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La Constitution hongroise prise dans les luttes politiques de l’UE

Écrit par Kremena Krumova, Epoch Times
15.05.2013
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  • Le président de la Commission européenne José-Manuel Barroso (D) et le Premier ministre hongrois Viktor Orban arrivent pour une séance de travail au siège de l’Union européenne à Bruxelles le 24 janvier 2012. Orban cherche une issue avec Bruxelles au sujet des nouvelles lois hongroises controversées qui ont déclenché une action en justice de l’UE. (Georges Gobet/AFP/Getty Images)

Fin avril, le torchon politique a brûlé entre Bruxelles et Budapest, l’Union européenne (l’UE) ayant menacé d’engager une procédure de contrôle qui aboutirait à des sanctions contre le gouvernement hongrois. Les critiques contre la modification de la constitution hongroise sont toutefois attisées par les dirigeants de la gauche libérale de l’UE. Pour certains membres du Parlement européen, plus que les droits de la population hongroise, ce sont les intérêts politiques de la gauche européenne qui motivent la condamnation de la Hongrie.

Le 11 mars dernier, le gouvernement de centre-droit du Premier ministre hongrois Viktor Orban a adopté une série de modifications à sa constitution. Les organisations européennes et américaines des droits de l’Homme ont accusé ces changements de réduire le mandat de la Cour constitutionnelle, de criminaliser les sans-abri et d’opprimer la liberté des religions et des médias.

Dans une déclaration datée du 25 avril, l’assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE) a exprimé ses inquiétudes au sujet «de l’érosion des garanties et des équilibres démocratiques».

Plusieurs députés hongrois, soutenus par des militants politiques, revendiquent le droit de la Hongrie à déterminer sa propre constitution, indépendamment de l’UE. Les sondages montrent d’ailleurs que Orban a le soutien de sa population. Pour certains, les critiques contre le gouvernement hongrois de centre-droit servent les intérêts politiques des dirigeants de l’UE.

L’eurodéputé hongrois Gyorgy Schopflin estime que «la gauche européenne ne sait vraiment pas quoi faire d’un pays qui a élu un gouvernement de centre-droit avec une majorité des deux tiers». Schopflin, membre du Fidesz, le parti au pouvoir de M. Orban, est également membre du parti de centre-droit populaire européen (PPE).

«La gauche européenne a cruellement besoin d’un bouc émissaire pour ses propres échecs», martèle-t-il. «Du coup, avoir un gouvernement de centre-droit dans un petit pays obscur comme la Hongrie est extrêmement utile pour trouver exactement l’évasion que la gauche cherche».

Le centre-gauche supporte mal la pression de se plier aux mesures d’austérité, étant traditionnellement plus libre avec ses dépenses que le centre-droit. L’UE voit donc son équilibre des pouvoirs pencher vers la droite, avec des gouvernements de centre-droit au pouvoir en Allemagne, en Grande-Bretagne, en Espagne et en Pologne. Schopflin assure que Viviane Reding, commissaire européenne à la justice, aux droits fondamentaux et à la citoyenneté, a un enjeu politique précis en la matière.

Le Parlement européen a organisé un débat en plénière sur la Hongrie le 17 avril. Au cours du débat, Viviane Reding a déclaré que la Commission européenne (CE) étudiait les modifications constitutionnelles opérées par la Hongrie et rendrait un avis mi-juin.

«Viviane Reding aspire à la prochaine présidence de la CE et comme elle est du centre-droit, elle fait des gestes d’ouverture vers le centre-gauche afin d’obtenir leurs voix», certifie Schopflin. «À mon avis, le soi-disant problème avec la Hongrie n’est qu’un jeu politique orchestré par la gauche».

Briser «la loi non écrite» de l’UE

Selon Andreas Mölzer, un député indépendant autrichien, le centre-gauche qui critique le Premier ministre Orban, est un peu hypocrite. Dans un courriel, Andreas Mölzer explique que «Orban a fait ce que tout politicien ferait, si son parti disposait d’une majorité des deux tiers au Parlement». Avant de poser la question: «Ne pensez-vous pas que dans une situation identique, les politiciens de gauche essaieraient de changer leur pays de la même manière selon leurs aspirations?»

La vraie cause de la colère de l’UE, selon Mölzer, est que Orban a violé une règle non écrite de l’Union européenne, «cette règle non écrite stipule qu’il n’y a pas de place pour les intérêts nationaux ou les valeurs traditionnelles. Aujourd’hui au sein de l’UE, l’État national est secondaire» et doit céder sa place aux intérêts généraux du continent. Et Molzer de poursuivre, «en engageant des réformes dans son pays, M. Orban a rompu avec les principes de l’UE».

Pour Gellert Rajcsanyi, rédacteur en chef adjoint du site web d’informations politiques hongroises Mandiner.hu, Orban a violé les valeurs des libéraux de gauche et non les valeurs européennes. Répondant par courriel à Epoch Times, Rajcsanyi déclare: «je ne dirais pas que les changements juridiques en Hongrie sont complètement à l’opposé des ‘valeurs européennes’». Avant de demander «quelles sont précisément les valeurs européennes?»: «Je dirais que, certains paragraphes ou ‘valeurs’ de la nouvelle législation ne concordent pas avec le courant international des libéraux de gauche, mais plutôt une vision conservatrice du monde», a t’il répondu.

