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Inde: Clé de voûte du «Pivot»?

La stratégie de rééquilibrage de la sécurité américaine en Asie

Écrit par Ninan Koshy
08.10.2012
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  • Les militaires de la marine passent sous la Porte de l’Inde à New Delhi, le 16 décembre 2011. Les relations militaires Etats-Unis-Inde se sont particulièrement approfondies dans le domaine de la coopération navale. (Prakash Singh/AFP/Getty Images)

Le document de janvier 2012 du Pentagone sur l’orientation stratégique, intitulé: «Maintien du leadership mondial: les priorités pour le vingt-et-unième siècle» a inauguré une nouvelle Guerre Froide dans la région Asie-Pacifique entre les Etats-Unis et la Chine. Le document affirme la volonté d’un rééquilibrage nécessaire par les Etats-Unis, ou «pivot», dans la région Asie-Pacifique. Le but du «rééquilibrage» – un terme désignant la guidance américaine mondiale – consiste à maintenir la supériorité militaire des Etats-Unis.

Le document accorde une place primordiale à l’Inde au sein de la stratégie américaine, provoquant la surprise chez de nombreux observateurs. Alors que l’Inde a été spécifiquement désignée pour un partenariat stratégique, les alliés de longue date tels que le Japon, l’Australie et la Corée du Sud n’ont pas été évoqués. Lors de sa première visite en Inde, le secrétaire américain de la défense, Léon Panetta a surenchérit en qualifiant la coopération en matière de défense avec l’Inde de «clé de voute de la stratégie américaine» en Asie.

Dans ce qui pourrait être appelé une diplomatie cartographique, les Etats-Unis tiennent à montrer qu’il existe une convergence géostratégique et même territoriale entre les Etats-Unis et l’Inde dans la région. En exemple, le document d’orientation stratégique de janvier, se réfère en particulier à «l’arc s’étendant du Pacifique Ouest et l’Asie de l’Est à l’Océan Indien et l’Asie du Sud.»

Dans un article de novembre 2011 sur la politique étrangère, la Secrétaire d’Etat, Hillary Clinton, a défini l’Asie-Pacifique comme s’étirant «du sous-continent Indien aux côtes occidentales de l’Amérique. La région couvre deux océans -le Pacifique et l’océan Indien- qui sont de plus en plus liés par les navires et la stratégie.» Il est intéressant de noter l’inclusion de l’Asie du Sud dans la région géographique du pivot Asie-Pacifique. L’Asie du Sud a été généralement considérée comme une sous-région stratégique distincte de l’Asie, que les Etats-Unis tentent apparemment d’intégrer dans sa stratégie pour l’ensemble du continent.

Les Etats-Unis ont exhorté l’Inde de changer leur politique, et de passer d’observateur de l’Orient à acteur de l’Orient. Washington s’attend à ce que l’Inde aille plus loin que la construction de relations bilatérales avec les pays de la région et soit impliquée dans leurs problèmes critiques. Selon les Etats-Unis, cela est essentiel à l’intégration de la région Asie-Pacifique sous le parapluie américain.

Vers une alliance militaire

Bien que l’Inde ai fournit une assistance aux Etats-Unis en Afghanistan et continue sa coopération de défense sur d’autres fronts, ce n’est que depuis 2005 que les deux pays agissent dans un cadre officiel. Cette année, une déclaration signée a proclamé que les deux pays entraient dans une nouvelle ère et transformeraient leurs relations pour réfléchir à des «principes communs» et à «un partage des intérêts nationaux.»

Cela implique que la tenue d’un front commun de défense soit le composant majeur d’un partenariat stratégique plus important, entrainant de nouveaux exercices conjoints, des échanges et des opérations multinationales. De ce fait, l’accent est mis sur une expansion de «transactions de défense, non comme un moyen en soi, mais comme un moyen de renforcer notre sécurité, renforcer notre partenariat stratégique, [et] assurer une interaction plus importante entre nos établissements de défense.»

Dès le début de cette nouvelle étape, il était évident que les Etats-Unis souhaitaient une alliance militaire. L’Ambassadeur Robert D. Blackwill, posté à New Delhi en mai 2003, a déclaré que l’objectif stratégique final était d’avoir une armée indienne capable de fonctionner efficacement aux cotés de son homologue américain, dans de futures opérations conjointes.

Ce cadre constituait la base du traité nucléaire entre l’Inde et les Etats-Unis qui lui ont accordé de facto une reconnaissance en tant qu’état doté de l’arme nucléaire, annoncée quelques semaines plus tard. Une série d’accords liés à la défense ont suivi en 2007.

A ce stade, l’Inde refuse toujours de signer les accords de défense en attente qui pourraient être interprétés comme ouvrant la porte à une alliance militaire avec les Etats-Unis. Cependant, il existe des avancés considérables sur les transactions d’armes américano-indiennes.

Les Etats-Unis ont empoché le plus grand nombre de contrats d’armes – d’une valeur de près de 8 milliards de $ (6,22 milliards d’euros) au cours de ces cinq dernières années – , et ce malgré les exigences en matière de surveillance, rigoureuses et intrusives. L’Inde a fondamentalement réorienté  son approvisionnement pour sa défense, s’éloignant de sa dépendance traditionnelle à la Russie. En fait, près de la moitié des plans de défense indiens de ces dernières années sont issus des seules transactions américaines.

