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Trudeau, la Chine et la guerre politique

L'admiration du chef libéral pour la dictature chinoise révèle l'ampleur de l'influence du régime chinois, selon une militante

Écrit par Matthew Little, Epoch Times
18.11.2013
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  • Le chef libéral, Justin Trudeau, a déclaré admirer la dictature chinoise. (Matthew Little/Époque Times)

OTTAWA – Le chef du Parti libéral, Justin Trudeau, a accompli un rare exploit pour un dirigeant politique canadien : il a reconnu que la Chine est une dictature.

M. Trudeau a fait la manchette ces derniers jours après avoir déclaré, lors d'un événement réservé aux femmes à Toronto, qu'il admirait la gestion de la Chine «parce que leur dictature de base leur permet de tourner, en fait, leur économie sur un dix cents et de dire "il faut devenir vert au plus vite, il faut investir dans le solaire"».

M. Trudeau n'a pas spécifié comment il percevait la dictature chinoise. C'est peut-être que le chef libéral est indifférent aux atrocités extrêmes commises par le régime – soit certaines des pires violations des droits de la personne dans l'histoire – mais c'est peu probable.

Il est plus probable que M. Trudeau ne comprenne vraiment pas ce que signifie vivre sous un régime communiste, affirme Sheng Xue, une éminente militante pour la démocratie en Chine.

Mme Xue aimerait discuter avec M. Trudeau pour en apprendre davantage sur sa «fantaisie de dictature chinoise».

«Chacun d'entre nous est une victime de la dictature chinoise», a-t-elle affirmé lors d'un récent événement avec des membres de la Coalition for Human Rights in China.

Elle était entourée de représentants de différentes communautés affectées par la dictature chinoise, dont des Taïwanais, des Tibétains, des pratiquants de Falun Gong et des militants pour la démocratie. Ils voulaient raconter à M. Trudeau qu’ils ont réellement vécu sous l'emprisonnement et la torture.

He Lizhi, un pratiquant de Falun Gong, était un ingénieur civil respecté qui a été torturé et emprisonné pendant plus de trois ans en Chine pour avoir envoyé des lettres à ses collègues dénonçant la propagande du régime contre sa pratique de méditation.

«J'étais à l'article de la mort, toussant du sang», a-t-il raconté.

«Voilà ce qu'une dictature communiste signifie pour moi et des millions de prisonniers de conscience», a-t-il ajouté.

Quant à Sheng Xue, elle est arrivée au Canada peu après le massacre de la place Tiananmen, un événement qui n'est jamais survenu selon les censeurs chinois.

Elle déclare que beaucoup de politiciens occidentaux sont trompés par des voyages en Chine où ils font des visites guidées et sont traités comme de la royauté. Selon Sheng Xue, les commentaires de M. Trudeau ne peuvent être ignorés.

«Un politicien canadien important a ce genre d'admiration pour la dictature de base de la Chine. Nous voyons déjà les effets de l'influence de la Chine au Canada», déplore-t-elle.

C'est une question sur laquelle il est intéressant de se pencher étant donné la quantité de ressources dépensée par le régime chinois pour répandre son influence et livrer la guerre politique.

  • La militante pour la démocratie en Chine, Sheng Xue, déplore la u00abfantaisie de dictature chinoise» de Justin Trudeau. (Allen Zhou/Époque Times)

Guerre politique

L'ampleur de ces ressources a été abordée en détail par le Project 2049 Institute, un cercle de réflexion américain qui vise à influencer les décideurs afin qu'ils œuvrent à augmenter la sécurité en Asie d'ici la moitié du siècle.

«La guerre politique est un élément crucial de la stratégie sécuritaire et de la politique étrangère de la Chine», entame le rapport.

Son but est d'influencer les émotions, le raisonnement objectif et le comportement des gouvernements étrangers et autres afin qu'ils agissent en fonction des objectifs politico-militaires du régime.

Le Parti communiste chinois (PCC) adopte une approche multidisciplinaire à la guerre politique, souligne le rapport. Plusieurs différentes organisations et des départements jouent des rôles différents. Alors qu'historiquement le Département général politique de l'Armée populaire de libération menait le bal, actuellement un réseau d'organisations étatiques livre la guerre politique.

Tandis que cet effort se concentre sur les citoyens chinois ou Taïwan, le régime étend ses efforts à l'étranger. Lorsqu'un député fédéral reçoit un appel de l'ambassade chinoise critiquant son appui aux dissidents ouïghours, il s'agit de guerre politique. Et, selon les différentes définitions du terme, les Instituts Confucius répandus dans les universités partout au Canada sont aussi une forme de guerre politique, alors qu'ils transmettent la version des faits du régime.

