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Les cinématographies permettent-elles de modifier nos jugements sur les événements?

Écrit par Alain Penso, apensodelavega@gmail.com
14.03.2012
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  • Cheval de Guerre de Steven Spielberg (2011): Les chemins de la fraternité.(攝影: / 大紀元)

Depuis plusieurs années les apports grandissant des images de cinéma et de télévision ont permis non seulement de prendre conscience de la cruauté du monde à nos frontières, mais aussi de réagir à la barbarie des pouvoirs politiques sur leurs citoyens. Désormais, les citoyens du monde protestent auprès d’organisations internationales pour faire cesser «la gabegie humaine».

Les conflits récents

Au-delà de la volonté de mettre en spectacle tout événement, les cinéastes veulent mettre en perspective des faits qui déclencheront des idées chez le spectateur, citoyen du monde. Ils désirent analyser, en public, des décisions prises par les détenteurs de pouvoirs et permettre ainsi de réfléchir sur les éventuelles interventions pour «calmer le jeu». L’individu, grâce à la richesse de son information et ses capacités à réagir, pourra de plus en plus intervenir sur les faits eux-mêmes. Pendant la guerre de Sarajevo, les armées serbes refusent l’indépendance de la Bosnie-Herzégovine reconnue par l’Union européenne. Ils pilonnent et assiègent la ville de Sarajevo. Cent mille personnes périront, en trois ans, dans ce déchaînement de cruauté diabolique.

Dans une perspective résolument documentariste, le Britannique Michael Winterbottom tourne Welcome to Sarajevo (1997) d’après le roman de Michael Nicholson, Natasha’s Story. Michael Henderson, reporter de télévision britannique, hante la ville en quête de sujets à tourner. Il enlèvera Emira, d’un orphelinat soumis à d’incessants bombardements et la ramènera à Londres, oubliant sa déontologie de la non-intervention. Il devra pourtant retourner à Sarajevo affronter les bombardements afin de rencontrer la mère d’Emira et la convaincre de lui laisser adopter sa fille.

Dans l’esprit des spectateurs, chercheurs de documents cinématographiques pour ces films écrits à partir d’impressions et de pièces de dossiers solides, une conscience se tisse où apparaît un sens critique basé sur la comparaison de situations et de conflits extrêmement différents qui aboutissent cependant au même résultat: la guerre.

À la fin des années 1970, Volker Schlöndorff, conscient du dérèglement politique et moral du monde, entreprend une réflexion sur les guerres fratricides qui ravagent la planète mettant des centaines d’hommes dans la précarité au milieu des crimes insensés de civils qui n’ont d’autres solutions que d’obéir.

La guerre au Liban vue par Volker Schlöndorff

Dans Le Faussaire (1980), avec Bruno Ganz sur un scénario de Jean-Claude Carrière, Volker Schlöndorff, Margarethe von Trotta et d’après le roman de Nicolas Born, Schlöndorff, au travers d’une histoire classique de reporter observant les événements qu’il doit rapporter et qui sont les gestes de son métier, ébauche une réflexion sur la responsabilité du journaliste, l’homme, face aux différentes informations qu’il va faire parvenir. Lesquelles doit-il choisir pour intéresser son public? Il doit faire prendre conscience à ses lecteurs et spectateurs de la gravité des informations qu’il rapporte, alors que ce n’est pas son métier de faire réfléchir.

Le thème développé dans Le Faussaire est fort et donne à voir, grâce aux images chocs et d’actualité.

Dans Beyrouth écartelée par une guerre fratricide, un reporter allemand, Georg Laschen, enquête sur les causes du conflit. Il y retrouve Ariane, une ancienne maîtresse venue au Liban avec son mari. Il découvre l’horreur de la guerre et, désespéré d’avoir eu à tuer un Arabe, il rentre en Allemagne où il refuse de vendre ses informations.

Cheval de Guerre ou la campagne anglaise

Steven Spielberg avec Cheval de Guerre (2011) parcourt la campagne anglaise et va à la rencontre des paysans modestes, de braves gens pauvres, que les propriétaires terriens exploitent pour les maintenir dans le besoin, ce qui leur permet ainsi de dominer la région. L’anecdote domine le film et prend très vite le statut de l’histoire des peuples et des gens dominés par des hommes politiques puissants qui font la guerre sans science ni conscience, simplement pour avoir le dernier mot et l’honneur pour eux.