Coopération navale

En plus d’un commerce d’armes en hausse, l’Inde et les Etats-Unis ont mené conjointement plus de 50 exercices militaires au cours des sept dernières années. De ce point de vue, les autres pays en exercices conjoints avec l’Inde semblent être de simples pions.

Les relations interarmées se sont particulièrement approfondies dans le domaine de la coopération navale. Les marines américaines et indiennes ont agi en coopération en quatre occasions distinctes: dans le détroit de Malacca après les attaques du 11 septembre, dans les efforts de sauvetages suite au tsunami de l’Océan Indien en 2004-2005, lors d’une opération d’évacuation pacifique au Liban en 2006 et dans des opérations de lutte contre la piraterie dans le golfe d’Aden depuis 2008.

En décembre 2001, les deux pays ont conclu un accord sur la coopération navale pour sécuriser les routes maritimes entre le Canal de Suez et le détroit de Malacca, connues comme étant des goulets d’étranglements. Lors de l’invasion américaine de l’Afghanistan, les navires de guerre ont été fournis par l’Inde pour protéger les navires marchands transitant entre les Détroits de Malacca, ce qui a eu pour effet de libérer les navires de guerre américains officiant au large des côtes du Pakistan. Ceci a été officiellement reconnu par Washington comme étant une contribution de l’Inde à la «guerre par la terreur.»

L’Inde était aussi un des très rares pays à rejoindre le noyau créé par Washington en 2004-2005, au moment du tsunami de l’Océan Indien. Le groupe central était en réalité un plan du Pentagone pour évaluer les implications géostratégiques du tsunami et obtenir un accès militaire américain vers les zones où il n’était pas autorisé auparavant. Il a été dissout suite à de vives critiques des Nations-Unies, et des Nations Européennes comme la France.

Mais l’Inde n’est apparemment pas le seul pays d’Asie du Sud courtisé par les Etats-Unis. The Times of India a rapporté en juin que Washington se trouve dans le processus de faire stationner une base navale à Chittagong, Bangladesh. «Inquiet par la présence croissante des bases navales chinoises dans la Mer de Chine du Sud», a rapporté le journal, «l’Amérique envisage maintenant une contre-stratégie, elle recherche une présence totale en Asie -comme le Japon dans la base de Diego Garcia dans l’Océan Indien.»

Le gouvernement du Bangladesh a nié ces allégations, mais si elles s’avèrent être vrai, cela pourrait jeter une ombre sur la propre stratégie de sécurité de l’Inde et sur la coopération navale indienne. Cependant, une telle initiative pourrait être parfaitement en accord avec la quête en cours de Washington pour obtenir davantage d’installations navales dans la région.

Problèmes dans le voisinage

Bien que les fonctionnaires de l’administration Obama aient souvent déclaré que le prétendu «pivot» ne vise pas un pays particulier, le document d’orientation stratégique admet qu’il concerne, du moins en partie, l’influence croissante de la Chine. Heureuse de se prévaloir de la technologie militaire américaine mais réticente à éveiller des tensions avec celui qui est parfois son rival, on peut comprendre que l’Inde se montre prudente à propos d’un alignement qui pourrait être trop étroit avec les Etats-Unis face à la Chine.

C’est pourquoi, en réponse aux ouvertures de Panetta, le ministre indien de la défense, A. K Antony a insisté sur la «nécessité de renforcer l’architecture de la sécurité multilatérale en Asie et d’avancer à un rythme confortable avec tous les pays concernés.» Il n’est pas passé inaperçu qu’au moment même où Panetta se trouvait à New Delhi, le ministre indien des affaires étrangères S.M Krishna se trouvait en Chine. Ce dernier a affirmé que les relations bilatérales sino-indiennes constituent une priorité pour la politique étrangère indienne, et a exprimé le désir de l’Inde d’étendre une coopération stratégique avec la Chine. De même, plusieurs déclarations sont apparues, clamées par les dirigeants américains et chinois, selon lesquelles ils se sont engagés à collaborer pour la sécurité en Asie du Sud.

L’Inde rencontre une foule de problèmes avec la Chine en Asie du Sud. Parmi eux, il y a les revendications chinoises de plus en plus stridentes sur les territoires indiens, l’absence totale de progrès dans les négociations sur la frontière, les liens nucléaires chinois avec le Pakistan, le soutien chinois de la position pakistanaise sur le Cachemire. Le silence des Etats-Unis sur ces questions a donné l’impression, indirectement, qu’ils soutenaient les positions chinoises.

Dans ce contexte, un pas important peut être fait pour que l’Inde ne s’implique pas dans la nouvelle Guerre Froide. Mais il y une résistance perceptible depuis l’apparition de cette idée. Bien que l’Inde soit réticente à être désignée comme la «cheville ouvrière» du pivot américain, la gouvernance actuelle a rassuré néanmoins Washington, en déclarant soutenir l’ensemble les positions américaines à l’étranger, y compris dans la région Asie-Pacifique.

Version anglaise: India: Linchpin of the Pivot?

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