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Il était une fois en Allemagne…

Écrit par Christiane Goor, Epoch Times
11.12.2013
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  • Vue romantique sur la vallée de la Weser depuis les ruines du château de Cendrillon à Polle. (Charles Mahaux)

Il existe, au-delà de l’industrieuse vallée de la Ruhr et de son inextricable nœud autoroutier, un pays de légendes, le Weserbergland, qui s’étire le long de la vallée de la Weser, dans un décor de douces collines boisées parsemées de forteresses en ruines, de vieilles cités aux ruelles étroites et aux maisons tordues par l’âge. Une invitation à retrouver les rêves de notre enfance bercée par les contes de Grimm.

La petite ville de Hameln est connue dans l’Europe entière pour avoir été le théâtre des sortilèges d’un joueur de flûte qui, en 1284, aurait débarrassé les habitants de tous les rongeurs qui s’attaquaient aux greniers à blé. En jouant de son instrument, il aurait entraîné les rats, subjugués, jusqu’à la Weser où ils se seraient noyés. Irrité de ne pas recevoir le salaire promis pour la tâche accomplie, le magicien revint le dimanche suivant, à l’heure de la messe, et emmena 130 enfants, envoûtés à leur tour par les accents étranges de son fifre. Ils disparurent dans les collines, à l’est de la ville, et personne ne les revit jamais.

Aujourd’hui, les dimanches et les mercredis, durant la saison estivale, le cœur de la cité, qui a préservé son cachet moyenâgeux, est envahi par des acteurs en costume d’époque qui font revivre cette histoire extraordinaire. Chaque jour aussi, un joueur de flûte, nettement moins diabolique que le charmeur de rats médiéval, parcourt les ruelles piétonnes du centre historique en suivant un itinéraire balisé sur les pavés par des dessins de rats.

Les frères Grimm

C’est en 1812 que Jacob et Wilhelm Grimm publient un premier recueil de plus de 200 textes puisés essentiellement dans la tradition orale populaire. À l’époque, ils sont bibliothécaires auprès de l’électeur de Hesse-Kassel, ce qui leur permet de mener à bien leurs recherches auprès des conteuses de la région. La plus prolixe semble avoir été Dorothea Viehmann, d’origine huguenote et donc française, dont les récits étaient inspirés par les contes de Charles Perrault. Le grand mérite des frères Grimm fut sans aucun doute de remanier ces textes en les transformant selon leur idéal de poésie populaire et d’ouvrir ainsi cet univers merveilleux aux jeunes et aux moins jeunes.

Rien d’étonnant, dès lors, à ce que la vallée de la Weser, avec ses forêts sombres et profondes, ses églises baroques ou gothiques, ses tours de guet, ses places de marché aux pavés inégaux bordées de maisons à colombages soit devenue le théâtre des contes de fées. Ainsi, dans la forêt teutonique de Reinhardswald, il est aisé d’imaginer Hänsel et Gretel égarés et, quand apparaît le chevalier Ritter Dietrich, l’épée au fourreau et vêtu de sa cotte de mailles, on se laisse séduire par ses talents de narrateur qui met en scène les légendes de la futaie dont il arpente les sentiers les plus secrets, à l’ombre de chênes centenaires.

De même, le conte du joueur de flûte trouve ses racines dans l’amalgame de plusieurs événements douloureux dont le souvenir s’est perpétué dans la mémoire populaire. La peste transmise par les pucerons des gros rats noirs dévasta la petite ville de Hameln au XIVe siècle. Par ailleurs, la surpopulation qui appauvrissait la ville un siècle plus tôt amena les familles à se séparer des jeunes gens, envoyés vers l’est pour y chercher fortune. D’aucuns disent même que la croisade des enfants de 1212 aurait vu disparaître 20 000 enfants prêts à libérer la Terre Sainte. Ils franchirent les montagnes jusqu’en Italie et ne revinrent jamais.

Les frères Grimm vécurent 30 ans à Kassel, qui conserve une collection très complète de leur vie et de leurs œuvres dans un musée installé dans le palais de Bellevue, demeure de Joseph, frère de Napoléon et roi de Westphalie, dont Kassel était la capitale. Ils émigrèrent ensuite en Basse-Saxe et s’installèrent pour quelques années à Göttingen dont la jeune université était déjà réputée.

