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Pour les femmes en Iran, occasions nouvelles et vieux obstacles

février 4, 2019 10:49, Last Updated: septembre 5, 2019 21:38
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Saba avait juste 25 ans quand elle a abandonné un poste de styliste à New York pour travailler sur un projet de rénovation d’une galerie d’art à Téhéran, sa ville natale. En quelque mois, elle gagne trois autres contrats de restauration immobilière.

« Je rêvais de monter ma propre entreprise, mais je n’aurais jamais cru que cela irait aussi vite. Si j’étais restée à New York, je n’aurais pas eu cette chance », raconte Saba, aujourd’hui âgée de 27 ans. La situation des femmes en Iran a beaucoup changé depuis dix ans, dit-elle à l’AFP. « Maintenant, on fait confiance à des femmes à des postes de direction. Certes, c’est encore difficile, en particulier sur un chantier, mais c’est difficile partout, à New York aussi ».

Quarante ans après la victoire de la révolution de 1979 et l’avènement de la République islamique, la question du statut de la femme en Iran est un bon révélateur des paradoxes de la société iranienne.

La loi confère aux femmes un statut légal inférieur aux hommes. Dans de nombreux cas, les femmes doivent obtenir l’autorisation d’un père ou d’un frère pour sortir du pays. Au tribunal, leur parole vaut la moitié de celle d’un homme et, pour un héritage, une femme obtiendra deux fois moins que son frère. Et la loi impose le port du voile dans l’espace public.

Mais la République islamique a aussi œuvré énormément pour l’instruction des femmes, facteur d’émancipation. Les universités iraniennes comptent aujourd’hui plus d’étudiantes que d’étudiants, et l’accès des femmes à l’enseignement supérieur, leur offre de nouvelles perspectives. « Pour les filles comme nous qui ne voulaient pas finir comme nos mères dans une société traditionnelle, l’université était la voie à suivre », dit Mina, étudiante en linguistique à l’Université de Téhéran.

Elle raconte avoir caché à son père qu’elle préparait l’examen d’entrée à la faculté. « Quand j’ai été reçue, il n’a pas pu accepter que j’aille vivre dans une autre ville. Il a cessé de me parler pendant un temps ». Pour Sara, une étudiante en archéologie de 26 ans, être une femme en Iran, c’est encore « croire que vous devez avoir des enfants, que vous devez être pudique ».

« La possibilité d’être indépendante ou perçue comme une personne dotée d’un caractère propre, ce sont des choses que vous pouvez à peine imaginer », dit-elle.

« Les archéologues hommes préfèrent ne pas travailler avec des femmes, même si celles-ci sont compétentes. Ils disent que cela n’apporte que des ennuis », et « dès qu’une femme réussit, on lui met un maximum de bâtons dans les roues », ajoute l’étudiante. « Toutes les femmes ne sont pas capables de batailler ferme contre cela ».

Pour les autorités, la loi imposant le port du voile est conçue pour protéger les femmes. En 2018, l’ayatollah Ali Khamenei, guide suprême de la République islamique, opposait ainsi la chasteté de la femme musulmane à la « nudité » caractéristique, selon lui, de la femme occidentale, « symbole de consommation » et « objet d’excitation sexuelle pour les hommes ». 

Il reste que les normes vestimentaires ont considérablement changé. Il est commun aujourd’hui de croiser à Téhéran des femmes vêtues d’un jean moulant et portant lâchement un voile coloré. Et on voit désormais rarement la police des mœurs patrouiller dans les rues, forcer des femmes à remonter leur voile ou faire irruption dans des cafés pour séparer les couples non mariés.

Mais la ligne rouge reste la remise en question publique de l’obligation de porter le voile: début 2018, quelques dizaines de femmes ont été arrêtées pour avoir défié cette règle, et Nasrine Sotoudeh, célèbre avocate des droits humains a été emprisonnée après en avoir défendu certaines.  Mais en matière de mœurs, « la situation n’a rien à voir », avec ce qu’elle était dans les années ayant suivi la révolution, selon une journaliste à Téhéran.

« On ne pouvait même pas monter dans une voiture avec un ami », se souvient-elle, « on était terrifié à l’idée d’être arrêté » par une patrouille. Réélu en 2017 sur programme promettant une amélioration des droits civiques, le président Hassan Rohani, qui fait figure de modéré, a été largement critiqué pour n’avoir nommé aucune femme ministre.

« Il y a un plafond de verre, et cela perdure », estime la journaliste Férechté Sadéghi. « Une fois au pouvoir, il semble que Rohani n’ait pas voulu se brouiller avec les ayatollahs, et il a fait machine arrière. Les femmes obtiennent leurs droits peu à peu, mais pour l’instant, il n’y a pas de mouvement féministe » en Iran.

D.C avec AFP

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