Alors que ce pays d’Amérique latine s’effondre, la Chine regarde d’un œil inquiet

Par John Mac Ghlionn
25 décembre 2022 18:15 Mis à jour: 25 décembre 2022 18:15

À première vue, le Pérou et la Chine, distants de 11.000 km, semblent avoir très peu en commun. Pourtant, les deux pays partagent une histoire commune.

Comme l’a noté l’universitaire Justina Hwang, en l’espace de 25 ans, entre 1849 et 1874, plus de 100.000 travailleurs non qualifiés, dont beaucoup venaient de Chine, sont arrivés au Pérou. Le Pérou, qui venait d’abolir l’esclavage, souffrait d’une pénurie de travailleurs. Cette situation a permis « l’importation d’une main‑d’œuvre chinoise sous contrat pour répondre au besoin de main‑d’œuvre péruvienne », a écrit Justina Hwang.

En 2022, le Pérou compte environ 60.000 Chinois. Certains chercheurs estiment que la communauté chinoise est beaucoup plus importante, dépassant peut‑être le million. Si c’est exact, une personne sur 33 est d’origine chinoise. En plus de partager des liens historiques et démographiques forts, la Chine et le Pérou entretiennent également des liens économiques très étroits. Cependant, à mesure que le Pérou s’enfonce dans la crise, sa relation avec la Chine est mise à l’épreuve.

Le 14 décembre, ce pays d’Amérique du Sud a annoncé l’instauration de l’état d’urgence à l’échelle nationale. Cette annonce, qui accordait des pouvoirs spéciaux aux policiers et empêchait en grande partie les gens de se rassembler dans les rues, faisait suite à une semaine de manifestations violentes qui, comme le rapporte Reuters, ont fait au moins huit morts.

Les manifestations ont eu lieu peu de temps après la destitution de l’ancien président, Pedro Castillo, qui a été arrêté après avoir tenté illégalement de dissoudre le congrès. Alors que les tensions continuent de s’exacerber, le monde entier suit la situation de près. Le Parti communiste chinois (PCC) est sans doute particulièrement préoccupé par ce qui s’y passe.

Partisans de Pedro Castillo sur la Plaza de Armas à Cusco, le 20 décembre 2022. (Martin Bernetti/AFP via Getty Images)

En juillet 2021, au cours de sa première semaine de mandat, Pedro Castillo n’a pas perdu de temps pour tendre la main à la Chine, un partenaire commercial capital pour le Pérou. Abritant certaines des plus grandes mines de cuivre du monde, le Pérou exporte de grandes quantités de ce minerai vers la Chine qui est probablement le premier au monde. En fait, la Chine est aujourd’hui le plus gros acheteur de cuivre péruvien, et de loin. Le PCC ne se contente pas d’acheter des quantités démesurées de cuivre au Pérou, il y envoie également des mineurs pour extraire le précieux métal. Il en est ainsi depuis des années.

Un certain nombre de consortiums soutenus par la Chine possèdent désormais des mines de cuivre péruviennes. Il est inquiétant de constater qu’aidés par un régime péruvien complaisant, ils semblent avoir bénéficié de l’utilisation de pratiques d’exploitation. Au cours des 18 derniers mois, la Chine a incontestablement tiré profit de la présidence de Pedro Castillo. Le dirigeant chinois Xi Jinping et Pedro Castillo ont manifestement des sentiments positifs l’un envers l’autre. Après avoir prêté serment, Pedro Castillo a choisi Pékin comme première ambassade à visiter. Il a été accueilli à bras ouverts par Xi Jinping.

Dix‑huit mois plus tard, cependant, cette amitié est mise à l’épreuve. Pedro Castillo n’est plus au pouvoir. Un nouveau shérif est arrivé en ville. Il s’agit de Dina Boluarte, la première femme présidente du Pérou. La sexagénaire a annoncé que sa première tâche serait « d’agir contre la corruption. Ce cancer doit être éradiqué du pays ».

Si le PCC ne se sent pas concerné par la promesse de Dina Boularte, il devrait l’être.

Après tout, les bûcherons soutenus par le PCC jouent un rôle clé dans le marché illégal du bois péruvien. En échange de paiements secrets, comme Mark Wilson d’InSight Crime l’a expliqué en détail, les autorités péruviennes ont accordé aux entreprises forestières chinoises des concessions d’exploitation et des permis de transport généreux. Un des bénéficiaires de ces pots‑de‑vin se nomme Xiadong Ji Wu, un Chinois propriétaire d’au moins cinq sociétés d’exploitation forestière établies au Pérou. Comme l’a noté M. Wilson, certaines « sociétés chinoises malhonnêtes » semblent « corrompre directement des fonctionnaires péruviens pour faciliter le commerce illégal du bois ».

Membre de la fameuse Initiative Ceinture et Route (ICR) depuis 2019, le Pérou a été témoin d’une série d’investissements chinois de plusieurs milliards de dollars, principalement dans les secteurs minier et énergétique. Dans le seul secteur minier du Pérou, on estime que les entreprises chinoises ont investi au moins 10,4 milliards de dollars.

La Chine est aussi très impliquée dans d’autres aspects de la société péruvienne. Un récent article publié par Freedom House souligne comment Pékin contrôle les médias péruviens, en influençant fortement les sujets qui sont ou ne sont pas couverts et les narratifs qui sont ou ne sont pas autorisés. En outre, l’ambassade de Chine, installée à Lima, la capitale du Pérou, est accusée d’agir de manière « agressive » et d’intimider les citoyens péruviens qui osent parler de Taïwan avec respect.

Dina Boularte dispose‑t‑elle de ce qu’il faut pour s’attaquer aux nombreuses formes d’infiltration utilisées par le PCC dans son pays d’origine ? En vérité, seul le temps nous le dira. Il est clair que la Chine communiste a largement bénéficié de la faiblesse des dirigeants péruviens.

Les opinions exprimées dans cet article sont celles de l’auteur et ne reflètent pas nécessairement celles d’Epoch Times.

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