CHINE

Derrière le trafic d’enfants en Chine se cache l’industrie du prélèvements forcés d’organes, alerte un activiste

février 14, 2022 20:27, Last Updated: février 14, 2022 20:27
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Récemment, les images d’une mère de huit enfants souffrant de troubles mentaux et enchaînée dans la hutte d’un village ont généré l’indignation sur les médias sociaux chinois.

La controverse a suscité un débat intense sur la traite des épouses dans ce pays où les hommes sont plus nombreux que les femmes en raison de la politique de l’enfant unique instaurée par le Parti communiste chinois (PCC) durant des décennies.

L’incident met en évidence les problèmes plus vastes liés à la traite des êtres humains en Chine, une industrie qui implique des enlèvements d’enfants et le prélèvement forcé d’organes, selon les militants chinois des droits de l’homme.

Le dissident chinois Yao Cheng autrefois bénévole pour l’ONG Women’s Rights in China (WRIC) basée à New York, a vécu et travaillé en Chine de 2007 à 2016. Dans une interview accordée à l’édition en langue chinoise d’Epoch Times, il relate des incidents de trafic d’enfants et les soupçons de trafic d’organes qui leur sont associés.

Les filles du couvent

Depuis que le régime a adopté la politique de l’enfant unique en 1979, de nombreuses petites filles ont été tuées dès leur naissance, tandis que certains parents ont essayé de donner leurs fillettes à des couvents bouddhistes afin qu’elles aient une chance de survie.

Dans son documentaire Girls in the Nunnery [Les filles du couvent, ndt.], M. Yao raconte comment il a œuvré à sauver de nombreuses fillettes qui ont finalement grandi dans un couvent, comment il en a aidées d’autres à retrouver leurs familles biologiques.

Photo non datée de Yao Cheng. (Shi Ping/Epoch Times)

Ses efforts lui ont valu 22 mois d’emprisonnement en 2013.

L’enquête de M. Yao a dévoilé que des jeunes filles par millier ont été adoptées dans des dizaines de couvents bouddhistes à Tongcheng, une ville de l’Anhui, dans l’est de la Chine.

« Bébés, elles étaient laissées dans une boîte en papier ou un panier rembourré avec une couverture », explique le militant. « Les plus chanceuses étaient élevées par les religieuses, mais celles‑ci ne pouvaient en élever que deux ou trois. La plupart des autres mouraient de froid ou étaient tuées par des chiens sauvages. Bien sûr, si une famille était prête à adopter un bébé de sexe féminin, les nonnes le leur donnaient. »

Des profits colossaux

Les bébés chinois, hommes et femmes, sont trop souvent victimes d’enlèvement, de kidnapping ou de trafic, selon M. Yao.

Selon lui, la police chinoise est douée pour attraper les ennemis de l’État, mais pas les trafiquants, car de nombreux policiers sont impliqués dans ces opérations. C’est un secteur aux diverses ramifications générant des profits colossaux.

M. Yao fait valoir que, selon les statistiques compilées par les organisations non gouvernementales chinoises, dont la WRIC, environ 70 000 enfants sont enlevés chaque année. Ce chiffre n’inclut pas les enfants abandonnés.

Ceux qui disparaissaient sont achetés. Dans le cas des filles, bien souvent, elles seront formées pour devenir des épouses et mariées sans aucun droit de choisir ou des prostituées. Dans les deux cas, hommes ou femmes, ils peuvent devenir des donneurs d’organes.

M. Yao se souvient avoir vu à Santow, une ville de la côte est de la province du Guangdong, des lits pour les garçons et les filles qui avaient été envoyés en Asie du Sud‑Est pour le prélèvement d’organes. Yao dit avoir réuni toutes les preuves nécessaires pour engager des poursuites, mais la police a refusé de mener une enquête ou de prendre des mesures pour réprimer ces crimes.

