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L’art de s’asseoir, la chaise dans tous ses états

Écrit par Edwige Ansah, Epoch Times
18.04.2013
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  • La Love par David Savage, designer d’origine anglaise. (wikipedia)

Le musée Dapper offre actuellement l’occasion de découvrir l’exposition «S’asseoir, se coucher et rêver», vu et revu par les designers africains. C’est ainsi tout un monde fortement imprégné de tradition et de modernité qui s’offre à nous. C’est aussi l’occasion de mener une réflexion sur les objets qui accompagnent notre quotidien et de les regarder d’une toute autre manière.

Certains de ces objets ont été choisis pour leur fonctionnalité, d’autres pour leur beauté, d’autres encore ont répondu à un coup de cœur ou à un effet de mode. Parmi ces objets, la chaise est un concept relativement intéressant à étudier.

D’un simple objet du quotidien, elle devient le reflet des besoins de la société

La chaise peut être décrite comme l’objet qui nous permet la station assise: c’est un «siège à dossier sans bras» nous précise le Larousse. Présentée de cette manière, elle semble dénuée de toute dimension conceptuelle, et pourtant… Elle nous permet aussi ces instants de pause, de labeur, de réflexion ou de création. Il nous devient impossible d’imaginer sa disparition tant elle a su occuper sa place.

  • La chaise selon Ron Arad, designer israélien. (wikipedia)

Dans nos sociétés occidentales, c’est essentiellement à la période de la Renaissance qu’elle s’installe réellement dans les maisons des plus aisés. Elle vient ainsi remplacer le tabouret, le banc ou le coffre banc du Moyen Âge. Elle a certes évolué au cours des siècles suivants, souvent pour répondre à des besoins sociaux ou religieux. Aussi parlera-t-on de la chaise à sel, un coffre-banc avec dossier, qui permettait de dissimuler le sel et ne pas acquitter la gabelle sur le sel; du prie-Dieu qui permettait de s’agenouiller pour prier dans un confort relatif. On a aussi pu voir autour des tables de jeux la chaise ponteuse avec un accoudoir où se trouvaient des jetons pour miser…

Ces objets étaient le plus souvent fabriqués par des artisans, artistes créateurs, qui permettaient à ces éléments de la vie quotidienne de refléter le niveau social de leurs propriétaires: à travers le matériau de fabrication, la richesse de la décoration que l’on retrouvait le plus souvent au niveau des pieds ou du dossier.

C’est à la fin du XIXe siècle et plus précisément en 1859 que sera fabriqué l’ancêtre en quelque sorte de nos chaises modernes. La maison Thonet, une entreprise autrichienne, élabore sa chaise n°14, la fameuse chaise bistrot que nous connaissons tous. Cette chaise, considérée comme un produit révolutionnaire à l’époque car elle est livrée en kit, sera fabriquée à plus de quarante millions d’exemplaires. Cette révolution verra le développement de la production industrielle du meuble.

Pour autant, au cours du XXe siècle, des créateurs ou designers vont développer une autre vision qui va, tout en partant de l’élément matériel et fonctionnel, amener à conceptualiser l’art de s’asseoir jusqu’à l’éloigner même de sa fonction, mais pour aussi y revenir et nous apprendre à développer une autre manière d’envisager l’art de s’asseoir.

Quand le designer donne libre cours à son imagination, la chaise devient un sujet placé à l’interface de l’idée et de la matière

Les termes design et designer font leur apparition dans la langue française respectivement à la fin des années 1950 et 1960. Différent de la création artistique ou de la fabrication industrielle, le design fait surtout référence à la personne, le designer, qui va transmettre sa conception d’un objet, certains disent qu’il se situe «au croisement d’un dessein (d’un projet) et d’un dessin (d’une forme)» (1). Ce projet se matérialise alors par un ensemble de courants théoriques. Le designer est le reflet de son époque, il la précède, la renie: mais son idée première sera parfois d’établir une rupture et ainsi de produire un nouveau moule, ou concept, qui inspirera peut-être la production industrielle.

  • Balthazar Faye - Siège empilable Accolade, 1997 - Contreplaqué d’aviation moulé à froid sous vide d’air et cordes h.: 77 cm. (Collection particulière © Archives Musée DAPPER ET Hughes Dubois)

En partant de l’architecture d’un objet, le designer veut souvent rompre avec la fonctionnalité. Certains pourraient même avancer que le design est « le lieu d'expression privilégié de ce qui fait débat et même conflit»(1). Ainsi du rationalisme qui met en lien l’outil et la forme, au fonctionnalisme qui lie la forme à la fonction, des théories qui n’ont aucun lien avec l’objet ont conduit à la création purement abstraite qui prône la communication, ou la connexion, comme seuls supports au projet du designer.

Souvent considéré comme un temps en dehors de toute production,  le design tient pour autant une place incontournable dans ce processus, car c’est souvent le lieu «d’observation» de ce type de production.

Dans ce monde où l’art de s’asseoir navigue entre fonctionnalité, rationalisme, mais aussi conception pure sur l’art de se poser dans l’espace, les designers ont souvent décliné sur des matériaux parfois les plus inattendus, ces prototypes qui sont  devenus des pièces de collection, reflets d’une époque, donc d’un des états d’esprit qui flottaient dans l’air au moment de leur conception, quand le designer leur a enfin donné leur forme finale.


L’exposition Design en Afrique, S’asseoir, se coucher et rêver

Entre forme et fonction, mais aussi conception du confort ou du prestige, cette exposition consacrée aux designers africains nous permet de renouer avec le symbolisme de l’objet, et de revisiter la vie quotidienne de l’Afrique subsaharienne. C’est parfois la dérision qui se retrouve dans l’utilisation détournée et recyclée des matériaux du quotidien. Dérision qui bien souvent reste la seule manière de pouvoir se faire connaître ou reconnaître, tout en parlant des problématiques de fond que connaît cette région. Dans ce contexte, ces designers renouent avec la philosophie du design en tant que «le lieu d'expression privilégié de ce qui fait débat et même conflit»(1).


(1) Christine COLIN, «design», Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 6 avril 2013. URL: www.universalis.fr/encyclopedie/design

Infos pratiques :

Musée Dapper, 35 bis Rue Paul-Valéry, 75016 Paris

Ouvert de 11h à 19h. Fermé le mardi et le jeudi

Tél.: 01 45 00 91 75

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