Anglais | Chinois | Coréen | Français | Allemand | Espagnol | Japonais | Russe | Ukrainien | Hébreu | Roumain | Bulgare | Slovaque | Tchèque | Indonésien | Vietnamien
Faites un don

Au cœur du culte de puissance du Parti communiste chinois

Une critique du livre Le bon communiste de Franck N. Pieke

Écrit par Matthew Robertson, Epoch Times
22.12.2013
| A-/A+
  • Le bon communiste est une étude sur les centres de formation pour les membres du Parti communiste chinois. (Cambridge University Press)

Il est difficile de dire ce qui est le plus remarquable dans le livre de Frank N. Pieke qui a pour thème les centres de formation des cadres communistes en Chine: un délicieux aperçu d’une étude qui n’a pas vraiment porté ses fruits, ou un échec apparent dans la compréhension du sujet étudié. Quoiqu’il en soit, cet ouvrage est fascinant et mérite une attention particulière. Mais il devrait être abordé en le comparant à la démarche d’un botaniste qui peut ne pas voir la forêt derrière un arbre.

Entre 2004 et 2007, Pieke a consacré une bonne partie de son temps à voyager en Chine. Il a visité les écoles de formation du Parti communiste chinois (PCC), appelées les écoles du Parti, interviewant des membres du PCC et examinant les documents du Parti qui expliquaient la manière dont est structurée la formation des cadres, ainsi que l’objectif que souhaite atteindre le PCC.

Les cadres, bien sûr, sont des «petites vis inoxydables» qui incarnent et assurent le pouvoir du Parti communiste. Il leur est demandé de se sacrifier pour les intérêts du Parti - intellectuellement, spirituellement, moralement, ou par tout autre manière jugée nécessaire. Et pour cela, ils sont récompensés. Le fruit de leur obéissance est décrit par un excellent terme de Pieke le «culte du pouvoir»: les membres du Parti rejoignent la clique des élites au pouvoir qui est distincte et séparée des gens ordinaires.

Pieke clarifie immédiatement le fait que le culte actuel de la puissance et de l’exclusivité est différent de celui pratiqué sous l’ère maoïste. «Les expériences révolutionnaires et l’implication directes dans la vie et le travail des masses laborieuses ont disparu à jamais», écrit-il. «À la place, les cadres sont devenus une élite gouvernante qui vénère l’apprentissage par les écrits et l’éducation. Étant l’incarnation et le principal instrument assurant le rôle dirigeant du Parti dans la société, les cadres doivent être à la fois des leaders, des gestionnaires, des exemples de moralité et des fidèles serviteurs du Parti.»

La chambre d’incubation

Selon Pieke, la «perception de soi» de ces personnes «efface les frontières entre une forte individualité et la soumission totale à la volonté du Parti, entre l’exclusivité d’élite et l’anonymat discret».

Traditionnellement, la formation du Parti a été principalement conçue pour inculquer l’uniformité idéologique et l’engagement aux intérêts du PCC, souligne Pieke. Mais dans la Chine moderne, elle est également censée fournir aux cadres les «qualités de gestionnaire, les connaissances professionnelles et une compréhension vaste de la Chine et du monde que le Parti juge nécessaire pour les personnes appelées à diriger le pays vers la modernité complète et la supériorité mondiale». Ceci a bien sûr ses limites.

L’école des cadres est un bon moyen pour étudier le Parti, ce que Pieke met bien en évidence. C’est la chambre d’incubation des futurs dirigeants du Parti, ainsi qu’un site de socialisation, de récupération, et de ré endoctrinement pour les anciens apparatchiks.

«Pour la formation des cadres», écrit Pieke, «le parti-État chinois a développé des techniques disciplinaires, pédagogiques et de surveillance spécifiques qui font partie d’une stratégie plus large de «gouvernance» appliquée par le parti-État et ses dirigeants.

«Durant le processus, le parti-État crée un culte du pouvoir très spécifique qui transforme les administrateurs bureaucratiques en une élite incarnant le charisme du Parti et son idéologie... Vu sous cet angle, le Parti et son idéologie ne sont pas simplement des moyens d’exercer le pouvoir pour l’élite dirigeante, mais ils engendrent cette élite et sa faction au pouvoir.»

Des bêtes humaines

Tout ceci est correct, mais on aurait aimé avoir plus de précisions sur les conséquences de cette élite une fois créée. Au moins, nous savons que l’école des cadres est le moyen pour le PCC de réaffirmer son statut sur ses membres – à travers les études politiques et l’imposition des dogmes du Parti – ainsi que sur le reste de la population à travers le mysticisme qui entoure ses institutions.

