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La fin de la presse papier, bientôt une réalité?

Écrit par David Vives, Epoch Times
28.01.2013
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  • La mutation des supports de l’information modifie nos habitudes de lecture. Nous voulons toujours plus, toujours plus vite, au détriment d’une information réfléchie mettant en perspective les évènements du quotidien. (Thomas Samson/AFP)

D’ici une génération, les journaux auront disparu. Cette prédiction, avancée par Xavier Niel, l’un des propriétaires de Free et du journal Le Monde, pourrait bien se réaliser. Aujourd’hui, partout dans le monde, la presse écrite enregistre des records de pertes. Aux États-Unis, le fameux Newsweek a tiré sa révérence. À Londres, The Guardian est en difficulté. En France, France Soir et La Tribune ont mis la clef sous la porte.

Les quotidiens sont les plus touchés, mais les magazines empruntent le même chemin. La diffusion des magazines commence à décliner: entre juin 2011 et juillet 2012, Marianne a perdu 6,3%, Télérama 1,4%, Télé7jours 2,7%, Télé Poche 6%. Partout dans le monde, la diffusion des journaux a baissé en moyenne de 17,6%.

Les journalistes, tels des membres d’équipages malchanceux, affrontent la tempête. Les licenciements économiques déciment les rédactions. 2012 a été une année riche en actualité, mais même les élections présidentielles ne font plus vendre. Malgré les JO, L’Équipe, qui règne sur la presse du monde sportif, enregistre également un recul de ses ventes de 11,5%. Le Monde chute de 14,6%, Libération de 31,8%. À La Tribune, sur les 161 journalistes composant l’équipe originelle, 26 sont restés pour travailler sur la version en ligne du journal, pour finalement terminer à 16.

Pourtant, ces journaux ont une histoire, un vécu. Certains ont traversé un demi-siècle, ont tenu en haleine des générations de lecteurs et restent aujourd’hui très populaires. Mais les habitudes ont changé: auparavant, les journaux traînaient sur les comptoirs des bistrots, se déployaient dans les trains, les kiosques étaient une escale matinale pour ceux qui partaient au travail. Les journalistes arpentaient les rues, les cafés, les congrès politiques à la recherche d’actualités, de scoops, faisant des reportages. Cette époque se termine.

Évoluer sur Internet, un pari risqué

Avec la baisse des ventes du papier et des revenus publicitaires, l’idée d’évoluer sur internet est devenue une évidence. Hélas, Internet suit ses règles et curieusement, quand le lecteur se transforme en internaute, son comportement change. Pour la presse, Internet est plus un radeau de fortune qu’un eldorado.

Aux États-Unis,The Daily de Rupert Murdoch avait tenté l’aventure internet en misant gros: 23 millions ont été dépensés pour le lancement d’une version tablette. En 18 mois, seuls 100.000 usagers ont été séduits, sur les 500.000 attendus.

L’exemple du journal anglais The Guardian est encore plus frappant. Lu par 6 millions de Britanniques, premier site d’information dans le pays – troisième au monde, The Guardian a perdu 57 millions d’euros et a dû licencier soixante-dix journalistes en 2012. En fait, les 211.000 Britanniques qui l’achètent quotidiennement financent les 6 millions d’internautes, surfant allègrement sur la vague du tout-gratuit.

L’impossibilité de transposer les journaux papiers sur Internet est bien le signe que le vent est en train de tourner. Les blogueurs montent généralement leurs sites de manière non-lucrative. Pas mal de sites se sont lancés dans le projet de faire payer l’internaute pour lui permettre d’accéder à une partie, voire l’intégralité de l’information. Mais ce modèle suffira-t-il pour permettre aux journaux de survivre?

Peu de gagnants, beaucoup de perdants

Les journaux traditionnels achetés le matin au kiosque ont été remplacés par des gratuits. Et pourtant les quotidiens gratuits, qui misent sur les wagons de lecteurs-consommateurs pour attirer les annonceurs, perdent aussi de l’argent. Depuis 2009, la crise est passée par là. Les entreprises réduisent leurs budgets publicitaires pour réaliser des économies. Au final, 20% de la presse payante a été touchée de plein fouet par ce phénomène. Pour l’instant, la reprise économique se fait toujours attendre. Les recettes publicitaires, en 2012, n’ont pas dépassé les 120 millions d’euros.

Les moteurs de recherche sont les grands gagnants. Selon Marc Feuillée, président du syndicat de la presse, ces derniers se transforment peu à peu en «méga régies publicitaires, absorbant comme des Moloch la quasi-totalité des revenus de nos annonceurs […] Entre 2000 et 2010, le chiffre d’affaires publicitaire des moteurs est passé de 0 à 1,4 milliard d’euros, celui de la presse [en ligne] de 0 à 250 millions d’euros ». Sur internet, la publicité a évolué : celle-ci est personnalisée, sélective et provient des données des internautes. Aux États-Unis, Google a engendré l’année dernière plus d’un milliard d’euros de revenus publicitaires, c’est plus que l’ensemble de la presse papier. Aujourd’hui, en France, beaucoup de journaux survivent en partie grâce aux subventions de l’État, de l’ordre de 1,2 milliard par an.

Mutation de l’information

On serait parfois tenté de remplacer le terme «information» par «buzz». Pour ceux qui ne parlent pas la langue moderne, le buzz est ce phénomène où une information retransmise à grande échelle grâce à des réseaux sociaux tels Facebook ou Twitter, devient ultra-consultée. On ne cherche plus l’information, on se rue sur tous les faits nouveaux, insolites sans en sélectionner la qualité. On comprend de moins en moins l’intérêt de ce que l’on trouve, l’important, c’est que tout le monde s’y intéresse.

Le buzz, comme le hamburger de fast-food créé en 30 secondes et consommé en autant de temps, prend donc peu à peu ses marques en lieu et place de l’information conventionnelle, patiemment collectée, vérifiée, réfléchie. Peu importe la teneur ou le message, la valeur d’un article se mesure par le nombre de clics et de mentions «J’aime». Christophe Barbier, patron de L’Express, habitué aux couvertures controversées, a eu cette phrase édifiante devant sa rédaction: «L’important, c’est de faire du buzz, même du mauvais buzz».

Le rapport annuel des médias La Croix-TNS Sofres met le doigt sur une tendance: l’opinion publique n’approuve pas le goût du sensationnel vendu par certains médias, mais reste friande de ce genre d’information très souvent relayée ou amplifiée par le buzz, qui joue alors pleinement son rôle de catalyseur.

Quel rôle pour le futur?

Et pourtant, les Français se soucient de la santé de la presse: toujours selon le rapport, 53% des Français estiment la santé de la presse «mauvaise» et 66% de ceux-ci y voient «un risque grave pour la démocratie». Malgré sa mauvaise situation, la presse incarne, dans notre pays, un objectif garant des principes de la démocratie et de la pluralité. 

Aujourd’hui, les journalistes sont de moins en moins les faiseurs d’informations de ce monde moderne. Entretenir une rédaction, faire des reportages, tout cela coûte cher. Et puis, on trouve, semble-t-il, tellement plus de choses assis derrière son écran.

La technologie permet d’accélérer la vitesse de l’information et de propager à grande échelle son contenu. Pourtant, plus on gagne du temps, moins on sait en perdre à flâner dans les colonnes des journaux et moins on en prend pour réfléchir et se remettre en question. La fiabilité de la presse reste malgré cela une valeur importante, encore présente à l’esprit du grand public, mais pour combien de temps?

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