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Escapade fluviale en Pologne

Écrit par Christiane Goor, La Grande Époque
15.05.2011
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  • La Maison communale de Gdansk(攝影: © charles Mahaux / for any information about this image please contac: Mahaux Photography Gelivaux 28 B-4877 OLNE BELGIUM http:www.mahaux.com)

Ville mythique au même titre que Varsovie, Cracovie et Wroclaw, Gdansk est l’œuvre commune des Polonais et des Allemands, centre de nombreux conflits qui ont traversé son histoire et délimité son appartenance à un territoire ou à un autre. Sa situation exceptionnelle à l’embouchure de la Vistule, sur la mer Baltique, lui a permis de devenir dès le XIVe siècle une ville portuaire stratégique, d’abord pour les puissants marchands de la Hanse Teutonique, ensuite pour les Prussiens qui lui donnèrent le nom de Dantzig. C’est ici aussi que le premier coup de feu de la Seconde Guerre mondiale a été tiré, le 1er septembre 1939, du haut du phare qui domine le port. C’est encore ici qu’est né «Solidarnosc», la première fédération indépendante de syndicats qui osa lutter contre le pouvoir communiste au nom de la liberté et de la justice, déclenchant un mouvement qui allait déferler sur toute l’Europe jusqu’à en changer la carte.

C’est au port de Gdansk que l’aventure commence. Lukasz y conduit ses hôtes qui ont choisi de vivre une croisière sur les rivières qui creusent leur sillon entre les lacs et les marécages qui dessinent le delta de la Vistule. Les nouveaux chefs de bord prennent possession de leur bateau de plaisance et suivent une formation de quelques heures avant de larguer les amarres en toute confiance, munis d’une documentation complète sur la région.

Une croisière pastorale

  • le petit port paisible de Rybina(攝影: © charles Mahaux / for any information about this image please contac: Mahaux Photography Gelivaux 28 B-4877 OLNE BELGIUM http:www.mahaux.com)

La Vistule n’a rien d’un fleuve paisible à son embouchure, elle accueille les marins d’eau douce avec un vent de bourrasque qui soulève des vagues parfois houleuses. Il faut se hâter de lui tourner le dos pour se glisser sur les eaux calmes de la petite rivière Szkarpawa qui serpente au cœur d’une vaste plaine fertile, couverte de céréales blondes. Le minuscule port de Rybina offre une étape accueillante à deux pas de la maison de Marek, un ami de Lukasz, qui n’hésite pas à ouvrir sa maison aux plaisanciers d’un soir. Une belle occasion de saisir toute l’intensité de l’accueil chaleureux d’une famille polonaise. Le soir, tout le monde se retrouve autour de la table dans la pièce de séjour décorée d’images pieuses et de fleurs artificielles. La nourriture proposée est copieuse, simple et succulente : des poissons marinés, du poulet frit, de la macédoine de légumes, des cornichons au vinaigre et les incontournables pierogis, ces raviolis typiques de la cuisine polonaise, farcis de fromage blanc, de chou, de viande ou encore de myrtilles, le tout arrosé de vodka glacée qui délie rapidement la parole, malgré la barrière de la langue.Rybina abrite aussi une station de pompage qui régule jusqu’à 1800 hectares de champ. Il est vrai que cette vaste région limoneuse appelée «Zulawi Wislane» étire un tiers de sa superficie à 1,8 mètres sous le niveau de la mer, ce qui en fait la zone la plus basse de la Pologne. Plusieurs canaux en permettent l’irrigation ou l’assèchement, selon les besoins. Le travail des trois pompes construites au début du siècle dernier était autrefois assuré par de nombreux moulins à vent dont il ne reste rien si ce n’est des photos jaunies qui tapissent les murs des maisons, témoins de l’indéfectible fidélité des Polonais à leur histoire, celle qui a précédé le joug communiste.