Mais Pieke ne relie rien de tout cela aux actions concrètes des fonctionnaires du Parti dans la société, actions à l’origine de tant de souffrances en Chine aujourd’hui. On laisse le lecteur se demander pourquoi.

Le Bon communiste consacre plusieurs chapitres au milieu du livre à la description des rangs divers de la bureaucratie, des structures organisationnelles, des changements et de la modernisation du système de formation du Parti, etc.

Mais qui sont ces gens, ces cadres, et comment leur formation par le Parti est-elle liée à la création de bêtes humaines? (En nous souvenant de l’adage de Samuel Johnson: «Celui qui fait de soi une bête se débarrasse de la douleur d’être un homme», ce qui semble une formule très juste pour décrire le processus d’autodestruction et de reconstitution que le Parti communiste exige obstinément et de ses cadres.)

Le but des cadres est de servir le Parti dans le cadre que le Parti établit pour le faire. Ils paient le prix en sacrifiant leur conscience et l’indépendance de leurs esprits. Ils sont récompensés en faisant partie de la secte au pouvoir.

La plupart des écrits assez superficiels de Pieke consistent en enregistrement des faits et description, mais quand il profère ses propres points de vue, il semble parfois difficile d’en trouver le sens. Il dit, par exemple, que «la présence continue du Parti communiste chinois n’est pas le problème à surmonter par les réformes, bien au contraire, au sein du PCC la combinaison de l’adaptation au modernisme et de principes idéologiques et organisationnels léninistes est l’une des principales causes des 25 années de croissance économique et stabilité sociale».

Toutefois, Pieke oublie de mentionner que tout ceci n’aurait pas été nécessaire si le Parti n’avait pas consacré les trente premières années de son règne à détruire le pays. Et il ne demande pas quelles formes de répression inclut le terme «stabilité sociale» ni ce qu’aurait pu être la croissance en Chine sous d’autres systèmes.

La principale promesse non tenue de l’ouvrage de Pieke est qu’il ne nous aide pas vraiment à comprendre ce qu’est un fonctionnaire du PCC, que nous connaissons le plus souvent à travers les médias et leurs «sincères» déclarations bien filtrées. Pour les Chinois qui doivent leur être soumis, les fonctionnaires du Parti peuvent être cruels et dangereux. Dans certaines villes, les fonctionnaires du Parti et la mafia sont indiscernables. Dans son ensemble, le Parti ressemble une organisation criminelle.

Ce qui se passe réellement

Les centres de formation des fonctionnaires où Pieke a passé son temps sont bien sûr censés montrer le côté moderne et sophistiqué du PCC. Mais dans le contexte de ce qui se passe vraiment en Chine, quelle est l’ampleur de ce qui est camouflé?

Prenons par exemple, Tu Yuangao, un cuisinier de 24 ans originaire de la province du Hubei, qui a été tué en 2009 après avoir demandé son salaire en menaçant de faire savoir que l’hôtel où il travaillait était un lieu de prostitution et de trafic de drogue. Il a terminé avec un clou enfoncé dans la tête, ses organes génitaux écrasés et il a été jeté du balcon. La police n’a pas rendu son corps.

Une foule s’est rapidement formée pour protester violement. On a appris dans les reportages que le chef de police et la femme du juge principal local – des instruments du Parti, qu’ils soient ses membres ou non – avaient des intérêts dans l’hôtel.

Un autre cas bien connu est celui de Li Shufen, âgée de 16 ans, qui avait été violée et puis noyée par le fils d’un fonctionnaire du bureau de la sécurité publique locale et son ami. Lorsque les autorités locales du Parti ont tenté de dissimuler l’affaire, les gens se sont révoltés. Récemment, un homme du nom de Xue Jinbo du village de Wukan, bien connu pour ses manifestations anticorruption en 2011, a été torturé et tué en garde à vue, alors qu’il luttait pour les droits d’autres villageois.

Ici nous n’évoquons même pas la suppression des avocats des droits civils, des journalistes et d’autres militants, ni la persécution systématique de la pratique spirituelle du Falun Gong ou de divers groupes religieux, qui se déroule avec une brutalité extrême à travers la Chine.

Toutes ces répressions et persécutions sont initiées et appliquées par les cadres du Parti qui passent sans doute tranquillement une partie de leur temps dans les établissements confortables faisant l’objet de l’étude de Pieke.

Il est nécessaire de donner une explication de l’état d’esprit qui permet l’existence de ces faits. On pourrait penser que les écoles des fonctionnaires seraient un endroit où on pourrait commencer à trouver une réponse. Malheureusement, Pieke n’essaie pas de la donner.

Version en anglais: Inside the Power Cult of the Chinese Communist Party

Epoch Times est publié en 21 langues et dans 35 pays.

 

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.