L'exportation de médias anglophones contrôlés par le PCC, comme Xinhua, le China Daily et CCTV, peut aussi être considérée comme une autre plateforme pour livrer la guerre politique.

«Alors que la diplomatie ouverte cherche à influencer l'opinion d'un grand public, la guerre politique implique la manipulation calculée des stratégies, des politiques de défense et des normes internationales plus larges de l'adversaire», explique le rapport.

La guerre politique emploie souvent la persuasion coercitive pour affaiblir la volonté politique d'un adversaire, par exemple critiquer sévèrement un chef de gouvernement qui a osé rencontrer le dalaï-lama.

Le China Energy Fund Committee (CEFC) est une plateforme de guerre politique qui est active au Canada, mentionne le rapport. Le CEFC se décrit comme un «cercle de réflexion sans but lucratif et non gouvernemental qui se consacre à la diplomatie ouverte et à la recherche sur les questions stratégiques avec un accent mis sur l'énergie et la culture».

En réalité, il s'agit d'une filiale de la China Huaxin Energy Company qui possède «une mission distincte de propagande sur les questions d'énergie, de sécurité maritime et de culture», affirme le rapport.

Il s'agit d'une mission importante dans un pays comme le Canada, où les compagnies pétrolières de l'État chinois ont beaucoup investi et ont soulevé la controverse.

L'autocensure des députés sur la Chine

Alors que les Canadiens expriment ouvertement leurs opinions sur le système politique de la Chine, c'est plutôt le contraire dans les milieux politiques. Le Canada parle franchement des atrocités commises en Corée du Nord, en Syrie et dans une dizaine d'autres pays mais, sur la Chine, il est plus prudent.

Cela était bien clair lorsque le gouvernement conservateur a critiqué le commentaire de Justin Trudeau.

Paul Calandra, secrétaire parlementaire du premier ministre, a fustigé M. Trudeau pour son admiration de la dictature, mais jamais il n'a mentionné la Chine.

Cela a valu pour d'autres députés conservateurs comme Ed Komarnicki qui a déclaré : «Le chef du Parti libéral croit que les dictatures, les pays sans liberté, sans droits de la personne ou sans primauté du droit sont des pays à imiter et à mettre à l'honneur.»

Le ministre d'État (Multiculturalisme), Tim Uppal, a renchéri : «Ayant rencontré autant de Canadiens qui ont été victimes de persécution à l'étranger, je leur promets que nous allons toujours défendre et promouvoir les valeurs que les Canadiens chérissent, dont la démocratie et la liberté et non les dictatures.»

Ces commentaires auraient pu constituer les critiques les plus sévères du gouvernement canadien à l'endroit du système politique chinois – s’ils avaient mentionné la Chine.

Les remarques démontrent au moins que le gouvernement comprend bien que la Chine est un pays autoritaire qui est dépourvu des droits fondamentaux sur lesquels le Canada a été fondé et qu'il considère comme valeurs universelles.

C'est peut-être pourquoi le Canada est parmi les pays qui appellent le plus souvent au respect des droits de la personne en Chine.

En octobre dernier, le Canada a été le plus spécifique et le plus franc au sujet de l'état des droits de la personne en Chine lors de l'Examen périodique universel des Nations Unies sur les droits de l'homme en Chine. En général, les pays plus pauvres ont louangé les progrès de la Chine et les pays développés n'ont fait que des recommandations générales. Le Canada s'est démarqué par ses remarques spécifiques et franches.

Plusieurs pays africains ont demandé à la Chine de continuer à investir et à fournir de l'aide à leurs pays, un appel qui reflète un des aspects des efforts du régime chinois pour influencer l'opinion internationale.

Tel père, tel fils

D'une certaine manière, Justin Trudeau tient un discours similaire à son père.

L'ex-premier ministre Pierre-Elliott Trudeau était un grand ami du Parti communiste chinois et des régimes communistes cubain et soviétique. Il avait effectué une visite guidée en Chine dans les années 1960 et avait coécrit un livre au sujet de son expérience qui avait renforcé ces liens.

À cette époque, la Chine était aux prises avec une famine causée par l'homme qui avait provoqué la mort de dizaines de millions de personnes, alors que Mao Zedong forçait les paysans à produire de l'acier tout en confisquant les maigres récoltes.

Le jeune Trudeau ne s'est pas encore expliqué, mais devra probablement le faire avec son retour au Parlement cette semaine alors que les journalistes devraient l'épingler après la période de questions.

Version originale : Trudeau, China and Political Warfare

 

 

 

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.