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Joao Gilberto, le père de la « Fille d’Ipanema », est mort

juillet 6, 2019 21:44, Last Updated: juillet 12, 2019 8:39
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La légende brésilienne de la bossa nova Joao Gilberto, dont la voix douce susurrant « The girl from Ipanema » continue de bercer les cœurs près de 60 ans après son enregistrement, est décédé samedi à 88 ans.

« Mon père est décédé. Son combat était noble, il a tenté de conserver sa dignité alors qu’il perdait son autonomie », a annoncé son fils Joao Marcelo sur Facebook.

Les causes de la mort de cette icône, qui vivait ruinée et solitaire à Rio, n’ont pas été précisées.

Guitariste et chanteur intimiste de l’âme brésilienne, Joao Gilberto s’est produit sur les plus grandes scènes du monde. Parmi ses nombreux morceaux d’anthologie, figurent Desafinado, Garota de Ipanema, Chega de saudade, Rosa Morena, Corcovado, Aquarela do Brasil.

« Joao a changé la musique du monde pour toujours. Il a enseigné la délicatesse au Brésil, il a apporté la modernité. C’est une perte irréparable », a réagi la chanteuse brésilienne Gal Costa à l’annonce du décès, selon un communiqué.

« Son importance pour la musique est incalculable. Il fut la principale voix du mouvement musical brésilien le plus connu dans le monde et a été révolutionnaire presque sans l’avoir voulu », avait expliqué il y a quelques mois à l’AFP Bernardo Araujo, critique musical du journal O Globo.

« Il fut le premier chanteur, du moins au Brésil, à montrer qu’on n’avait pas besoin d’une voix puissante, il chuchotait, en s’accompagnant avec virtuosité à la guitare », soulignait-il.

Né le 10 juin 1931 à Juazeiro, dans l’État lointain de Bahia (nord-est), Joao Gilberto Prado Pereira de Oliveira reçoit sa première guitare à 14 ans. Quatre ans plus tard, « Joaozinho » quitte son village natal pour Rio.

Dans un appartement de Copacabana, la nouvelle vague, « bossa nova » en argot carioca – poètes, musiciens – se réunit chez Nara Leao, une petite chanteuse de 14 ans. Il y a là Vinicius de Moraes, Newton Mendonça, Carlos Jobim et un jeune homme timide, Joao Gilberto. Les deux premiers composent, le troisième écrit et le dernier chante de sa voix timide.

C’est un chuchotement, un souffle, « la dernière étape avant le silence », disent les critiques. Seul sur son tabouret, avec sa guitare, il invente « la batida », un rythme sensuel et impose le « canto falado », le chant parlé. Le 10 juillet 1958, il enregistre « Chega de saudade » et « desafinado », manifestes de cette nouvelle vague.

Du haut de son génie, Joao Gilberto n’avait jamais été facile à vivre. Son perfectionnisme qui tournait à l’obsession névrotique, son côté excentrique et sa phobie sociale – il vivait reclus depuis des années, souvent en pyjama – étaient légendaires.

Et depuis des années, le chanteur aux épaisses lunettes était pris dans un conflit entre deux de ses trois enfants, son fils Joao Marcelo et sa fille Bebel Gilberto – également musiciens – et sa dernière épouse dont il était séparé à la fin de sa vie, Claudia Faissol, une journaliste 40 ans plus jeune que lui et mère de sa fille adolescente.

Bebel et Joao Marcelo accusent Claudia Faissol d’avoir abusé de la faiblesse de leur père et d’avoir provoqué sa ruine en lui faisant signer des contrats sans la pleine possession de ses capacités cognitives.

Signe de ces tensions, dans son message sur Facebook, Joao Marcelo a écrit samedi : « Je remercie ma famille (mon côté de la famille) d’avoir été là pour lui ». 

Fin 2017, sa fille Bebel a obtenu sa mise sous tutelle, alors qu’il n’était plus en mesure de s’occuper de sa santé et de ses finances en raison de sa fragilité physique et mentale.

« Je voudrais que mon père ait une fin de vie heureuse et tranquille », avait déclaré Joao Marcelo, qu’il a eu avec sa première épouse, la chanteuse Astrud Gilberto, à la revue Veja.

Bebel, elle, est née de son union en deuxièmes noces avec la chanteuse Miucha, sœur du célèbre musicien, chanteur et écrivain Chico Buarque.

Beaucoup de Brésiliens ont vu Joao Gilberto pour la dernière fois sur une vidéo en 2015, où il apparaissait, très amaigri et en pyjama, chantant « The girl from Ipanema » à sa plus jeune fille en s’accompagnant à la guitare.

« La tristesse est sans fin », dit l’une de ses chansons.

Avec AFP

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