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Voyage à travers les bronzes de la Chine Antique

Écrit par Michal Bleibtreu Neeman, Epoche Times
20.04.2013
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  • Vase pour boissons fermentées hu. Bronze avec incrustations de malachite et de turquoise, H. 19 cm. Dynastie des Zhou occidentaux, période des Royaumes combattants, Ve-IVe siècles avant notre ère. (Vincent Girier Dufournier©Droits reservés)

Un voyage extraordinaire à travers la Chine mythique, ses changements de pouvoir, ses rites, ses temps de guerre et ses temps de paix, est proposé aux visiteurs du musée Guimet via une rare collection de bronzes archaïques.

Plus d’une centaine d’entre eux, issus de la collection Meiyintang dont les plus anciens datent du IIe millénaire avant notre ère, sont présentés pour la première fois au public français.

Une petite introduction avant de pénétrer la Chine mythique

Le parcours commence par deux reproductions de tableaux du XVIIIe siècle représentant des lettrés en train de classifier les bronzes archaïques. Des pièces splendides et emblématiques de petits formats qui correspondent aux collections des lettrés.

Puis comme une mise en abîme, un album du XVIIIe, appartenant au musée, l’ouvrage des lettrés vu dans les tableaux, détaillant la collection impériale des bronzes.

«C’est l’écriture de l’histoire chinoise qui s’est faite à travers les bronzes depuis l’antiquité», commente Marie-Catherine Rey conservateur en chef  section Chine du musée Guimet. «C’est un peu ce qu’on appelle dans l’occident le Regalia, les pièces les plus précieuses d’une royauté qui se transmettent de dynastie en dynastie. Ce sont les objets fondateurs d’une histoire, d’une dynastie, d’un pouvoir…»

Le parcours thématique, respectant la chronologie, nous propose plusieurs rencontres: le banquet, la monumentalité, le bestiaire, guerre et paix ou encore l’humanisme. Chaque époque et son esthétique, chaque dynastie et ses mœurs codifiés.

«Le visiteur n’a pas besoin de connaître l’histoire de la Chine pour apprécier ses œuvres», nous promet Marie-Catherine Rey.

«Des formes qui échappent à la simple fonction de contenant, à la simple représentation concrète.»

Si nous avons l’habitude d’associer l’âge du bronze aux armes et donc aux guerres, l’exposition nous révèle un tout autre aspect de ce métal.

  • Poids utilisé pour lester les nattes déroulées au sol. Combat de tigres et d’ours, bronze avec incrustations d’or, d’argent, d’agate et de turquoise, H. 5,8 cm. Dynastie des Han occidentaux, IIIe siècle avant notre ère-Ier siècle de notre ère. (Vincent Girier Dufournier©Droits reservés)

«En Chine, très tôt, les bronzes servaient à faire des objets rituels de sacrifice pour le ciel, la notion de rite est un héritage des néolithiques. Nous savons aujourd’hui que le néolithique florissait partout en Chine dans toutes les régions. Car on disait toujours que la civilisation chinoise a commencé dans le fleuve jaune, dans la plaine centrale, mais avec toutes ces découvertes, on sait qu’il y a eu une force d’assimilation», nous dit Huel-Chung Tsao, chargée d’études au musée Guimet.

Marie-Catherine Rey appuie les propos de sa collègue par l’exemple du hibou décorant le bronze présenté sur l’affiche de l’exposition: «On a déjà des hiboux, des oiseaux et des béliers dans les modèles céramiques néolithiques et c’est repris ensuite. C’est vraiment cet imaginaire qui permet de communiquer avec la nature et avec le ciel, ce vocabulaire esthétique qui permet de s’intégrer dans une continuité entre l’homme, la nature et le ciel.»

Le bestiaire décorant les bronzes est souvent fantastique, des animaux imaginaires sont décrits avec la plus grande précision.

«Ce qui est important de noter et qui est à la fois déroutant et en même temps séduisant, c’est que dans les détails, on est extrêmement précis, mais l’association est invraisemblable. Ce mélange est très caractéristique des pièces chinoises.»

Les bronzes sont posés dans les vitrines de sorte que le visiteur puisse les observer des quatre cotés – la meilleure façon d’apprécier les masques composés des deux profils.

«Il y a toujours la recherche d’une organisation symétrique, il y a l’axe central qui représente le milieu du masque et vous avez ces deux yeux qui sont repartis mais en fait, on fait le tour de la pièce et on a une association de motifs à plat. Par exemple en regardant le profil, on a un dragon ou un serpent avec un œil et en même temps ça va composer un masque aussi», explique Mme Rey.

Héritage et démarquage

La période de transition entre les Shang et les Zhou n’est pas toujours facile à distinguer car ce sont les mêmes artisans. Et les descendants de Shang continuent avec le style de leurs ancêtres, explique Mme Tsao. Le changement des dynasties entraîne finalement un changement esthétique car «il faut hériter et se démarquer à la fois, toujours conserver ce dont on a hérité et en même temps savoir marquer. On ne fait pas table rase. Il faut conserver ce qui donne la légitimité et ajouter quelque chose de plus», complète Marie-Catherine Rey.

