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Les inégalités de patrimoine

Les inégalités de patrimoine dans le monde : un fossé qui ne cesse de se creuser

Les disparités de richesse à l'échelle planétaire ont franchi un nouveau cap depuis les années 1990. Un rapport du Laboratoire sur les inégalités mondiales, institut rattaché à l'École d'économie de Paris, révèle mardi une concentration alarmante des richesses au profit d'une infime minorité.

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Des yachts amarrés au port Hercules lors de la 32e édition du Salon nautique international de Monaco, le 27 septembre 2023.

Photo: VALERY HACHE/AFP via Getty Images

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Durée de lecture: 4 Min.

Cette étude menée par les économistes Thomas Piketty, Lucas Chancel, Ricardo Gómez-Carrera et Rowaida Moshrif, compilant les recherches de plus de 200 chercheurs, met en lumière un phénomène qui relève avant tout d’un « choix politique ».

Une élite ultra-minoritaire accapare les richesses

Les chiffres donnent le vertige. À l’heure actuelle, les 10% les plus fortunés de la planète – soit 556 millions d’adultes – s’approprient 53% des revenus mondiaux et contrôlent 75% du patrimoine total. À l’opposé, la moitié la plus démunie de l’humanité, représentant approximativement 2,8 milliards d’adultes, doit se contenter de 8% des revenus et d’à peine 2% du patrimoine.
Le rapport souligne que « les inégalités extrêmes de patrimoine augmentent rapidement ». Plus frappant encore, les 0,001% les plus riches – une élite de 56.000 multi-millionnaires « pouvant tenir dans un stade de football » – détiennent désormais plus de 6% des richesses mondiales, contre environ 4% en 1995.

Une progression deux fois plus rapide pour les ultra-riches

L’accélération est spectaculaire. « Depuis les années 1990, le patrimoine des milliardaires et des centi-millionnaires a augmenté d’environ 8% par an, soit près du double du taux de croissance enregistré par la moitié la plus pauvre de la population », précise le document.
Depuis 1980, l’évolution des revenus traduit cette fracture grandissante : les 50% les plus pauvres ont vu leurs revenus progresser de 1,8% annuellement, tandis que ceux des 10% les plus riches bondissaient de 1,2 à 3%. Paradoxalement, les classes moyennes – les 40% situés entre ces deux extrêmes – ont enregistré la croissance la plus faible (+1%).

Le capital triomphe sur le travail

Cette dynamique s’explique notamment par un basculement majeur dans la répartition des richesses. La part des revenus du travail a dégringolé de 61% en 1980 à 53% en 2025. Parallèlement, les revenus du capital ont bondi à 47%, contre 39% auparavant, signalant une transformation profonde de l’économie mondiale au détriment des salariés.

Une fiscalité inversée qui aggrave les inégalités

Le rapport pointe une aberration fiscale : les plus aisés paient proportionnellement moins d’impôts que les ménages aux revenus modestes. Les auteurs plaident pour un impôt minimum sur la fortune, similaire à la taxe Zucman récemment rejetée par le Parlement français, déclenchant un débat animé sur l’équité fiscale.
« Même des taux modestes d’impôt minimum mondial sur les milliardaires et les centi-millionnaires pourraient rapporter entre 0,45% et 1,11% du PIB mondial », calculent les chercheurs. Concrètement, avec un taux oscillant entre 2% et 5% sur les patrimoines dépassant 100 millions de dollars, cela générerait entre 503 et 1.256 milliards de dollars.

Un choix politique, pas une fatalité

« Les inégalités sont un choix politique », martèle le rapport. « Lorsque la redistribution est forte, que la fiscalité est équitable et que les investissements sociaux sont prioritaires, les inégalités se réduisent », conclut-il, renvoyant la responsabilité aux décideurs politiques.
L’étude révèle également des disparités « extrêmes et persistantes » en matière d’impact climatique : les 10% les plus riches génèrent 77% des émissions mondiales de carbone « liées à la propriété privée du capital », contre seulement 3% pour les 50% les plus pauvres.
Enfin, les inégalités de genre demeurent criantes : les femmes ne gagnent que 61% du salaire horaire masculin – chiffre tombant à 32% lorsqu’on intègre le travail domestique non rémunéré.
Avec AFP