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Le calvaire sans fin à Alep

Écrit par Dr. César Chelala
29.12.2013
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  • Un jeune écolier se tient à l’extérieur de son établissement, ses livres en main ce 22 décembre. Son école située au nord de la ville de Marea à la périphérie d’Alep en Syrie, vient de subir des attaques aériennes des forces gouvernementales syriennes. Selon un observateur, plusieurs dizaines de personnes ont été tuées les huit jours des raids. (Mohammed Al-Khatieb/AFP/Getty Images)

Dans son roman Les Asiatiques, l’auteur américain Frederic Prokosch écrivait: «Alep était une grande et terrifiante ville». Aujourd’hui cette ville syrienne lui donne totalement raison.

Je regarde la photo d’un homme en pleur. Il tient dans ses bras le corps ensanglanté de son fils au milieu des décombres. L’homme est à genoux, ses deux jambes repliées et parallèles rendent cette poignante scène encore plus pathétique. Sur ses épaules, cet homme porte toute la douleur du monde.

Sur une autre photo, on peut voir un immeuble d’habitation presque totalement détruit par des bombes gouvernementales; c’est un scénario raconté par un enfant de dix ans.

«Nous nous étions tous regroupés dans une arrière-salle de la maison. On venait de nous demander de quitter la maison, la majorité de nos voisins étant déjà partis. Ma grand-mère qui a pris nos informateurs pour des intrus s’en est prise à eux, ‘comment voulez-vous que j’abandonne mon mari handicapé. Hein?!’ Réalisant sans doute qu’ils pourraient bien gagner la bataille, mais perdraient la guerre contre la détermination de ma grand-mère, les combattants sont sortis de chez nous. Du coup, nous ne pouvions plus partir même si nous le voulions.»

«Je voyais grand-père dans sa chaise roulante, hagard, le regard perdu dans le vide, il ne comprenait pas ce qui se passait. Il fait signe à ma sœur pour qu’elle lui apporte du lait. Cette dernière secoue sa tête et c’est mon grand frère qui intervient et dit au grand-père ‘je t’apporte ton lait dans quelques instants grand-père’»

Entre temps, le bruit devenait assourdissant. La façade de notre maison était pratiquement détruite et le plâtre des murs tombait en morceaux. Mon père étant introuvable, c’est ma mère qui est devenue malgré elle, chef de famille. Puisqu’elle n’a aucune expérience dans cet exercice, elle avait du mal à gérer mon frère de 11 ans, et mes deux sœurs de quatre et deux ans. J’avais dix ans et j’essayais d’apporter mon aide. Sans l’aide de mon frère j’aurais été totalement inutile.

Alors que j’essayais de comprendre ce qui se passait, nous avons entendu un bruit fracassant. J’ai regardé à travers une porte vers l’avant de la maison. Une partie du plafond s’était écroulée, écrasant complètement le piano sur lequel mon frère jouait après l’école.

«J’ai pensé ‘aux jours normaux’ et me suis dit que je n’en connaitrais surement plus jamais. Les matins où nous disions au revoir sur le seuil de la porte, à mon père qui partait au travail, à mon frère qui allait à l’école. Ces jours où nous nous retrouvions tous à la maison pour le déjeuner, cuisiné avec amour par ma mère et ma grand-mère. Il n’y’avait que grand-père qui était absent, pas physiquement, mais mentalement puisqu’il était dans son propre monde.»

«Au bout de quelques jours, j’ai vu à quel point le caractère naturellement doux de ma mère a complètement changé. Femme toujours de bonne humeur et optimiste, elle qui n’hésitait jamais à chantonner ou fredonner les chansons en arabe, est devenue méconnaissable. Autrefois fière et soignée, elle s’est laissée aller jusqu’à parler crûment à ses enfant et même à sa propre mère, chose impensable auparavant».

«Alors que j’étais dans mes pensées, nous avons entendu des pas de quelqu’un courir vers la maison, puis un gros boom sur la porte d’entrée. Nous étions tous tétanisés de peur, sauf mon frère qui s’est rué vers la porte qu’il à entr’ouverte devant un jeune homme totalement couvert de sang, qui hurlait de douleur. Quelques secondes plus tard, l’homme s’évanoui et s’affale à terre. Mon frère a immédiatement refermé la porte, avant de revenir dans l’arrière salle ou nous étions tous assis terrifiés».

Il nous a décrit ce qu’il venait de voir, mais ma mère ne voulait rien faire pour le jeune homme agonisant. Grand-mère par contre voulait le secourir. Elle a commencé par demander avant de crier à ma mère qu’elles ne pouvaient pas laisser quelqu’un mourir tout seul comme un animal devant sa porte. Je me suis mis à pleurer.

«Au final, se rendant compte que grand mère ne se calmait pas, ma mère est allée avec mon frère à la porte et ils ont fait rentrer le jeune blessé. Avec une serviette humide, grand-mère a nettoyé l’homme. Ce dernier agonisant, ouvrit lentement les yeux, terrifié.»

Il s’agit ici d’une fiction, mais inspirée de fait réels. Je suis très peiné de voir la situation à Alep aujourd’hui. Deux de mes grand-parents ont fuit cette ville malheureuse et ravagée et sont venus s’installer avec moi aux Etats-Unis.

Dr. Cesar Chelala est Co-lauréat du prix Overseas Press Club of America Award.

Version en anglais: Aleppo’s Unending Suffering

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