MéDECINE CHINOISE TRADITIONNELLE

Une technique ancienne pour dissiper la douleur

août 14, 2016 16:59, Last Updated: août 15, 2016 11:32
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Un des principaux objectifs de la médecine chinoise est d’empêcher la stagnation. Si l’eau ne peut s’écouler d’un tuyau, il vous faut démêler le pli. L’acupuncture vise ainsi à libérer le qi (prononcer t’chi) bloqué dans les organes internes. Une technique appelée gua sha est utilisée pour défaire les « nœuds » plus proches de la surface.

Le gua sha est utilisé depuis au moins 2 000 ans et constitue sans doute la méthode de médecine chinoise populaire la plus simple à apprendre. Vous n’avez pas à connaître la localisation des points d’acupuncture ou des méridiens. Avec un peu d’enseignement, n’importe qui peut la pratiquer et elle n’en reste pas moins terriblement efficace. La douleur et la circulation peuvent être améliorées en une seule séance.

« Gua sha » signifie « sable frottant » en chinois. La méthode produit un effet similaire à celui d’un frottement au fusain. Dans ce cas, le papier est votre peau et le fusain est le bord d’un objet arrondi et rugueux (généralement d’une cuillère à soupe en porcelaine). Appliquer des coups fermes crée des marques qui révèlent où se trouve la stagnation dans les muscles.

Les marques laissées par le gua sha sont d’une couleur allant d’un léger rouge à un violet foncé et peuvent être confondues avec des blessures ou des signes de maltraitance. Mais selon Kathleen Greenough, acupunctrice diplômée et enseignante de gua sha au Pacific College of Oriental Medicine à New York, le gua sha bien appliqué n’est pas douloureux et n’abîme pas les tissus.

« On dirait qu’on est en train de faire un bleu, ou que nous sommes en train d’endommager les capillaires et de créer une blessure. Mais ce que nous faisons est en fait d’extravaser le sang du lit capillaire », explique t-elle.

Le gua sha peut aider à briser la congestion d’une stagnation du sang résultant d’une blessure ou d’acides lactiques et d’autres toxines qui s’accumulent dans les muscles en raison d’une sollicitation trop intensive. Alors que ces agents pathogènes sortent des tissus, ils sont libérés dans la circulation sanguine et peuvent ainsi sortir du corps.

Kathleen Greenough explique le procédé à ses étudiants et à ses patients en le comparant à celui du nettoyage profond d’une maison où la poussière se trouvait auparavant sous le tapis.

« Tout semble aller bien à la surface, mais le problème est toujours là. Nous utilisons donc cette méthode pour libérer la congestion et la stagnation, pour relancer la circulation et pour aider le corps à se soigner lui-même » a-t-elle expliqué.

Le Baume du Tigre est une pommade souvent utilisée pour pratiquer le gua sha. Le couvercle du pot sert également d’outil pour frotter. (Steffen Buus Kristensen/CC BY-SA 3.0)

Outil et technique

La lubrification est un plus pour le gua sha. Frotter un bord émoussé sur un muscle sec peut être douloureux et empirer la tension musculaire. Pour lubrifier la surface de la peau, nombreux sont ceux à utiliser le Baume du Tigre – une pommade facile à trouver et dont le couvercle peut servir d’outil pour frotter. Les pommades du gua sha contiennent généralement des herbes et des huiles essentielles avec des propriétés facilitant le relâchement musculaire, mais tous les baumes, pommades ou huiles de massage feront l’affaire. On peut tout aussi bien utiliser de l’huile d’olive.

Contrairement au massage, le gua sha nécessite un outil – quelque chose avec une face ronde qui peut être utilisé facilement pour frotter le corps. Les outils vont de pierres et d’os, spécifiquement taillés pour cet usage, à de grosses pièces de monnaie. L’outil préféré de Kathleen est en corne de bœuf, nettoyé et désinfecté avant chaque utilisation. De façon à avoir quelque chose d’encore plus hygiénique, la tendance actuelle se tourne vers un bouchon à usage unique.

Le gua sha est principalement utilisé sur le dos, sur la nuque et les épaules, mais d’autres parties du corps peuvent également être inclues.

« Les avants-bras sont une bonne partie du corps sur laquelle faire du gua sha car les gens peuvent présenter le syndrome du canal carpien, ou un surmenage pour avoir trop tapé sur le clavier et la souris », a dit Kathleen. « Nous pouvons contribuer à réduire l’inflammation, la congestion et prévenir le syndrome du canal carpien. S’ils présentent déjà ce syndrome, nous pouvons les aider en soulageant la douleur et l’inflammation pour permettre la guérison. »

Le gua sha est très efficace par lui-même, mais il peut aussi être utilisé en complément d’un traitement d’acupuncture. Les deux techniques aident à libérer la stagnation, mais là où le gua sha s’occupe du grand déblayage, l’acupuncture est encore plus efficace.

« En fonction de ce que je juge le mieux pour mon patient, j’utiliserais peut-être un traitement au gua sha pour commencer et dégagerais tous les vaisseaux bloqués pour permettre de relancer la circulation. Pour le traitement suivant j’utiliserais l’acupuncture, en sachant qu’elle fonctionnera comme les méridiens et la zone sont maintenant libérés. »

Inflammation chronique

En plus de traiter la douleur musculaire, le gua sha peut aider pour d’autres tissus – comme les migraines, les coups de froid, la grippe, la fièvre, la bronchite et la toux. Travailler dans le dos à l’arrière des poumons peut libérer les stagnations de glaires.

En Chine, la méthode est utilisée pour traiter les inflammations chroniques telle que l’hépatite. Selon le Dr. Arya Nielsen, auteur de manuels de gua sha pour les écoles américaines de médecine orientale, la recherche montre que la technique est prometteuse pour soigner un foie irrité.

Dans son article « The science of gua sha », le docteur Nielsen explique que des essais plus larges sont nécessaires pour établir une fréquence et un dosage du traitement par le gua sha. Toutefois, elle pense que « si la recherche peut accomplir cela, le gua sha aura un rôle essentiel dans le traitement de l’hépatite chronique. On pourrait dire que s’il s’agissait d’un médicament, arriver à un tel effet serait considéré comme une percée médicale. »

Arya Nielsen prend des précautions avec la terminologie. « Je ne qualifie jamais le gua sha de frottement car cela porte à confusion. Nous ne frottons pas, mais appuyons par à-coups. Même les chinois changent cela et l’appellent le  »gua sha appuyé par à-coups » pour entraîner volontairement un changement du terme clinique. »

Après le soin

Une démonstration de gua sha en Thaïlande utilisant un grattoir en os. (Psisa/iStock Editorial/Thinkstock)

Le gua sha n’a pas d’effet secondaire et la recherche montre que ses effets anti-inflammatoires et immuno-stimulants persistent plusieurs jours après une seule séance. Ne prévoyez cependant pas une sortie en ville avec une robe dos nu juste après le traitement.

Alors que les toxines bloquées sont relâchées dans la circulation sanguine, le corps a besoin de repos. Après un traitement par le gua sha, Kathleen Greenough conseille à ses patients de se détendre, de boire plus d’eau, de s’abstenir d’alcool pour au moins 24 heures et de protéger du froid la zone traitée.

« Cela peut être un peu épuisant car nous enlevons quelque chose qui a été caché sous le tapis et le corps doit maintenant le traiter. Il vaut donc mieux laisser le corps utiliser son énergie pour s’occuper de tout ce qui a été amené à la surface et s’en débarrasser. »

Version originale : Ancient Technique Scrapes Away Pain

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