Il pense que l’absence de réaction est liée au caractère lucratif de cette industrie. « Les organes d’un enfant se vendent à plus d’un million de yuans (138 300 €). »

La demande d’organes à l’étranger est énorme, dit‑il. Il a identifié les courtiers en organes d’enfants à Santow, sans pouvoir prendre d’autres mesures : « Si vous essayez de faire quoi que ce soit, votre vie sera en danger. »

Wang Huaixue tient un bébé dans ses bras à l’orphelinat Wang Jiayu le 9 juillet 2006 dans la province de l’Anhui. Des millions d’orphelins déclarés ou clandestins sont les victimes du système social chinois. (China Photos/Getty Images)

Dans la région de Putian, à Fujian, une province côtière du sud, des messages Internet ont montré plus d’une douzaine de corps d’enfants auxquels il manquait des organes et des yeux. M. Yao déclare : « Ce n’est pas quelque chose que n’importe qui peut faire avec un couteau de cuisine ordinaire. Ce sont des professionnels, la transplantation est une opération délicate. »

Selon lui une partie considérable de ses opérations sont cautionnées par les autorités supérieures du pays. En effet, certains hauts fonctionnaires et sommités du Parti ont eux‑mêmes recours à des greffes d’organe.

Pourquoi nombre de ces cadres supérieurs du Parti, fragilisés par tant de guerres et d’épreuves dans un pays difficile, peuvent‑ils vivre jusqu’à 90 ou 100 ans ? « Regardez Jiang Zemin [ancien secrétaire général du Parti], il a bientôt 100 ans. Il y a également une réelle demande d’organes sur le marché chinois », explique M. Yao.

La Chine est le premier pays au monde à pratiquer des transplantations d’organe, mais M. Yao s’interroge sur la provenance des organes dans un pays qui ne dispose pas d’un programme d’approvisionnement en organes transparent et légal.

Une promesse non tenue

En 2010, la WRIC a commencé à distribuer une aide mensuelle de 300 yuans (env. 40 €) par écolier, et de 500 yuans (env. 70 €) par lycéen ou étudiant grâce au soutien de la Fondation Clinton qui disposait d’un budget de 200 millions de dollars.

Mais le régime communiste est intervenu.

La WRIC a été informée que le régime lui‑même fournirait à chaque enfant dans le besoin 600 yuans par mois (env. 80 €).

« Voilà à quel point le régime est laid. Il n’entreprend rien de bien et interdit aux autres de faire ce qu’il faut », de peur de perdre la face devant une organisation étrangère, déclare M. Yao.

Cependant, après plus d’un an, pas un centime n’a été alloué par le régime, poursuit‑il. Un directeur du ministère des Affaires civiles a expliqué à M. Yao que le gouvernement débattait de « la manière de distribuer les fonds ».

En définitive, déplore M. Yao, ce sont les enfants qui souffrent.

« Ces enfants peuvent‑ils rester sans manger pendant un an ou deux ? »

En dernier ressort, des fonds ont été alloués, mais par intermittence. Par ailleurs, si des fonds ont été débloqués spécifiquement pour les enfants, la plupart ont été détournés par des fonctionnaires corrompus, rappelle M. Yao.

Le dissident déclare que son travail bénévole a toujours effrayé le régime. En raison de son engagement caritatif pour la WRIC, le PCC a tôt fait de le cataloguer et relayer au rang d’ennemi du régime. Par ailleurs, de nombreuses femmes bénévoles ont dû quitter la fondation en raison des menaces lancées par les responsables de la sécurité publique du régime.

« La logique du Parti est simple : seul le Parti lui‑même est bon. Si quelqu’un d’autre est bon, cela signifie que le Parti est mauvais. Par conséquent, aucune bonne personne n’est autorisée à rester sur le territoire du Parti communiste chinois », explique‑t‑il.

M. Yao prend pour exemple la persécution des pratiquants de Falun Gong en Chine aujourd’hui.

Le Falun Gong, également connu sous le nom de Falun Dafa, est une pratique spirituelle comportant des exercices de méditation et un ensemble d’enseignements moraux centrés sur les principes de vérité, de compassion et de tolérance. Le PCC a commencé la campagne de persécution contre le Falun Gong en 1999.

« Pourquoi le PCC persécute le Falun Gong ? Parce que des millions de pratiquants chinois de Falun Gong sont des gens bien. Cela effraie le PCC », conclut M. Yao.

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