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Mille et un usages des palmiers

Écrit par Fréderique Privat, La Grande Epoque
30.07.2010
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  • Palmiers communs de Guyane(攝影: / 大紀元)

Si les palmiers sont souvent synonymes de vacances et de farniente, il en va tout autrement pour ceux qui vivent à leur ombre toute l’année. Chaque année, lors des festivités de Pâques, puis de la Pentecôte, les palmiers de Guyane sont mis à l’honneur, car cette période est la saison de fructification de quelque 70 espèces de palmiers présents dans le département français d’Amérique du Sud.

Du palmier comestible...

Lors de ces fêtes, la Guyane toute entière se délecte alors de ce fumet si spécial : le bouillon d’awara. Cette préparation culinaire typique de la Guyane française met à l’honneur le fruit du palmier awara qui sera pilé, puis mitonné pendant des jours avec des légumes, de la viande, des poissons et des crevettes de Guyane pour obtenir le célèbre bouillon d’awara qui fait la fierté de nombreux cuisiniers guyanais, amateurs ou professionnels. Mais le palmier, c’est beaucoup plus que cela. Il représente, avec le manioc, la base de la nourriture des peuples dits «de la forêt» : Amérindiens et Bushinengé (descendants d’esclaves africains venus peupler la vallée du fleuve Maroni). Les fruits du wassaï, du comou et autres patawa, très riches en vitamines et en lipides, sont transformés en une pâte légère qui est consommée régulièrement avec le couac (farine de manioc).

... aux meubles et accessoires...

Les feuilles, notamment celles du palmier-bâche, très résistantes, serviront à la fabrication de balais, de cordes, d’articles de vannerie (paniers) dont la longévité étonne toujours. Le bois, tel celui du patawa, sera utilisé en ébénisterie ou pour confectionner des objets décoratifs ou encore pour la cuisine.

Elsie Andrews fabrique et vend les produits du palmier-bâche. Elle vit et travaille à Saint-Laurent du Maroni, en Guyane française.

«Les feuilles de palmiers sont récupérées dans la forêt amazonienne, puis transformées en fil après un long et minutieux processus en six étapes. Il faut, dans un premier temps, couper la feuille centrale de la dernière pousse du palmier. Ensuite, on sépare les brins de cette feuille en formation. Puis, il faut décoller le vernis fibreux de chacun de ces brins. Par la suite, ce vernis est bouilli. Les fils sont séchés et tissés avec une grosse aiguille après avoir procédé aux colorations souhaitées», explique-t-elle.

  • Elsie Andrews(攝影: / 大紀元)

À partir de ces fils, Elsie Andrews crée des objets de couleurs, de formes et de tailles très variées : boîtes à bijoux, sacs, pots à crayons, corbeilles à fruits, mais aussi hamacs, chapeaux… Des réalisations qui ont le mérite d’allier l’utile à l’agréable tout en restant intactes longtemps!

L'artiste expose ses créations originales dans de nombreux salons en Guyane, aux Antilles et au marché artisanal de Saint-Laurent du Maroni.

...jusqu’aux vertus médicinales

Didier Béreau, maître de conférence en chimie à l’Université des Antilles et de la Guyane, est un spécialiste des huiles de palmiers. Selon lui, les «palmiers sont emblématiques de l’Amazonie». Ainsi sa passion et sa volonté de se rapprocher de son pays d’origine l’ont conduit vers la chimie des plantes. «Il y a des usages traditionnels intéressants. Je me suis dit qu’il serait bien de valider ce savoir-faire traditionnel et de mettre en place un projet de valorisation de ces huiles au niveau alimentaire, cosmétique et pharmaceutique», explique-t-il.

En effet, ces usages traditionnels, transmis de famille en famille, semblent fort intéressants. La pulpe de l’awara présente ainsi des vertus anti-inflammatoires reconnues, elle est utilisée contre les problèmes dentaires. On confectionne aussi une huile faite avec l’amande de l’awara, appelée «tcho-tcho», qui soigne les rhumatismes, les crises de vers intestinaux, les furoncles, etc. De plus, ce même awara est plus riche en carotène que la carotte.

Mais c’est tout particulièrement le wassaï, plus connu sous le nom de «açaï» qui, selon Didier Bereau, peut être comparé aux fruits rouges, «car très riche en antioxydants. Il est en train de conquérir le marché des industries pharmaceutiques et alimentaires : parti du Brésil, on en trouve maintenant aux États-Unis, en Europe, au Japon… En gastronomie fine, il est vendu dans un emballage intéressant sous forme de jus, dont le prix varie entre 30 et 45 euro le litre; également sous forme de sorbet, qu’une marque très connue propose maintenant; ou encore sous forme de barres énergétiques au açaï et de jus d’açaï lyophilisé».