Jadis ville hanséatique, la petite cité a conservé une atmosphère d’autrefois, renforcée par les pittoresques maisons à colombages et l’ancien hôtel de ville dressé sur la place du Marché. Cité estudiantine, elle est surtout le royaume très animé d’une insouciante jeunesse. Il flotte ici dans l’air une légèreté toute méditerranéenne. Même tard dans la soirée, les rues sont envahies par une foule joyeuse qui, âges et origines confondus, déambule tranquillement à pied ou en vélo, sans jamais oublier de saluer au passage la gracieuse statue de la gardeuse d’oies. Cet emblème de la ville est connu pour être la jeune fille la plus embrassée au monde, puisque la tradition veut que chaque étudiant, qui a obtenu son doctorat, l’embrasse sur la bouche.

  • Exceptionnel centre historique de Hann.Münden où abondent les maisons à colombages. (Charles Mahaux)

La route des contes de fées

C’est à Hanau-sur-le-Main, où sont nés les frères Grimm, que commence effectivement l’itinéraire qui, sur près de 600 km, va réveiller nos imaginaires endormis. Cependant, notre voyage s’en tient à la vallée de la Weser et tout commence à Hann. Münden, un petit joyau architectural édifié au confluent de deux rivières, la Werra et la Fulda qui perdent ici leur nom et deviennent la Weser. En 1247, le duc Otto Ier accorda à la ville le droit d’étape, valable pendant 600 ans, qui autorisait de taxer, voire de s’approprier, les marchandises halées le long des deux rivières qui encerclent la ville, afin de les transporter ensuite vers la mer du Nord pour son propre compte. Ce piratage légal permit à la cité de s’enrichir rapidement, attirant à elle de nombreux négociants et artisans.

Flâner à Hann

Münden, c’est plonger dans une ville toute dédiée aux XVIe et XVIIe siècles. Le centre historique a conservé près de 700 maisons à colombages, toujours habitées. Les poutres, qui se croisent ou se juxtaposent, dessinent un joli damier sur les façades, ornées par ailleurs de guirlandes et d’arabesques, de coquilles et d’éventails. De longs rubans d’inscriptions gothiques appellent la bénédiction du Seigneur sur les maisons. Cette profusion de décorations se retrouve dans la salle principale du superbe hôtel de ville baroque dont les murs sont recouverts de fresques racontant l’histoire de la ville et de son héros légendaire, le docteur Eisenbart dont on ne sait toujours pas s’il était ou non un charlatan.

«Il était une fois deux jolies jeunes filles. L’une d’elles s’appelait Raiponce et fut attachée par ses cheveux à une pierre à Trendelburg. L’autre tomba dans un sommeil profond dans le château de Sababurg. Elles furent toutes deux délivrées par le prince charmant dont elles rêvaient. Ils vécurent très heureux au cœur de la forêt de Reinhardswald…» La forteresse médiévale de Trendelburg a conservé la tour où était enfermée son héroïne. Quant au château de Sababurg, il s’est réveillé de ses ruines après les années de sommeil de la Belle au bois dormant. La tour où elle s’était endormie est aménagée en petit hôtel de charme et il s’en faut de peu pour qu’une nuit dans le lit à baldaquin se transforme d’un baiser en un véritable conte de fées. De là-haut, la vue plonge sur la sombre frondaison des arbres où vivent en semi-liberté, au cœur du plus ancien parc animalier d’Europe (1571), les animaux qui peuplaient nos forêts autrefois.

C’est sans doute à Polle, où plane encore le souvenir de Cendrillon fuyant sur le coup de minuit le bal qui illuminait le château aujourd’hui en ruines, ou encore à Bodenwerder, une dizaine de kilomètres plus loin, que la vallée de la Weser creuse son plus beau parcours. Elle dessine de larges méandres, ourlant des coteaux où les bois alternent avec les prairies et les champs de blé. Des bateaux de plaisance, des kayaks et… des familles de canards glissent paisiblement sur les eaux peu profondes. Les villages sont autant de taches colorées d’où s’élancent d’élégants clochers qui semblent veiller sur la vie qui s’agite dans les venelles bordées de maisons à colombages et sur les places de marché, dans les boutiques de souvenirs et les parcs fleuris. C’est à Bodenwerder que naquit le baron de Münchhausen, célèbre fanfaron dont personne ne voulait croire les invraisemblables récits de campagne au service des Turcs et des Russes. Sa silhouette hante encore les ruelles pavées du petit bourg. Avec lui et, plus loin encore, avec le charmeur de rats de Hameln, la route des contes devient une route de légendes qui incarnent l’âme et l’histoire intime des lieux et de leurs habitants.

