ARTS & CULTURE

La Double Inconstance

novembre 25, 2015 10:54, Last Updated: novembre 25, 2015 10:54
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Un grand miroir-écran, un canapé et une table basse sans oublier le balcon et quelques fenêtres – le spectateur assiste à la représentation qui se veut la répétition de la représentation de La Double Inconstance de Marivaux. Compliqué ? Pas plus que le complot contre les amours fidèles que nous a préparé l’auteur. Car si l’on reprend les propos de Marivaux, « l’acteur, c’est celui qui fait semblant de faire semblant ». Et selon Anne Kessler qui orchestre la mise en scène, c’est le théâtre par définition, qui est un complot, pour le bonheur du spectateur bien évidemment. Rien n’est plus adapté que le faux-semblant du foyer de la Comédie-Française reconstitué par Jacques Gabel, le laboratoire de la création.

Au fur et à mesure de la progression des répétitions, les costumes aussi évoluent. D’abord des vêtements simples et ordinaires ceux que l’on pouvait supposer être ceux des acteurs, puis quelques accessoires rajoutés, des habits de plus en plus beaux, somptueux au jour de la représentation.

Le décalage du décor et des tenues permet à la pièce de Marivaux de traverser les siècles et de nous montrer que l’âme humaine est toujours la même. En milieu rural ou à la cour, pauvres ou riches, au XVIIIe ou au XXIe siècle. L’amour est précaire, les sentiments inconstants, la faiblesse humaine se révèle dans des penchants insignifiants et vulgaires, que ce soit un verre de vin ou un mot vexant, l’esprit le plus ferme et le plus fidèle trébuche là où il ne s’y attendait pas.

Le décalage du décor et des tenues permet à la pièce de Marivaux de traverser les siècles et de nous montrer que l’âme humaine est toujours la même.

La Double Inconstance est la pièce la plus machiavélique de Marivaux, l’auteur y fait une expérience sur les sentiments humains. Il fait réagir ses personnages aux intrigues qu’il leur crée, faisant s’enchevêtrer et rebondir les situations. Il les manipule y compris le prince, qui à son tour manipule son entourage.

Un magnifique texte interprété avec charme

Anne Kessler anime la mise en scène par l’insertion des différentes musiques et chansons qui accompagnent les changements d’humeur des personnages et accentuent comme un clin d’œil l’universalité et l’intemporalité de la pièce.

À celles-ci s’ajoutent les passages des comédiens dans le couloir projeté sur l’écran avant d’entrer sur scène, la scène des amoureux à la Fred Astaire et Ginger Rogers, les aveux d’amour sur la terrasse à la Walt Disney, les bruits de voitures sous le pont ou la scène hilarante du bain.

Toutes ces scènes jubilatoires sont cousues au magnifique texte de Marivaux, les mots coulants comme de l’eau douce ou tumultueuse, passionnés ou apaisés, interprétés délicieusement par la troupe de la Comédie-Française : Loïc Corbery – le prince, Adeline d’Hermy – Sylvia, Stéphane Varupenne – Arlequin, Catherine Salviat – un seigneur, Éric Génovèse – Trivelin, Florence Viala – Flaminia, Georgia Scalliet – Lisette, ainsi que les élèves-comédiens de la Comédie-Française : Claire Boust, Ewen Crovella, Charlotte Fermand, Thomas Guené, Solenn Louër, Valentin Rolland.

 

Silvia et Arlequin se portent un amour pur et réciproque, mais le prince a jeté son dévolu sur la jeune villageoise. Il la fait enlever, la garde en son palais, et livre les amants à Flaminia pour qu’elle mette en œuvre la machination de la double inconstance. Pas à pas, les amoureux sont pris au piège d’une mise en scène habilement menée sans jamais s’apercevoir qu’ils en sont les victimes, ou les marionnettes. Silvia se laisse séduire par un officier qui se révélera être le prince tandis qu’Arlequin tombe sous le charme des paroles de Flaminia. Un couple défait en donne deux. L’amour qu’on pensait éternel cède le pas au temps du plaisir éphémère. Le monde rural, rustique, pauvre et impuissant ne résiste pas à la corruption de la cour, de la coquetterie, de la richesse et des honneurs. L’inconstance du monde, son instabilité, contamine celui qui croit être fidèle à ses émotions et pense n’être que le spectateur de ce déséquilibre sans y participer.

 

INFOS PRATIQUES

Comédie-Française

Salle Richelieu Place Colette Paris 1er

Jusqu’au 1er mars 2016. Location 01 44 58 15 15

 

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