Le wassaï est très riche en anthocyane, une molécule présente aussi dans le vin. Cette molécule est utilisée dans la lutte contre les maladies dégénératives telles que le Parkinson et l’Alzheimer.

Didier Bereau met en avant les propriétés particulières de ce produit qui permettent de «prévenir le vieillissement de la peau grâce aux molécules anti-oxydantes». On le retrouve donc dans les crèmes pour la peau ainsi que dans des gélules de beauté. Mais il existe aussi une profusion de compléments alimentaires, gélules et autres jus qui vantent les propriétés de ce fruit tout droit venu de l’Amazonie !

Il n’y a pas que le wassaï qui soit digne d’intérêt. « D’autres types de palmiers, ont aussi des propriétés intéressantes en acides mono-insaturés, en  oméga-3, etc. Ceci en ferait des huiles très intéressantes… », explique Didier Bereau.

Une source de revenu ou un désastre ?

Pour autant, il ne faut pas oublier de souligner le paradoxe établi par le waçaï, considéré comme un produit de luxe apportant beauté et longévité, alors qu’en Guyane française, le petit sachet de jus de waçaï consommé avec du kwak constitue encore « le plat du pauvre  » pour nombre de petits Guyanais dont les parents ont peu de moyens.

L’utilisation industrielle du waçaï au Brésil s’accompagne malheureusement de profondes mutations dont les conséquences peuvent déjà se faire sentir.

Pour exemple, cette observation faite auprès de ceux qui connaissent le mieux le waçaï, les Amérindiens. Avec un tel enjeu commercial, les Amérindiens préfèrent aller cueillir ce waçaï pour le vendre au lieu de s’en servir pour se nourrir.

Sans parler de la disparition des palmiers, abattus  pour cueillir les fruits, participant, de cette façon, à la déforestation dont on connaît les dégâts en Amazonie. Pour y remédier, des plantations de waçaï sont alors mises en place par le processus d’agroforesterie.

Ainsi, dans des provinces du nord du Brésil tel le Parà, la destruction de l’écosystème amazonien associé à la précarité des habitants ont conduit à la recherche de solutions alternatives, tant environnementales que sociales. C’est ainsi que le principe d’agroforesterie s’est mis en place. Utiliser une partie de la forêt avec des plantations d’arbres cultivés dans un objectif commercial, telle est la dimension de ce type d’exploitation.

En Guyane française, Didier Béreau nous parle de l’association Mama Bobi « qui a le projet en agroforesterie, en partenariat avec des Amérindiens et des Bushinengés, de planter et de mettre en champ le waçaï, entre 1.000 et 2.000 pieds de waçaï… »

Il nous apprend aussi qu’« au Suriname, le waçaï qui est produit, part directement en Hollande. Il n’y a pas encore de structures de transformation. A la différence du Brésil qui est plus avancé dans la transformation industrielle, les autres pays sont encore aux prémisses de l’industrialisation… ».

Les palmiers sur toute la terre

Précisons que les palmiers, largement utilisés et présents sur le plateau des Guyanes (Guyane française, Suriname, Guyana, nord du Brésil), ont aussi leurs représentants dans les autres pays d’Amérique du Sud avec des spécificités pour certaines régions. Si en Guyane française, c’est l’awara  qui est très prisé, au Pérou par exemple, on retrouvera le parépou, dont les fruits peuvent être préparés sous forme de condiment ou d’apéritif.

Face à une telle variété de palmiers en Amérique du Sud, il était intéressant de savoir si les biotopes des sols amazoniens sont favorables à la pousse de cette espèce.

La réponse de Didier Béreau est pourtant claire : « Le sol amazonien n'est pas plus favorable qu'ailleurs au développement des palmiers. Les palmiers sont répartis sur toute la planète et dans des lieux même les plus surprenants. C'est un tort de penser que les palmiers ne poussent qu'en Amazonie et en zone tropicale. Ce qui fait la particularité de l'Amazonie, c'est l'abondance des palmiers au mètre carré, c'est vrai ». 

«Dans le monde, on trouve 3000 espèces et 226 genres de palmiers, dont 1400 espèces en Asie, 1200 espèces en Amérique et 117 espèces seulement en Afrique. Pour préciser, on dénombre 180 espèces et 39 genres en Amazonie et, plus spécifiquement, 70 espèces et 18 genres en Guyane. Parmi ces espèces, il y en a seulement neuf qui sont tout à fait endémiques», explique Didier Béreau.

 

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.