SCIENCES

Des scientifiques israéliens créent des embryons humains artificiels sans sperme ni ovules

septembre 9, 2023 6:13, Last Updated: septembre 9, 2023 6:13
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Des chercheurs de l’Institut des sciences Weizmann en Israël ont créé des « modèles d’embryons » humains complets sans utiliser de sperme ou d’ovules, cultivés en dehors de l’utérus pendant 14 jours.

Les modèles d’embryons, également connus sous le nom d’embryons synthétiques, ne sont pas véritablement équivalents à des embryons humains, mais ils présentent des similitudes avec les premiers stades de développement de l’être humain. Les chercheurs ont réussi à créer des « modèles d’embryons » à partir de cellules de peau prélevées sur un adulte.

Ces cellules ont été soumises à une série de tests biologiques et chimiques qui les ont transformées en cellules souches. Celles-ci se sont ensuite développées en dehors de l’utérus jusqu’à ce qu’elles atteignent le stade de l’embryon humain, à 14 jours.

Les embryons synthétiques contenaient « toutes les structures et compartiments caractéristiques de ce stade, y compris le placenta, le sac vitellin, le sac chorionique et d’autres tissus externes qui garantissent la croissance dynamique et adéquate des modèles », selon un article publié le 6 septembre par l’institut.

La recherche est cruciale car on sait très peu de choses sur les premiers stades de l’embryon, en raison de leur difficulté à être étudiés.

« Le grand acte se produit au cours du premier mois, les huit autres mois de la grossesse étant principalement consacrés à la croissance », explique le professeur Jacob Hanna.

« Mais ce qui se passe au cours du premier mois reste en grande partie un mystère. Le modèle d’embryon humain que nous avons développé à partir de cellules souches offre un moyen éthique et accessible de pénétrer ce mystère. Il reproduit fidèlement le développement d’un véritable embryon humain, en particulier la finesse remarquable de son architecture ».

M. Hanna souligne que plusieurs échecs de grossesse ont lieu au cours des premières semaines. La plupart du temps, les femmes concernées ne savent même pas qu’elles sont enceintes.

C’est au cours de ces premières semaines que se développent de nombreuses malformations congénitales, dont certaines ne sont découvertes que bien plus tard.

« Nos modèles peuvent être utilisés pour révéler les signaux biochimiques et mécaniques qui garantissent un développement correct à ce stade précoce, et les façons dont ce développement peut mal se dérouler », explique-t-il.

Les modèles d’embryons humains de Weizmann peuvent éclairer les causes de plusieurs malformations congénitales et types d’infertilité, et conduire au développement de technologies permettant de cultiver des organes et des tissus destinés à être transplantés, selon l’institut.

Il ouvre également la voie à des recherches qui seraient impossibles sur des embryons naturels. Par exemple, les modèles d’embryons peuvent être utilisés pour déterminer les effets de l’exposition à des médicaments ou à d’autres substances sur le développement du fœtus.

Questions légales et morales

Les modèles d’embryons ont grandi hors de l’utérus pendant huit jours, atteignant un stade de développement équivalent à 14 jours de développement embryonnaire humain naturel après fécondation. C’est à ce stade que les embryons naturels acquièrent les structures internes nécessaires qui leur permettent d’évoluer vers des organes corporels.

Quatorze jours est également la date limite légale pour la recherche embryonnaire dans de nombreux pays. Les travaux de l’Institut Weizmann soulèvent également la question de savoir s’il est possible de reproduire le développement de l’embryon après la limite des 14 jours.

Jacob Hanna, spécialiste en génétique moléculaire à l’Institut Weizmann des sciences d’Israël, injecte une solution utilisée pour la dissociation des cellules et des tissus dans un plateau dans un laboratoire de la ville centrale israélienne de Rehovot, le 4 août 2022. (Ahmad Gharabli/AFP via Getty Images)

Une telle démarche n’est pas forcément illégale dans certains pays, car les modèles d’embryons sont juridiquement distincts des embryons naturels. Plus ces modèles sont proches du processus naturel, plus les recherches posent des dilemmes éthiques.

« Plus les modèles d’embryons humains dérivés de cellules souches sont proches des embryons humains, plus il est important de disposer de réglementations et de lignes directrices claires quant à leur utilisation », a déclaré à la BBC le professeur James Briscoe, de l’Institut Francis Crick.

Il a insisté sur la nécessité de procéder « avec prudence, soin et transparence » dans ce domaine afin d’éviter tout « effet dissuasif » auprès du public.

La question se pose également de savoir si les embryons humains synthétiques doivent bénéficier du même statut et des mêmes droits, y compris des mêmes protections, que les embryons naturels.

Certains affirment que la normalisation de la création d’embryons synthétiques à des fins de recherche peut finir par banaliser la vie humaine en la considérant comme une marchandise ou une ressource. La manipulation de ces embryons synthétiques soulève également des questions sur la dignité humaine et le respect de la vie.

Cette technologie soulève des questions sur la génétique et les applications potentielles du clonage, qui sont déjà des questions moralement compliquées.

Bien que des tentatives de fabrication de modèles d’embryons humains aient eu lieu dans le passé, elles n’ont jamais pu être considérées comme « véritablement exactes », car il leur manquait des types de cellules essentielles, comme celles qui finissent par former le placenta, selon l’article de l’Institut Weizmann.

En outre, ces modèles n’avaient pas « l’organisation structurelle » d’un embryon normal et ne présentaient pas la « capacité dynamique » d’évoluer vers le stade de développement suivant.

Les modèles d’embryons humains mis au point par l’équipe de recherche de l’Institut Weizmann présentent une « complexité authentique ».

Le professeur Alfonso Martinez Arias, de l’université Pompeu Fabra (Espagne), a déclaré à la BBC que la recherche « a permis, pour la première fois, de construire fidèlement la structure complète [d’un embryon humain] à partir de cellules souches » en laboratoire.

En tant que telle, cette découverte ouvre la voie « à l’étude des processus qui conduisent à la formation du plan du corps humain », a-t-il ajouté.

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