Ukraine: le comédien Zelensky plus proche que jamais du pouvoir

21 avril 2019 12:52 Mis à jour: 21 avril 2019 13:02

Comédien novice en politique, Volodymyr Zelensky part grand favori du second tour de la présidentielle en Ukraine dimanche, annonçant sauf coup de théâtre un saut dans l’inconnu pour ce pays en guerre aux portes de l’Union européenne.

Cinq ans après la révolution pro-occidentale du Maïdan, les Ukrainiens semblent déterminés à renverser de nouveau la table en préférant un acteur et humoriste de 41 ans au sortant Petro Porochenko. A 53 ans, ce dernier paye son incapacité à mettre fin au conflit dans l’est ainsi que les scandales à répétition éclaboussant la classe politique et les difficultés économiques de l’un des pays les plus pauvres d’Europe.

« Nous avons uni l’Ukraine », a déclaré Volodymyr Zelensky après avoir voté à Kiev. Prédisant « la victoire de l’Ukraine », le comédien, en T-shirt blanc sous une veste sombre, a dit passer une bonne journée: « mes enfants, des œufs, du café… et pour nous mettre de bonne humeur, ma femme a mis Eminem », le rappeur américain.

Son adversaire a, lui, appelé au « bon sens »: « parce que ce n’est pas drôle. Certes, au début, cela peut être un peu drôle et amusant. Mais pour que cela ne devienne pas douloureux ensuite ». De premiers sondages sortie des urnes sont attendus dès la clôture du scrutin à 17H00 GMT avant que de premiers résultats partiels ne soient publiés dans la nuit.

Inimaginable il y a encore quelques semaines, une victoire de Volodymyr Zelensky, nouveau soubresaut de la vague mondiale anti-élites, est considérée comme acquise par bien des observateurs à Kiev. Largement en tête du premier tour avec un score double de celui de son rival, M. Zelensky était crédité de plus de 70% des intentions de voix dans les derniers sondages avant le second tour.

Les enjeux sont considérables pour cette ex-république soviétique confrontée à une crise inédite depuis son indépendance en 1991, mais aussi pour les relations à couteaux tirés entre la Russie et les Occidentaux. L’arrivée au pouvoir de pro-occidentaux en 2014 a été suivie de l’annexion par Moscou de la péninsule ukrainienne de Crimée et d’une guerre dans l’est qui a fait près de 13.000 morts en cinq ans dans l’est.

Cette crise a largement contribué aux graves tensions actuelles entre la Russie et les Occidentaux, qui ont décrété des sanctions réciproques. Si elle se confirme, l’élection d’un nouveau président inexpérimenté sera suivie de très près par les chancelleries. Vendredi, le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo a appelé les deux candidats et a « réitéré l’engagement (des Etats-Unis) à travailler avec celui que le peuple ukrainien choisira, quel qu’il soit ».

La semaine dernière, les candidats avaient été reçus à Paris par le président français Emmanuel Macron. Dans un bureau de vote de Lviv, dans l’ouest, Volodymyr, 55 ans, a voté pour le comédien parce qu’il « veut du changement: « tout le monde en a marre que Porochenko vole et mente ». « Il faut donner une chance à la jeunesse », estime Natalia, 81 ans, dans un bureau de vote installé dans une clinique de Kiev. « On veut du nouveau. On a vu ce qu’a fait Porochenko, on est fatigués ».

« Les gens sont devenus fous », soupire Viktoria, 39 ans, venue voter pour le président sortant. « Les gens votent pour un personnage de fiction. Mais le cinéma et la réalité, ce sont des choses différentes. »

Rares sont ceux qui ont pris au sérieux Volodymyr Zelensky lorsqu’il a annoncé sa candidature le 31 décembre. Ont suivi quatre mois de campagne hors normes menée essentiellement sur les réseaux sociaux, où il s’est posé en « mec simple » voulant « casser le système » à l’image du professeur d’histoire sympa élu président qu’il incarne dans une série télévisée.

Au-delà de sa promesse de maintenir le cap pro-occidental pris en 2014, la politique que mènerait M. Zelensky reste très floue même s’il a tenté entre les deux tours de renforcer sa crédibilité, s’entourant de conseillers plus expérimentés et s’exprimant enfin dans la presse. Si Petro Porochenko est crédité par ses supporteurs d’avoir rapproché l’Ukraine des Occidentaux, redressé l’armée et évité une faillite de son pays, l’un des plus pauvres d’Europe, aucun haut responsable n’a été condamné pour corruption et le processus de paix semble dans l’impasse.

Pour mettre au jour l’inexpérience de son rival, le chef de l’Etat sortant comptait sur le débat de l’entre-deux tours. Tenu vendredi, après des négociations rocambolesques, dans un stade de Kiev, le face-à-face n’a pas changé la donne, donnant lieu à un échange d’invectives plus qu’à une discussion sur le fond.

D.C avec AFP

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