Seconde étape, Nowy Dwor Gdanski, sur la Tuga, une rivière surréaliste qui étire sur une quarantaine de kilomètres ses eaux vertes, tapissées par la salvinia, une fougère sauvage, envahissante et pourtant protégée. La lente balade au cœur de la petite ville ouvre des perspectives baignées de quiétude, entre des petits potagers fermés par une palissade en bois où des lignes de carottes et des carrés de laitues et de choux côtoient des rangs de lupins, de soucis et de rosiers. Ailleurs, les bas côtés de la berge sont envahis par une volée de poules et de canards. Les saules pleureurs inclinent leurs longues branches sur l’eau, dessinant des anses romantiques qui ralentissent notre allure en alimentant notre imaginaire.

Magique et spectaculaire

  • Le château de Malbork(攝影: © charles Mahaux / for any information about this image please contac: Mahaux Photography Gelivaux 28 B-4877 OLNE BELGIUM http:www.mahaux.com)

Amarrer son bateau au restaurant flottant Flisaka sur la rivière Nogat qui se jette, elle aussi, dans la lagune de la Vistule, c’est s’offrir un rare moment d’enchantement. Sur l’autre rive, chaque soir par beau temps, s’ouvre un spectacle fantastique. L’immense château-fort de Malbork, le plus grand château en briques du monde, se pare de mille feux entre les rouges flamboyants du crépuscule et l’éclat des lampes qui illuminent ses remparts. Assis sur la proue du bateau, chacun subit l’envoûtement inexprimable du profond silence de la nuit qui tombe tout en douceur.

Inscrit sur la prestigieuse liste du patrimoine mondial de l’UNESCO, cet ancien siège du grand maître de l’Ordre Teutonique, plus connu sous le nom de Marienburg, est le plus grand ouvrage médiéval de ce genre en Europe. À l’extérieur des murs s’étend le bas château où se multiplient aujourd’hui les marchands de souvenirs et de gourmandises. Il est aisé d’imaginer l’animation qui habitait cet espace occupé autrefois par des commerçants de tout type, des artisans et les palefreniers qui soignaient les 400 chevaux dans les écuries. Les femmes n’avaient pas le droit de passer la porte qui menait à la seconde enceinte où vivaient les moines-soldats qui partageaient leur temps libre entre les prières à la chapelle et les festivités au réfectoire. Une dernière porte conduisait aux appartements privés du grand maître, dans le haut château.

Les chevaliers de Marie jouissaient d’un confort bien éloigné de l’existence rude et pénible des paysans au-delà des grilles du château. Des fours installés dans les caves envoyaient de l’eau chaude à travers un circuit d’aération assurant une température proche de 24 °C, même pendant l’hiver le plus rude. Autre élément de confort, les nombreuses latrines connectées aux douves par un puits de 15 mètres de long. Enfin, la table était copieuse et raffinée, loin des menus frugaux de la vie monacale traditionnelle. Toutes ces richesses étaient acquises grâce à leur mainmise sur le contrôle de la route du cuivre et de l’ambre qui traversait leurs terres vers les ports de la mer Baltique.

  • Façade de la grande infirmerie(攝影: © charles Mahaux / for any information about this image please contac: Mahaux Photography Gelivaux 28 B-4877 OLNE BELGIUM http:www.mahaux.com)

Toutefois, au XVe siècle, ruinés par les guerres et affaiblis par les révoltes, les chevaliers perdirent à tout jamais le contrôle de leur capitale. Victime des guerres et du feu, la forteresse tomba en ruines jusqu’à ce que Bismarck en confia la restauration à Conrad Brecht, un architecte qui y consacra toute sa vie, avec une passion digne des chevaliers eux-mêmes, et le château retrouva la grâce et la force du passé, pour le plus grand plaisir des visiteurs.

Voyage au bout de l’insolite

Dernière étape, la remontée du pittoresque canal Ostroda-Elblag, une expérience inattendue et étonnante le long d’une voie d’eau étroite, bordée de roseaux où nichent une multitude d’oiseaux lacustres qui ne se laissent plus impressionner par le ronronnement des bateaux.

