Jean-Pierre Coallier, célèbre animateur âgé aujourd’hui de 75 ans, rêvait d’une radio qui ne diffuserait presque exclusivement que de la musique classique. Il a attendu 23 ans avant que son projet se réalise, pendant qu’en arrière-plan l’histoire de la musique classique au Québec commençait à se dessiner. En 1998, il en faisait partie avec le lancement de Radio-Classique, CJPX 99,5 FM.

Plus qu’une radio d’ambiance, Radio-Classique diffuse de la musique classique 24 heures sur 24,  7 jours sur 7. À Montréal, la chaîne diffuse depuis l'île Notre-Dame, dans le parc Jean-Drapeau. Son antenne est située au sommet du Mont-Royal. Elle a aussi un petit frère : Radio-Classique Québec 92,7 (CJSQ-FM). La radio de Montréal a une portée hebdomadaire moyenne de 471 630 auditeurs. La station dépasse de plusieurs auditeurs Espace musique de Radio-Canada dans plusieurs catégories (Radio Printemps 2012 – Sondages BBM).

Radio-Classique n’a jamais pu profiter d’une subvention. La station est autonome grâce à ses annonces commerciales. M. Coallier est non seulement animateur depuis 57 ans (et depuis 15 ans à Radio-Classique), mais il œuvre à tous les paliers de la station, autant sur le plan administratif, technique que commercial.

De refus en refus

«Le premier refus afin d’obtenir un permis pour propulser mon projet de radio a lieu en 1975. Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) avait dit “non”. On est retourné en 1980, le CRTC disait encore “non”. En 1985, toujours “non”. En 1995, il n’a pas dit “oui”, mais j’avais trois stations à l’époque. Ce que j’ai fait, c’est que j’ai dit au CRTC : “Ne me donnez pas de fréquence, je vais prendre une des miennes, je vais l’amener à Montréal.” C’était CIME FM, je l’ai envoyée à 99,5 FM et c’est là-dessus que j’ai mis ma station de musique classique. On m’a juste donné la permission de diffuser de la musique classique. À l’époque, c’était Radio-Canada qui voulait avoir la dernière fréquence majeure disponible qui était 95,1 FM. Je me disais que, contre Radio-Canada, je n’avais pas beaucoup de chance de gagner», déballe M. Coallier.

Le CRTC est un organisme public indépendant qui règlemente et supervise la radiodiffusion et les télécommunications canadiennes.

Révolution tranquille… et classique

«Dans le milieu des années 1960, les stations FM du temps avaient de la musique d’ascenseur, de la musique pseudoclassique, ils ne se servaient pas de leur station FM commercialement. Avec CFGL Laval, en 1968, nous avons utilisé le FM pour faire passer de la musique populaire, pour vendre des commerciaux, pour faire des nouvelles, pour faire du bla-bla-bla. C’est avec l’arrivée de CFGL Laval que le FM s’est démocratisé davantage. Du côté de Radio-Canada, il y avait sur la station FM et AM de la musique classique. C’est de cette façon-là que la musique classique était distribuée dans les années 1960-1970», sort Jean-Pierre Coallier de sa mémoire phénoménale.

«À la fin des années 1970-début 1980, c’était à l’époque où M. Charles Dutoit [chef d'orchestre suisse ayant occupé le poste de directeur musical de l'Orchestre symphonique de Montréal de 1977 à 2002] arrivait à Montréal, un monsieur qui a fait beaucoup pour l’OSM. Il y a eu notamment la naissance de l'Orchestre Métropolitain de Montréal, l’ensemble Arion, etc. La musique classique est devenue un peu plus populaire. Il y a eu une effervescence à ce moment. Quand on est arrivé avec notre station classique en 1998, il y avait le FM de Radio-Canada [appelé La chaîne culturelle] et en 2004 Espace musique. On avait donc le champ libre pour offrir que du classique. La chaîne CBC Radio 2, dans le milieu anglophone, le fait entre 10 h le matin et 14 h l’après-midi», poursuit le légendaire animateur québécois.

Jean-Pierre Coallier a su faire apprécier la musique classique à ses quatre enfants, dont le plus connu, Marc-André Coallier. Son secret? «Tout simplement, je faisais écouter de la musique classique à mes enfants pendant leur jeunesse. Ils pourraient vous dirent qu’ils se cachaient sous leur lit le dimanche matin quand je leur faisais entendre à tue-tête Toccate et Fugue de Jean-Sébastien Bach, joué par l’organiste Marie-Claire Alain», raconte-t-il avec plaisir.