant que les autorités turques ont elles-mêmes fort à faire avec leurs propres zones dévastées.

Un retour possible de la Syrie au sein de la ligue arabe

L’aide la plus immédiate devrait provenir des Émirats arabes unis qui ont promis lundi une aide de quelque 13,6 millions de dollars pour la Syrie.

C’est un signal d’une « sorte de normalisation au niveau de la ligue arabe », commente Emmanuel Dupuy. « Ce qui était une évidence, le retour de la Syrie au sein de la ligue arabe dont elle avait été exclue en 2011, est une réalité à travers l’aide humanitaire », dit-il.

En novembre, les dirigeants arabes réunis en sommet à Alger avaient souligné la nécessité « d’un rôle arabe collectif et capital dans les efforts visant à mettre fin » à la guerre civile en Syrie.

Selon Emmanuel Dupuy, la Syrie pourrait, elle, faire valoir « un retour en grâce du fait qu’elle est victime » de ce séisme.

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