ANALYSE – Longtemps considérée comme peu réceptive aux recettes libérales, la droite française semble redécouvrir avec intérêt la doctrine libérale d’Adam Smith et de Milton Friedman. Des Républicains à l’Union des droites pour la République d’Éric Ciotti en passant par l’aile bardelliste du RN, un certain tabou s’est brisé. Les solutions libérales ne font plus peur et sont de plus en plus portées par les responsables politiques.
La droite serait-elle en train de muter idéologiquement ? Il est peut-être encore trop tôt pour le dire et seuls les actes au pouvoir pourront le confirmer. Cela étant, depuis quelques années, on peut observer à droite un regain d’intérêt à la fois pour le libéralisme en tant qu’idée politique, mais aussi les solutions rattachées à cette doctrine, surtout celles touchant aux sujets économiques.
Chez LR, le renouveau libéral
Au sein du parti hérité du RPR et de l’UMP, ce virage libéral semble s’inscrire dans un processus qui dure depuis plusieurs années. Dans un premier temps, le maire de Cannes et président de l’Association des maires de France (AMF), David Lisnard, a largement contribué à ce renouveau libéral à droite. L’édile de 56 ans a publié, en novembre 2020, une tribune dans Le Figaro dans lequel il dénonce la « folie bureaucratique française » et l’État « obèse ». Un article qui propulsera sa notoriété et fera de lui un poids lourd du parti de Jacques Chirac et de Nicolas Sarkozy.
Autre fait marquant, le président de l’AMF est ouvertement libéral et n’hésite pas à rappeler régulièrement que seule une droite qui assume son libéralisme peut revenir aux affaires. Son dernier ouvrage publié il y a deux mois Ainsi va la France est d’ailleurs un « manifeste libéral » dans lequel il décrit une France en proie à des « idéologies moralisatrices, pudibondes » et entend « remettre l’État à sa place ».
Ayant gagné en influence au sein de LR ces quatre dernières années, il annonçait en février avoir « conclu un accord » avec Bruno Retailleau dans le cadre de la course à la présidence des Républicains. Un accord dans lequel David Lisnard entendait faire peser certains points auxquels il est attaché comme la « déréglementation » ou la « performance publique ».
Ensuite, la victoire de Bruno Retailleau à la tête de LR le 18 mai a confirmé ce virage libéral. Bien qu’étant davantage connu pour ses positions conservatrices que libérales, le ministre de l’Intérieur est un proche de François Fillon et ses déclarations ne font pas de doutes sur sa vision du rôle de l’État et des libertés individuelles.
Dans une interview au Figaro datant de mars 2024, il a appelé à « […] tailler dans le maquis des 1200 agences et organismes publics, qui représentent 20 % de la masse salariale de l’État ».
« Il y a aujourd’hui au sein de notre parti une nouvelle lecture de ce qu’est le libéralisme. Nous ne le voyons plus comme un épouvantail pouvant faire fuir les électeurs, mais, au contraire comme un moyen de convaincre et d’apporter des solutions concrètes », a fait savoir à Epoch Times une source proche des Républicains.
La « tronçonneuse » de l’UDR
Mais à droite, il n’y a pas que chez les Républicains que le libéralisme reprend des couleurs. L’Union des droites pour la République (UDR) d’Éric Ciotti a multiplié les initiatives et les événements prônant des solutions résolument libérales aux maux dont souffrent la France. Ainsi, était lancé en janvier l’acte I du « Grand forum des libertés » consacré à la réduction du périmètre de l’État. Puis, en avril et mai, les actes II et III sur les thèmes de la fiscalité et de la retraite par capitalisation.
Pour le parti présidé par le député des Alpes-Maritimes, il s’agit, avec ces conférences, de « briser les tabous du politiquement correct comme de l’économiquement correct ». À l’UDR, cette appétence pour le libéralisme est d’autant plus frappante qu’elle est accompagnée par une sémantique bien particulière qui rompt avec la retenue historique de la droite. Éric Ciotti appelait il y a peu à la mise en œuvre d’un « big bang fiscal ». L’élu a par ailleurs repris à son compte des éléments caractéristiques du très libéral président argentin, Javier Milei à l’instar de son « afuera » (« dehors » en Français) et la tronçonneuse, symbolisant tous deux la volonté de « couper » dans les dépenses publiques.
Du côté du parti allié de l’UDR, le Rassemblement national, il n’y a pas d’adhésion à proprement parler aux idées libérales. Marine Le Pen, hier en tant que présidente du parti à la flamme, aujourd’hui comme cheffe des députés RN, a toujours défendu une ligne plus « sociale ». Mais, l’actuel et jeune président du parti, Jordan Bardella, ne semble pas partager les mêmes vues que sa mentor sur les sujets liés à la place que doit occuper l’État et pourrait incarner une aile plus libérale du RN.
Quand Marine Le Pen qualifie la réduction du nombre de fonctionnaires de « truc de droite », le député européen de 29 ans voit la chose différemment. Lors d’un entretien avec Darius Rochebin en mars, il appelait par exemple à « arrêter de dépenser dans tout et n’importe quoi » et défendait la création d’un ministère de l’Efficacité gouvernementale directement inspiré de l’organisme dirigé outre-Atlantique pendant plusieurs mois par Elon Musk.
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