   

Les musiciens de Brême

C’est à Brême que la Weser s’égare dans les eaux salées de son estuaire en mer du Nord, l’occasion de larguer les amarres pour quitter la route des contes. Un dernier rendez-vous s’impose pourtant avec les hôtes qui accueillent ici les voyageurs. Ce ne sont ni des rois ni même des personnages légendaires et fantastiques. Le rendez-vous se tient sur la place du Marché où s’alignent plusieurs édifices médiévaux dominés par l’imposante cathédrale et par l’hôtel de ville, une merveille architecturale de style gothique et Renaissance.

  • Au cœur du vieux Brême, la vaste place du Marché s’entoure des monuments les plus anciens de la ville. (Charles Mahaux)

Au centre de la place apparaît le chevalier Roland, neveu de Charlemagne, son épée Durandal à la main. Cette gigantesque statue de 10 m de haut, érigée en 1404, exprime l’obéissance du peuple à l’empereur plutôt qu’à l’archevêque régnant. Elle est d’ailleurs à Brême, puis dans plusieurs autres villes allemandes, le symbole de la liberté civique et de l’indépendance de la cité.

Devant l’hôtel de ville, une autre statue emblématique attire les regards. Brême vit en effet au rythme de ses animaux musiciens, immortalisés par le conte de Grimm, mais aussi par un bronze qui représente une pyramide formée par un âne, un chien, un chat et un coq. Ces musiciens ambulants, menacés de mort dans leur pays, espèrent bien vivre libres à Brême. On retrouve encore d’autres versions des quatre compères dans la Böttcherstrasse et dans le Schnoor.

La première, en français la rue des Tonneliers, a été initiée dans les années 1930, tel qu’elle se présente aujourd’hui, par un négociant mécène enrichi dans le commerce du café. Grâce à la complicité d’architectes talentueux, toute la ruelle aligne un ensemble harmonieux de hautes maisons en brique rouge et à pignons qui manifestent une étonnante symbiose entre le style expressionniste et l’art déco. Elles abritent des galeries d’art, des magasins luxueux et des musées. Par ailleurs, le pittoresque quartier du Schnoor, dans la vieille ville, était jadis le quartier des pêcheurs du fleuve. Les maisonnettes, étroites et basses, serrées les unes contre les autres, ont été restaurées et accueillent des restaurants et des tavernes au charme d’antan ainsi que des boutiques d’artisanat et d’antiquité.

Il règne à Brême une ambiance festive et chaleureuse, comme si le temps s’y était arrêté. Quand on se perd dans les courettes du Schnoor ou quand on savoure une bière mousseuse dans une alcôve privée sous la voûte des caves du Ratskeller, on se prend à rêver à une autre époque, celle qui a vu naître les contes de Grimm.

Infos pratiques

Pour tout renseignement sur la route des contes de fées, un site [www.deutsche-maerchenstrasse.de] ou le [www.allemagne-tourisme.com]. Le Weserbergland est un paradis pour les cyclotouristes, avec un impressionnant réseau de pistes cyclables, en ville comme à la campagne.

Les Allemands sont accueillants et on se sent tout à fait en sécurité dans les villes du circuit des contes de fées. Contrairement à ce que nous croyons, l’anglais n’est pas toujours bien parlé et cela vaut la peine de maîtriser quelques expressions basiques. L’office de tourisme de Hameln a mis au point un intéressant petit lexique bien utile quand on voyage en Allemagne.

Se loger

On trouve partout des petites auberges accueillantes et à prix doux. Une petite folie : l’hôtel du château de Sababurg [www.sababurg.de] géré avec passion par la famille Koseck depuis quatre générations. On trouve une excellente table gastronomique dans le restaurant du château.

Se nourrir

La gastronomie allemande est un peu lourde mais copieuse. Les soupes sont savoureuses et valent à elles seules un repas. À retenir : la brasserie typique où vécut Dorothea Viehmann près de Kassel; les petits bistrots authentiques du Schnoor; la taverne installée dans les caves de l’hôtel de ville de Brême, le Ratskeller, dans un décor de boiseries gothiques inoubliables, on y sert plus de 600 crus allemands. Hameln, le parc Werder attire les habitants de la vieille ville dans son biergarten, jardin aménagé autour d’une brasserie [www.hameln.de].

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.