Un aperçu du marché européen

Ron Paul, député républicain du Texas souhaitant auditer la Fed a trouvé écho en Allemagne. Les débats se sont intensifiés début novembre, suite à l’ordre donné par le service de supervision gouvernemental allemand de procéder à un audit complet de l’or entreposé  aux États-Unis.

Ce sujet a fait grand bruit, dans un marché résistant.

Cependant, la controverse sur les réserves d’or de l’Allemagne mérite une explication. Le pays a toujours été un fidèle allié des États-Unis, en matière économique et commerciale. Ainsi pour quelle raison, l’Allemagne, après des décennies de stockage de son or à la Fed de New York s’inquiète-t-elle  de savoir si l’or s’y trouve encore?

La réponse peut paraître simple. Le Bundesrechungshof, une institution semblable au Government Accountability Office des États-Unis, a ordonné à la banque centrale allemande de bien vérifier ses réserves d’or d’ici fin octobre. L’exécution de cette tâche serait facile, si tout l’or était contrôlable en Allemagne. Cependant 45%  de ses 3396 tonnes d’or sont déposées à la Fed de New York.

L’accumulation d’or après la Seconde Guerre mondiale

Les raisons pour lesquelles une telle quantité d’or est conservée à New York sont historiques et s’expliquent dans le contexte de la guerre froide. Après la Seconde Guerre mondiale, l’Allemagne était financièrement au plus bas, il ne restait quasiment plus aucune réserve de devises, et encore moins d’or. Le plan Marshall et la nouvelle monnaie, le deutsch mark, ont favorisé la reprise rapide de l’économie. L’Allemagne accumula rapidement des excédents commerciaux importants avec divers pays.

En raison de la nature du système de monnaie Bretton Woods comportant des taux de change fixes, les déséquilibres commerciaux se sont finalement transformés en or. Le dollar constituait la monnaie d’échange et pouvait être échangé en or au cours de 35$ l’once.

Quand les États-Unis importaient plus de l’Allemagne que cette dernière exportait, l’équilibre se  réglait finalement en or. L’Allemagne a ainsi enregistré des excédents avec les États-Unis et d’autres pays. Etant donné le coût lié à l’expédition de grandes quantités d’or, l’Allemagne a tout simplement accumulé un trésor à New York et dans d’autres grands centres d’échange d’or tels Londres et Paris.

Les lingots furent ensuite plus facilement déplacés du coffre-fort d’un pays à l’autre, et l’Allemagne a ainsi pu augmenter ses réserves de 1328 tonnes en 1956, à 4034 tonnes en 1969. Au cours de la période économique difficile des années 1970, l’Allemagne a vu ses réserves diminuer sensiblement.

Une autre raison pour laquelle l’or se trouve stocké à l’étranger, et non à Francfort, était la crainte ressentie, à cette époque,  d’une éventuelle invasion de l’Allemagne par l’Union soviétique. Dans  cette hypothèse, l’Union soviétique aurait  d’abord attaqué l’Allemagne, en tant que ligne de séparation entre les nations de l’OTAN et du Pacte de Varsovie partageant l’Allemagne de l’Est et de l’Ouest.

L’Euro change la situation

La menace d’une invasion soviétique disparue et l’avènement de l’euro ont engendré une intensification du rapatriement. En outre, les réserves d’or de l’Allemagne constituent un élément important dans le soutien à l’euro au sein de l’Euro-système des banques centrales.

L’or américain de soutien au dollar est déposé en Amérique. Ainsi, pourquoi l’Europe ne conserverait-elle pas  l’or de soutien à l’Euro sur son propre territoire ? La récupération de grandes quantités d’or entreposées à l’étranger a déjà été réalisée dans le passé mais s’avère très onéreuse. En 1965, le Président français Charles de Gaulle a envoyé des navires de guerre retirer l’or français stocké à New York.  L’Allemagne, après 2000, a déplacé 940 tonnes d’or de Londres à Francfort. Dernièrement, en 2011, le président vénézuélien Hugo Chavez a récupéré l’or de son pays à Londres.

Confiance et garanties

Le déclenchement de la crise financière mondiale en 2008 générerait des inquiétudes d’où une plus grande mobilisation pour sécuriser le trésor. Hormis cette supposition, il est difficile d’expliquer la raison de cette subite demande de vérification par le Bundesrechnungshof  après tant d’années passées sans crainte particulière. Le fait que la composition et le poids des lingots n’aient jamais été contrôlés est maintenant critiqué. La seule chose que la Bundesbank ait pu obtenir est une confirmation écrite du dépositaire.

La Bundesbank souhaite contrôler le stock d’or en Allemagne ainsi que par ailleurs. Elle a fréquemment assuré les américains de la Fed de New York de son entière confiance. Cela a été confirmé dans un discours prononcé, la semaine dernière, par Andreas Dombret, membre du directoire de la Bundesbank allemande, à l’attention de William Dudley, président de la Fed de New York.

Ainsi actuellement même si la Bundesbank demandait un audit complet, celui-ci serait probablement refusé, à l’instar de la demande de Ron Paul.

Version anglaise: Germany Sidetracked by Controversy Over Gold Reserves