  • Vase pour boissons fermentées you. Bronze, H. 29 cm. Fin de la dynastie Shang-début de la dynastie des Zhou occidentaux, XIe siècle avant notre ère. (Vincent Girier Dufournier©Droits reservés)

La dynastie Zhou dira donc que les Shang ont abusé de l’alcool et sont devenu des tyrans. Le ciel leur enlève le pouvoir et donnera le mandat aux Zhou. Les rites changent et les coupes de boissons fermentées cèderont alors la place à des vases à céréales et des vases à eau.

Dans la période Zhou, une vraie industrie se développe, des ateliers spécialisés apparaissent pour préparer les dessins, le moulage et le polissage, chacun ayant son rôle précis dans le processus de la fabrication. La grande industrie est centralisée dans la plaine centrale mais des fabrications locales existent partout.

 

«Il y a toute une organisation qui commence déjà avec les Shang, qui ont déplacé plusieurs fois la capitale pour se rapprocher de la matière première», explique Mme Tsao.

Une autre caractéristique de l’apogée de la période Anyang est le décor à trois niveaux: «Un fond, le décor principal, et sur le décor principal, vous avez encore un troisième décor», nous dit-elle encore.

Mais selon elle, l’apogée des bronzes chinois date «de la période de la capitale Anyang, entre les XIe et XIIIe siècle (le hiboux de l’affiche).

Comme ils servaient pour des rites, il y a quelque chose dans ces pièces qui relève du sacré. L’objet était chargé de transmettre les vœux auprès du ciel. On sent cette force mystérieuse. Dans les périodes plus tardives, les objets deviennent des objets de luxe chez les princes pour montrer leur richesse et perdent leur côté religieux. C’est comme les pièces du Moyen Age en Europe par rapport au XVIIIe siècle. Dans ces pièces de culte du Moyen Age en Europe, on sent une force interne qui se dégage. C’est pareil pour l’époque Anyang, on sent quelque chose de plus au-delà d’un objet bien sculpté».

L’évolution des formes à travers les siècles

À partir de la période dite des Zhou occidentaux, la forme devient de plus en plus simple et géométrique. La symétrie change et devient circulaire. Des serpents et des dragons, il ne reste que des ondes et des lignes.

Le début de Zhou est aussi caractérisé par la monumentalité qui se manifeste par l’organisation dans l’espace, y compris dans les objets de petite taille, dans la fabrication «industrielle», la notion de piédestal ou de surélévation, mais surtout dans l’évocation de l’architectonique. «Les pièces occupent l’espace mais la forme générale est assez épurée et on peut voir des quatre côtés», explique la chargée d’étude du musée.

C’est alors que la musique devient un signe de noblesse, «un symbole plus fort encore que les armes». Les Zhou occidentaux commencent à codifier les rites en introduisant les cloches de tailles différentes qui produisent des notes. C’est la musique qui distingue les nobles des non-civilisés.

  • Coffret posé sur quatre roues. Décor d’animaux stylisés, de tigres et d’oiseaux. Bronze, H. 11 cm. Dynastie des Zhou orientaux, période des Printemps et Automnes, VIIIe siècle avant notre ère. (Vincent Girier Dufournier©Droits reservés)

Même dans les objets fonctionnels comme les parties des chars, on emploie tout le vocabulaire de l’imaginaire et les instruments de guerres deviennent alors objets de parade. Les objets pour les femmes sont plus raffinés: des petites boîtes incrustées de matières précieuses, des jades, des pièces fines et féminines.

Vers le VIe siècle, l’influence des steppes est remarquable. Les scènes de chasse occupent la décoration des pièces. Un joli exemple est la petite boîte décorée par  quatre petits oiseaux mobiles qui peuvent changer de direction. Par cette même influence, vers le IVe siècle, l’argent et l’or sont incrustés dans les bronzes.

La matrice est introduite, on peut reproduire le même motif à volonté, alors qu’avant, chaque moule était une pièce unique car il devait être cassé pour pouvoir libérer le bronze.

Les bronzes confirment les écrits de l’historien du IIe siècle av. J.-C., Sima Qian.

«Dès le premier empereur, les Chinois sont conscients du symbole des bronzes. Au XIIe siècle, l’empereur de Chine a déjà une collection et demande aux lettrés de tout répertorier. Les lettrés ont créé une terminologie pour les différentes formes, donc à partir du XIIe siècle, il y a déjà un catalogue plus ou moins scientifique. Dans le musée de Taipei, on peut trouver certains objets qui apparaissent dans ce catalogue».

Les fouilles archéologiques ont changé les idées reçues même des Chinois, nous dit Mme Tsao. «On peut trouver des ressemblances avec les poteries mésopotamiennes, mais ce qui est typiquement chinois, c’est l’écriture, qui a traversé tous les siècles, le plus souvent sur les bronzes. Les bronzes ont authentifié les écrits de l’historien Sima Qian (141 av. J.-C.-86 av. J.-C.), longtemps remis en question, qui a écrit l’histoire de la Chine depuis sa création. Il nous manque encore les preuves de l’existence de la première dynastie mythique de Xia de la période néolithique, avant l’existence de l’écriture».

Infos pratiques

Trésors de la Chine ancienne - Bronzes rituels de la collection Meiyitang

Du 13 mars au 10 juin au Musée des arts asiatiques Guimet 6, place d’Iéna - 75116 Paris

Tél.: 01 56 52 53 45

Métro: lignes 6 et 9

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