Le fil conducteur du scénario est emprunté au roman de Michael Morpurgo: Albert s’occupe du cheval, Joey, acheté aux enchères par son père, fermier d’un grand domaine qui s’affronte au propriétaire qui veut se venger en récupérant ses terres. La guerre éclate et Joey, le cheval, est réquisitionné. Albert est trop jeune pour s’engager, mais le militaire lui promet de s’en occuper et de le ramener après la guerre. Joey sert de fil conducteur et de structure du récit décrivant les combats menés en dépit de toute humanité. La cruauté du commandement allemand est parfaitement décrite, soulignant ainsi la volonté de destruction, de toutes oppositions par les généraux de l’armée du Kaiser. La première charge de la cavalerie anglaise tourne au massacre en règle. Les moyens déployés sont considérables. Il ne s’agit pas de trucages mais vraiment de chevaux bien authentiques sans utilisation de l’informatique. Avec cette œuvre belle, esthétique, thématiquement pertinente et passionnante, le cinéma déploie, à nouveau, son authenticité au niveau de la mise en scène. On est proche du cinéma de David Lean, le maître du grand spectacle comme dans Lawrence d’Arabie (1962) ou dans Docteur Jivago (1965): ainsi réapparaît la magie totale du cinéma.

Des sentiers de la gloire, aux Hommes contre

La scène de fraternisation dans laquelle Joey, le cheval, est coincé dans les barbelés est une scène d’anthologie. Elle permet à deux soldats de camps ennemis de se prêter main-forte pour libérer le cheval blessé. De l’humanité émane de cet enfer de guerre. Dans Joyeux Noël de Christian Carillon (2005), une sorte de conte de fées de Noël au milieu de l’enfer de la guerre 1914-1918, des millions d’hommes sont fauchés par les mitrailleuses, tout cela pour une tranchée supplémentaire conquise contre la mort de centaines d’hommes en pleine jeunesse.

Nicholas Sprink doit renoncer à sa carrière de prodigieux ténor à l’opéra et ne plus voir Anna Sörensen pour suivre le jeune Jonathan qui s’est engagé. Les idées parcourent les scénarios et les films. Les Sentiers de la gloire (1957) dont le scénario est élaboré par Stanley Kubrick, Calder Willingham et Jim Thompson, d’après le roman de Humphrey Cobb paru en 1935, décrit une rébellion au sein de l’armée réprimée par le haut état-major qui ne se préoccupe guère des hommes qu’il considère comme de la chair à canon. Après ces abus souvent guère justifiés, même sur le plan militaire, les luttes de classes vont s’intensifier et des instances plus justes vont voir le jour. Des tribunaux plus impartiaux représenteront mieux les classes défavorisées et moyennes. Les Hommes contre de Francesco Rosi (1970) raconte comment l’Italie neutre, jusqu’en 1915, a dû se lancer dans une guerre effroyable contre l’Autriche, une guerre dite de position où le moindre pouce de terrain permettait, selon les patriotes favorables à la guerre, de constituer l’unité italienne. Le film fait ressortir l’incompétence de l’état-major dénué de toute humanité.

À sa sortie, il a été l’objet de polémiques et d’un procès pour dénigrement de l’armée, qui se terminera par un acquittement, après toutes sortes d’attaques venant de nationalistes. Il n’en demeure pas moins que Les Hommes contre est un film exemplaire sur la révolte des soldats face à un état-major intransigeant.

La Dame de fer de Phyllida Llyod (2011) ou comment stabiliser un pouvoir sans partage

Dans le registre d’une fiction proche de la réalité, le film se tourne vers la biographie de la femme politique soucieuse d’atteindre les sommets du pouvoir. L’interprétation de Méryl Streep amène au film une force telle que l’on se demande parfois s’il ne s’agit pas de Thatcher elle-même.

Looks and Smiles (1981) et Fatherland (1986) sont deux très beaux films de Ken Loach. Ce réalisateur engagé, souvent victime de la censure pour les thèmes  sociaux abordés, montre, dans plusieurs de ses films, les idées de ce Premier ministre sur les gens modestes. Elle fera voter des économies sociales tout en favorisant les grands groupes économiques. Son économie libérale, trempée de conservatisme,  ne favorisera pas les arts.

Margaret Thatcher a été la première femme à avoir dirigé le parti conservateur de 1975 à 1990 et également la première femme Premier ministre du Royaume-Uni de 1979 à 1990, soit pendant quinze années.

Il est surprenant que L’Étoile rouge, journal soviétique, ait surnommé, Margaret Thatcher, La Dame de Fer.

Alain Penso est historien et journaliste de cinéma. Il a dirigé la revue Cinéma des événements. Documentariste, il tourne des films ethnologiques, notamment sur Salonique. Il a publié la première biographie de Patrick Dewaere (Patrick Dewaere, collection Têtes d’affiche). apensodelavega@gmail.com

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.