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Peut-on parler d’une morale universelle?

Écrit par Frédérique Privat, Epoch Times
16.01.2013
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Le 9 décembre dernier, date anniversaire de la séparation en 1905, de l’Église et de l’État, François Hollande, président de la République française, annonçait la mise en place d’un Observatoire de la Laïcité pour 2013 corrélé à l’enseignement de la «morale publique» au sein des établissements scolaires. Des propositions de transmission de cette morale publique seront effectuées par l’Observatoire lui-même. En septembre dernier, Vincent Peillon, ministre de l’Éducation nationale, avait déjà annoncé la création d’une mission de transmission de la «morale laïque» avec pour objectif d’en faire ensuite une discipline à part entière.  Il y a bientôt dix ans, fin 2003, Jacques Chirac avait lui aussi annoncé la création de cet Observatoire mais le projet n’avait pas été mené à son terme.

La morale fait cependant déjà partie intégrante des programmes scolaires. En effet, un cours d’instruction civique et morale, mis en place dans les programmes de 2008, est toujours en vigueur. Absente des programmes scolaires officiels depuis la fin des années 60, l’enseignement de la morale semble connaître un engouement depuis quatre ans. Pourtant, la morale a constitué depuis ses débuts, l’un des piliers de l’enseignement scolaire laïque en France.

Jules Ferry, père de l’école laïque, exposait en 1883 son idée de cette discipline lors d’une lettre ouverte aux instituteurs: «Il est impossible que vous voyiez chaque jour tous ces enfants qui se pressent autour de vous, écoutant vos leçons, observant votre conduite, s’inspirant de vos exemples, à l’âge où l’esprit s’éveille, où le cœur s’ouvre, où la mémoire s’enrichit, sans que l’idée vous vienne aussitôt de profiter de cette docilité, de cette confiance, pour leur transmettre, avec les connaissances scolaires proprement dites, les principes mêmes de la morale, j’entends simplement de cette bonne et antique morale que nous avons reçue de nos pères et que nous nous honorons tous de suivre dans les relations de la vie sans nous mettre en peine d’en discuter les bases philosophiques.»

Pour Jules Ferry, l’enseignant doit se mettre à la place du parent lors de l’enseignement de cette discipline, tout en évoquant ses limites, notamment dans le contexte religieux. Il suggère donc à l’enseignant de toujours se demander si un parent, quel qu’il soit, pourrait accepter, ou refuser, le précepte que lui, enseignant, compte faire passer: «Si oui, abstenez-vous de le dire; sinon, parlez hardiment, car ce que vous allez communiquer à l’enfant, ce n’est pas votre propre sagesse, c’est la sagesse du genre humain, c’est une de ces idées d’ordre universel que plusieurs siècles de civilisation ont fait entrer dans le patrimoine de l’humanité».

Fidèle à sa théorie du positivisme, il introduisait là l’idée d’une morale universelle, qui venait en quelque sorte, remplacer la morale religieuse, tout en conservant l’idée essentielle de distinguer le bien du mal. Ainsi les nombreuses maximes exposées le matin sur le tableau noir de l’époque de Jules Ferry présentaient pour certaines de fortes similitudes avec les écritures religieuses. Parmi les nombreuses maximes des débuts de l’école laïque, on trouvait: «Sois honnête et bon dès ton enfance», «La politesse est un fond qui ne coûte rien et rapporte beaucoup» ou bien «Ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu’on te fasse», dont le sens se rapproche étrangement de: «Aime ton prochain comme toi-même»...

Dans son traité Leçons de morale pratique précédées de notions sur la morale théorique, Émile Rayot précise: «Il n’y a d’obligatoire que le bien; le bien est le but que la volonté devrait toujours se proposer; la volonté qui accomplirait sans cesse le devoir serait une volonté bonne, elle posséderait la vertu; aussi dit-on souvent que la morale est "la science du bien, la science de la vertu"».

130 ans plus tard et après une cinquantaine d’années de relégation, la morale revient au goût du jour. Et qu’ils soient de gauche ou de droite, les différents gouvernements admettent tous l’importance de cette discipline, partie intégrante de l’éducation de base de l’enfant.

Dans la circulaire explicitant l’instruction morale à l’école primaire (n°2011-131 du 25-8-2011), les objectifs de l’enseignement sont clairs et finalement pas si différents de ceux proposés en 1882: «À l’école, le développement moral de l’enfant doit faire l’objet d’une attention aussi soutenue que son développement intellectuel ou physique. Il s’agit avant tout d’aider chaque élève à édifier et renforcer sa conscience morale dans des situations concrètes et en référence aux valeurs communes à tout "honnête homme". Ainsi se met en place un ensemble de principes, de maximes et de règles qui guident et doivent guider l’action de chacun».

Le contenu de ces apprentissages est destiné à «doter chaque élève d’usages sociaux de références». Ainsi, si le cycle des apprentissages fondamentaux (cours préparatoire; cours élémentaire 1) se consacrera essentiellement à asseoir les valeurs de politesse, de coopération et de respect, à travers les événements de la vie quotidienne en classe, ou dans des lectures choisies, le cycle des approfondissements (cours élémentaire 2 et cours moyens) se chargera de consolider «l’exercice du jugement moral, portant sur le bien et le mal». À cet effet, l’étude de maximes morales constituera un support privilégié, précise encore la circulaire de 2011, complétée pourquoi pas, par des morales de fables, des textes, ou des mises en situation (jeux de rôle).

Les annonces successives  de Vincent Peillon quant à la morale laïque, puis de François Hollande quant à la morale publique, pourraient donc être comprises comme une volonté de suivi de cet enseignement dont le qualificatif nous renverrait, en somme, à l’application d’une morale universelle, commune à tous, quelles que soient les cultures et les religions.

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