 Long de 82 kilomètres, ce canal affiche une dénivellation de près de 100 mètres compensée par un ingénieux système, unique au monde, de plans inclinés qui s’échelonnent sur une dizaine de kilomètres. Au lieu des écluses habituelles, impossibles à installer sur ce parcours à la fois trop court et trop dénivelé, cinq rampes successives permettent de hisser les bateaux et de les tirer sur terre à l’aide de chariots sur rails. Chaque rampe est gérée par une chambre des machines alimentée en eau du canal, dirigée vers de gigantesques roues munies de trois cuillères d’une contenance d’une tonne chacune qui permettent d’actionner le câble et de treuiller la plateforme. Il suffit de diriger le bateau dans un bac et de l’amarrer au ponton. Quand le capitaine du bateau est prêt, il tape sur un gong avec un petit marteau pour prévenir que la manœuvre peut commencer. Le gardien de la machinerie enclenche alors son installation hydraulique et la plateforme est tractée à sec sur une voie ferrée. Le spectacle depuis le bateau qui escalade ou descend des pentes importantes est grandiose, car la manœuvre donne à voir des tranches de paysage inattendues sur le tracé du canal surtout si, au même moment, on croise un autre bateau qui fait le parcours inverse. Les alentours ne sont que campagne à l’infini, apprivoisée par des cultures de céréales et des prairies où paissent des vaches. De loin en loin, des clochers d’églises signalent un hameau. Au sortir du bac, le bateau poursuit tranquillement sa route naturelle sur un bief avant de répéter la même manœuvre plus loin.

Construit en 1860, cet ingénieux système de halage exclusivement hydraulique est un chef-d’œuvre de l’ingénierie prussienne. Autrefois, il permit de relier les communautés locales à la Baltique, encourageant ainsi le commerce des marchandises et principalement le transport du bois. Depuis l’arrivée du chemin de fer, le canal est essentiellement dévolu au tourisme, et les équipements sont adaptés pour permettre le passage de différents types de bateaux, y compris des petits voiliers. La balade de plusieurs heures se termine sur le lac Druzno, une superbe réserve naturelle, royaume des cygnes, cormorans, poules d’eau, grues et autres aigrettes qui semblent marcher sur l’eau dans ce paradis aquatique envahi par les nénuphars et les jacinthes d’eau. La traversée du chenal qui mène à Elblag offre une plongée féerique de deux heures au cœur d’une nature à l’état pur qui respire au rythme des cris d’oiseaux et du clapotis de l’eau. Le port d’Elblag est à deux pas du centre de la petite cité dont on a vite fait le tour. Jadis proche concurrente de Dantzig, elle n’a pas eu la chance d’être restaurée. Aujourd’hui encore, les décombres que l’on imagine aisément récentes et fumantes alors qu’elles datent de la dernière guerre ternissent quelque peu la ville, même si la reconstruction «à l’identique» a commencé, sans doute parce qu’elle vit naître les parents d’Angela Merkel. C’est ici que la croisière s’achève, il est temps de s’offrir une pause sur la mer Baltique, trop proche pour ne pas en profiter ne fut-ce que le temps d’un week-end.

Infos pratiques

Informations : Toutes les informations peuvent se trouver sur le site www.pologne.travel. Pour en savoir davantage sur les différentes facettes de la Poméranie, le plus simple est de visiter les sites proposés par chaque destination : www.gdansk.pl, Enfin, si vous cherchez un guide ou un organisateur de voyage local parlant, entre autres, le français, contactez Andrzej Falkowski, un homme pétri de culture et d’humour www.omnibustourist.com.pl.

Quand partir : L’été bien sûr pour les plaisanciers!

La croisière : Lukasz Krajewski a débuté son activité de location de bateaux en 2007, tous construits dans son propre chantier. Il a actuellement huit bateaux disponibles au départ de Gdansk mais aussi de Varsovie ou de Cracovie. Le but du loueur est de promouvoir son pays; la province de Poméranie l’a encouragé en lui décernant le titre de Meilleur Produit Touristique en 2009. Au départ de Gdansk, quatre boucles différentes peuvent être organisées suivant la durée du séjour en comptant 4 à 5 heures de navigation quotidienne. Du matériel de pêche et des vélos peuvent être embarqués sur les bateaux accueillant jusqu’à sept personnes. Côté budget, il faut compter entre 1000 et 1250 euros pour la location d’un yacht pour une durée de sept jours. www.vistulacruises.eu

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