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Les habitants de la grotte de Blombos en recherche de couleur minérale, des palettes exceptionnelles

Écrit par Heloïse Roc, La Grande Epoque
06.11.2011
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  • La recette préhistorique des pigments. (Wikipédia)(攝影: / 大紀元)

Un atelier de fabrication de peinture datant de 100.000 ans découvert dans une grotte d'Afrique du Sud, dévoile les capacités de nos ancêtres. Cette découverte gardée secrète durant trois ans vient d’être révélée au monde. Le paléoanthropologue sud-africain Christopher Henshilwood de l’université de Witwatersrand, de Johannesburg l’a annoncée au magazine Science. Cette recherche a été menée avec une participation internationale, engageant notamment des chercheurs du CNRS et de l'université Bordeaux 1 et en collaboration avec le Centre de recherche et de restauration des musées de France. Ainsi, le plus ancien atelier de fabrication de pigments d’ocre du monde est exposé et il existait bien avant l'arrivée de l'homme en Europe. Cet atelier était utilisé par des Homo sapiens, qui habitaient la grotte de Blombos, près de la ville du Cap. Ils utilisaient une teinture ocrée, créée au moyen d'un savoir-faire compliqué.

La capacité conceptuelle de nos ancêtres

Les vestiges découverts comprennent des coquilles de mollusques marins, appelés aussi oreilles-de-mer ou ormeaux. Ils dévoilent encore les traces d'un liquide riche en ocre, composé de poudre de quartz, de fragments d'os d'animaux, de charbon de bois et des pierres servant de marteaux. Le premier coquillage est recouvert d'une matière colorante rouge de 5 millimètres d'épaisseur et contient également un peu de matière colorante et des cristaux de quartz. De plus, un galet porte des traces de choc et préserve le contenu du coquillage. Enfin, un os allongé, sans doute employé pour mélanger ou appliquer le pigment, une omoplate de phoque et une vertèbre d'herbivore accompagnent cet ensemble. Le second ensemble est constitué d'un coquillage, un ormeau recouvert également en son fond d'une couche de pigment. Il contient aussi un petit bloc de quartz taillé, enduit de pigment, ainsi qu'un fragment de minéral rouge portant des traces de polissage et de taille.

Tous ces objets ont été trouvés dans une couche de sédiments qui a eu la particularité d’avoir maintenu une conservation exceptionnelle. Ces éléments honorent avantageusement les capacités mentales de nos ancêtres. Les travaux publiés le 14 octobre dans la revue Science soulignent en effet la capacité conceptuelle de nos ancêtres. Par ailleurs, la revue signale que l’application du mélange est inconnue, mais imagine les possibilités d’utilisation des matières, incluant la décoration et la protection de la peau.

La recette préhistorique des pigments

Par l’étude des fragments de colorant et des résidus visibles sur les outils et les coquillages analysés de manière approfondie, les chercheurs sont arrivés à reconstituer la recette mise en œuvre par les hommes préhistoriques pour fabriquer leur pigment. Ils ont notamment mis en évidence l'utilisation délibérée de trois types de roches riches de deux minéraux, l'hématite et la goethite, des oxydes de fer parmi les plus répandus. Les artisans de l'époque ont produit une poudre colorante en débitant et en broyant les roches, en les abrasant contre des meules en quartz. De plus, la découverte de fragments d'os spongieux permet d’envisager que la moelle osseuse devait être utilisée comme liant. Par ailleurs, la présence d'une trace circulaire, façonnée après séchage des pigments sur la face du coquillage le mieux conservé, révèle que le mélange colorant était liquide. Enfin, les coquillages ont été utilisés comme contenants pour mélanger et stocker les pigments.

Selon le CNRS les pigments rouges, jaunes et noirs, le plus souvent constitués d'oxydes de fer, ont déjà été utilisés par l'homme préhistorique en Afrique et en Europe depuis au moins 200.000 ans. Jusqu'à présent, la préparation et le stockage des pigments avant le Paléolithique supérieur (40.000-10.000 ans) étaient méconnus.