Molzer a rappelé que l’année dernière, lorsque le Premier ministre socialiste Roumain, Victor Ponta avait entrepris de renverser la Constitution de son pays, l’UE avait gardé le silence, surtout l’aile politique de gauche.

«L’hypocrisie du politiquement correct dans l’UE est criante: les dirigeants postcommunistes comme Ponta ont carte blanche pour faire ce qu’ils veulent, sans aucune conséquence. Si l’UE n’applique pas la même loi à tous, elle perdra toute crédibilité».

Le groupe de réflexion du Conseil Européen des Relations Étrangères (CEFR) révèle dans le Guardian du 24 avril, que la confiance dans l’Union européenne est en déclin. Cette étude s’appuie sur les votes survenus en Allemagne, en France, en Angleterre, en Italie, en Espagne et en Pologne. L’Espagne, l’Allemagne et l’Italie, pays historiquement pro-européens, ont respectivement 52%, 59% et 72% de leurs électeurs qui doutent de l’UE.

En Hongrie, c’est un sentiment pro-européen qui domine, la population apprécie les programmes éducatifs de l’UE, la possibilité de voyager sans visa entre les pays membres et bien d’autres avantages. Pour Rajcsanyi, sans aucun doute, la Hongrie est une démocratie.

«La démocratie hongroise a ses défauts. Elle est loin d’être parfaite. Mais elle a le mérite d’exister», affirme t-il. «La qualité de notre démocratie est tributaire de notre situation géographique, ici c’est à l’extrémité sud-est de l’Europe centrale».

Sensibilité hongroise aux critiques de l’UE

Schopflin s’explique: «Beaucoup de Hongrois se sentent isolés». «[Il y a] le problème de la langue, que personne d’autre ne comprend, [et] le sentiment que la Hongrie a été historiquement très mal traitée», éclaire l’eurodéputé. «Il y a un sentiment de victimisation» ajoute t’il.

Jusqu’en 1989, le pays était sous le joug d’un régime communiste. La nouvelle constitution adoptée en 2011 est donc perçue comme une victoire complète sur l’élite postcommuniste et la gauche libérale. Selon Schopflin, c’est pour cela que les Hongrois sont très sensibles à la question de l’indépendance et de l’autodétermination.

L’eurodéputé hongrois Joszef Szajer a témoigné lors d’une audience organisée par la Commission d’Helsinki à Washington DC aux États-Unis (un organisme indépendant du gouvernement fédéral). Son témoignage a été enregistré et mise en ligne sur YouTube par le sénateur américain Ben Cardin. (The Trajectory of Democracy: Why Hungary Matters)

«Tout au long de notre histoire, des milliers de Hongrois sont morts pour notre indépendance, mais au final, nous ne l’avons emporté qu’il y a à peine 20 ans», concède Szajer.

«Aujourd’hui, notre mission est de consolider la liberté et la démocratie, et nous réaffirmons notre droit à décider».

Des inquiétudes persistent

A mesure qu’une partie de la population hongroise expriment sa volonté pour le droit à l’indépendance et à l’autodétermination de leur pays vis-à-vis de l’UE, les défenseurs des droits de l’Homme insistent sur le fait que les changements constitutionnels de la Hongrie peuvent poser des problèmes.

Pour Sylvana Kolaczkowska, directrice du projet «Nations en Transit» de Freedom House (un observatoire de la démocratie dans le monde) les réformes empêchent un système de contrôle et d’équilibre, en créant des structures hiérarchiques dont le niveau supérieur est très souvent le parti majoritaire au Parlement.

On a l’impression que les changements ont été conçus de façon à créer des possibilités excessives de favoritisme politique dans l’attribution des pouvoirs et des ressources, a déclaré Kolaczkowska.

«L’omniprésence du seuil de la majorité des deux tiers dans la législation récente est problématique, parce qu’il rend extrêmement difficile pour tout gouvernement futur de modifier l’héritage de l’administration actuelle», a répondu Kolaczkowska dans un courriel.

Si dans toute démocratie, les tendances antilibérales s’épanouissent en temps de crise ou d’incertitude, Kolaczkowska trouve profondément troublant le rythme et l’ampleur des mesures législatives visant les médias, le système judiciaire et les activités de la société civile indépendante en Hongrie. Elle est préoccupée par «l’impassibilité manifeste du gouvernement devant la forte critique nationale et internationale». Et d’expliquer que «cela crée un dangereux précédent et un exemple pour d’autres pays où une victoire électorale radicale pourrait créer des situations semblables».

Lors de son audience à Washington, Szajer a déclaré que le but des réformes hongroises n’était pas «de s’accrocher au pouvoir», mais plutôt de prendre des mesures urgentes pour redresser un pays au bord de la faillite. Cependant Cardin, président de la Commission d’Helsinki, a exprimé des doutes.

«Lorsque nous regardons les changements que vous avez opérés, nous sommes inquiets» avertissait Cardin. «Parce que nous voyons au-delà de l’actuel parti au pouvoir et analysons les conséquences de ce mode de fonctionnement pour l’avenir de la Hongrie. Nous voyons un risque de vrais problèmes».

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