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Suspension de MaPrimeRénov’ : la filière de la rénovation énergétique exprime sa « stupéfaction »

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Photo: Shutterstock

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Durée de lecture: 5 Min.

Une vingtaine de fédérations de la filière de la rénovation énergétique expriment jeudi leur « stupéfaction » et leurs « inquiétudes » après la suspension du dispositif d’aides publiques MaPrimeRénov’, et le secteur du bâtiment envisage des manifestations.
Dans un communiqué commun, la filière estime que la réunion prévue vendredi au ministère de l’Économie pour discuter du marché de la rénovation énergétique n’a « plus lieu d’être car sans objet désormais » et demande à être reçue par le Premier ministre, François Bayrou.
Le dispositif d’aides à la rénovation énergétique MaPrimeRénov’ va bien être suspendu cet été, a confirmé mercredi le ministre de l’Économie Éric Lombard, qui veut cependant le rétablir « avant la fin de l’année ». Sur MaPrimeRénov’, « il y a à la fois un encombrement en ce moment et un excès des fraudes (…) sur lequel nous voulons reprendre la main, d’où la suspension », a-t-il déclaré lors des questions au gouvernement au Sénat.
« Mais naturellement, une fois que cela sera réglé, le processus pourra continuer », a ajouté M. Lombard, en précisant ultérieurement, devant la commission des Affaires économiques du Sénat, que le gouvernement avait « bien l’intention de rétablir le fonctionnement avant la fin de l’année ».
Une suspension portant préjudice aux filières de la rénovation
Olivier Salleron, président de la Fédération française du bâtiment (FFB), juge la décision du gouvernement de fermer le guichet de dépôts de demande d’aides MaPrimeRénov’ « injustifiable, inqualifiable », risquant de  mettre « sur le carreau 100.000 salariés du secteur ».
« Sans stabilité du dispositif, a fortiori sans sa pérennisation, et sans sa simplification, ce sont des milliers d’entreprises d’installateurs, d’artisans du bâtiment, de distributeurs et d’emplois industriels qui sont directement fragilisés », dénoncent les 19 organisations professionnelles, représentant des fédérations de professionnels du chauffage, de l’énergie, de l’électricité et du génie climatique.
La FFB compte profiter de son congrès national le 13 juin pour « décider des mesures à prendre », indique Olivier Salleron à l’AFP. « Ça va gronder », ajoute-t-il, manifestation, blocage, montage de grues dans des « lieux stratégiques » étant envisagés.
Même volonté de protester du côté du syndicat des artisans du bâtiment, la Capeb qui s’organise pour définir « un mouvement » afin de « réagir fortement et dire notre mécontentement », selon son président Jean-Christophe Repon, interrogé par Franceinfo.
La rénovation énergétique représente 30% de l’activité des adhérents de la FFB et 600.000 salariés, selon Olivier Salleron.
« Les TPE, PME, artisans, tout le monde est vent debout. Avec en plus la crise grave et historique du logement neuf, trop c’est trop, on ne va pas se laisser crever sans rien dire », gronde-t-il.
La suspension concerne uniquement les nouveaux dossiers. « Les dossiers non frauduleux déposés avant la fermeture seront instruits et payés dans les meilleurs délais, et une démarche d’accélération de l’instruction sera mise en place », a précisé le ministère chargé du Logement.
Les ménages veulent rénover, les artisans sont prêts
« Les ménages veulent rénover performant. Les artisans sont prêts. Mais l’État, par ces annonces, n’est pas à la hauteur des enjeux sociaux, énergétiques et écologiques », critique Vincent Legrand, président de Dorémi, société spécialisée dans la rénovation énergétique des maisons.
« Les particuliers font leur budget et leurs travaux en fonction de MaPrimeRénov’, si demain ils n’y ont plus droit, ils vont rester dans leur passoire » énergétique, s’inquiète Christophe Perrier, à la tête d’une entreprise de maîtrise d’œuvre spécialisée en rénovation, extension et neuf, Elaborplan. « Les gens n’ont pas les moyens de dépenser des millions ».
Cette pause du dispositif est motivée par « un encombrement (de nouvelles demandes, NDLR) en ce moment et un excès des fraudes », selon Éric Lombard, ministre de l’Économie qui évaluent à « 16.000 » le nombre de « dossiers suspicieux », soit « 12% du stock ».
Jean-Christophe Repon voit comme une « bonne chose » que le gouvernement s’attaque au « fléau » de la fraude, « à condition que pour une fois il écoute les artisans du bâtiment pour créer les conditions d’un marché de la rénovation énergétique vertueux ».
« Ce qui ne pose pas problème, c’est la rénovation par geste », qui désigne la réalisation d’un seul type de travaux de rénovation thermique, « il faut la continuer, elle fait travailler les artisans », réclame Olivier Salleron.
Pierre-Marie Perrin, directeur des affaires publiques du groupe Hellio, entreprise de rénovation énergétique dit comprendre « la volonté du gouvernement d’assainir le dispositif des fraudes massives dont il est victime », mais regrette « la confusion provoquée » par les récentes annonces, « au détriment des acteurs qui la font vivre, avec pour premières victimes les ménages modestes ».