Un atelier exceptionnel, un savoir-faire de premier ordre

L’atelier découvert dans la grotte de Blombos constitue le plus ancien témoignage d'une production artisanale et d'une conservation préhistorique de matières colorantes. Sa découverte est un enrichissement de nos connaissances dans le domaine pictural. La complexité des techniques mises en œuvre suppose des capacités exceptionnelles pour l’époque, comme la combinaison de matières premières de différentes natures et origines. Par ailleurs, l'utilisation du feu pour faciliter l'extraction de la moelle osseuse est aussi de nature étonnante, tandis que l'emploi de coquillages en tant que récipients ou palettes de couleur est ingénieux. Donc, les artisans d’une main experte disposaient déjà, il y a 100.000 ans, d’une habileté émérite dans la connaissance des propriétés colorantes de différents minéraux, notamment les oxydes de fer.

Pourquoi fabriquaient-ils ces pâtes colorantes? Il semble que l’utilisation des couleurs pour le coloriage des matières était le plus évident, comme la pierre, les peaux, le corps humain. Elles pouvaient aussi être utilisées pour assurer la conservation et la protection de certains matériaux comme le tannage des peaux, ainsi que celle du corps contre les rayons solaires. La consommation en tant que médicament ou complément alimentaire est supposée possible, ainsi que la production de représentations abstraites ou figuratives, paraît être aussi parmi les hypothèses d'utilisation les plus plausibles.

Les capacités des hommes préhistoriques

Ces vestiges, découverts dans la caverne de Blombos à 300 kilomètres du Cap, indiquent une compréhension des processus mentaux complexes de l'homme, explique le professeur Christopher Henshilwood de l'université de Witwatersrand à Johannesburg. Ils montrent que ces hommes avaient déjà, il y a 100.000 ans, des connaissances élémentaires de chimie et la capacité de planifier à long terme, ajoute-t-il. Ces découvertes prouvent que ces hommes avaient la capacité conceptuelle pour trouver, combiner et stocker des substances qu'ils pouvaient peut-être utiliser pour améliorer leurs rites sociaux, précise ce chercheur.

Francesco d'Errico indique au magazine Le Point que «des traces d'utilisation de pigments ont été trouvées de 200.000 à 250.000 ans, mais jusqu’alors elles sont contestées. En revanche, des fragments d'oxyde de fer ont été collectés en Afrique dans des couches datées de 160.000 ans. Enfin, n'oublions pas qu'en Europe les néandertaliens utilisaient souvent un pigment noir, voilà 40.000 à 60.000 ans».

Valoriser les aptitudes des hommes préhistoriques

Pour valoriser l’art de nos ancêtres, une équipe multidisciplinaire réunissant des préhistoriens du CNRS et des chercheurs britanniques, marocains, israéliens et allemands ont listé des découvertes faites lors de fouilles de quatre sites archéologiques marocains. Ainsi des parures en coquillages perforés et colorés datés de 100.000 à 70.000 ans ont été découvertes. Les objets de parure sont considérés avec l'art, les sépultures et l'utilisation de pigments comme l'un des indices archéologiques parmi les plus probants de l'acquisition d'une pensée symbolique. Selon les chercheurs, pendant longtemps, on estimait que les plus anciens ornements dataient du début du paléolithique supérieur en Europe et au Proche Orient, soit autour de 40.000 ans avant notre ère. Ces découvertes ont révélé que ces coquillages, utilisés comme objets de parures, étaient plus anciens que ce que l'on supposait et que ces comportements avaient une origine africaine.

Les grottes du paléolithique, Lascaux et la datation

La grotte de Lascaux est l'une des plus importantes grottes ornées du paléolithique par le nombre et la qualité esthétique de ses œuvres. Elle est parfois surnommée la Chapelle Sixtine de l'art pariétal, selon une expression attribuée à Henri Breuil qui la nomme également le Versailles de la Préhistoire. Cependant d’après leur âge estimé, la datation ne serait que d’environ 18.000 et 17.000 ans, ce qui est assez récent en considérant l’âge de la grotte de Blombos en Afrique du sud. Selon les auteurs, elles sont attribuées au Magdalénien ancien ou au Solutréen qui le précède.

Toutefois l’histoire de nos ancêtres peut nous révéler bien des surprises car souvent nos connaissances semblent restreintes dans le temps.

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