Le Lieu du Design à Paris dans le 12e arrondissement nous offre, à travers l’exposition Mineral Design, l’occasion de renouer avec les arts du feu: ces arts plus que millénaires sont les premiers vestiges de l’existence de l’homme en tant qu’être social sur cette planète.

En effet, depuis plus de 6.000 ans, la céramique accompagne l’homme. Ainsi, l’on retrouve ses traces en Chine, dans les régions de Hebei et de Henan, mais aussi en Afrique, en Inde et au Japon. On cite souvent la Venus de Dolni Vestonice en Tchécoslovaquie comme étant l’une des plus anciennes créations en céramique du paléolithique supérieur (-29 000 à -22 000 av. J.-C.)

Alors peut-on avancer que la céramique, dont la racine provient du grec ancien keramos et signifie «argile» ou «terre à potier», a su se maintenir dans la vie de l’homme jusqu’à en devenir un élément incontournable, ayant pu au fil du temps, bénéficier des inventions techniques pour se bonifier et s’adapter aux exigences de la société.

Les arts du feu, expression de l’évolution de la société humaine

L’art de façonner la terre élastique telle que l’argile, et de maintenir la forme de l’objet par la chaleur, a permis à l’être humain d’élaborer d’une manière artisanale les objets qui lui permettaient de vivre au quotidien. Plus fragile que le fer, la céramique signe là, une certaine sédentarisation de la société humaine.

Le procédé de fabrication repose sur trois étapes toujours utilisées aujourd’hui. Seules changent les techniques qui permettent le respect de ces étapes. Ainsi le lavage et le pétrissage, suivis du façonnage et de la cuisson, à l’origine manuels, sont devenus mécaniques et industriels. L’objectif est de répondre au mieux au progrès et de produire ce matériau à la fois résistant et utilisable à souhait par les artisans, les créateurs et maintenant les designers.

Il était concevable, dans un contexte classique d’utilisation des arts du feu, d’associer les artisans à la céramique. Les arts de la table, les objets décoratifs mais aussi utilitaires tels que le carrelage et les sanitaires ont bénéficié de l’apport de ces artisans. Cela a permis la création d’une filière de production dont le poids économique n’est pas négligeable, puisqu’il représente plusieurs centaines de millions d’euros de chiffre d’affaires. Pour autant, des facteurs tels que la compétitivité, la différenciation, l’innovation viennent attribuer à ce domaine de production des règles qui exigent une approche transversale avec lesquelles les différents acteurs doivent composer.

Le design, mot d’origine anglaise, a pourtant une racine latine, designare qui veut dire «marquer d’un signe distinctif». Dans la langue française, il peut signifier tout autant dessein que dessin. Il oscille donc entre deux signifiants, l’idée et sa représentation. C’est avant tout une discipline qui relève des arts appliqués et qui regroupe tout un ensemble de domaines dans lesquels on retrouve entre autres l’architecture et le graphisme. Mais elle repose aussi essentiellement sur un produit et des services qui vont entourer la mise en valeur de ce produit.

Une association qui ne laisse rien au hasard

C’est ainsi qu’aujourd’hui, les arts du feu se trouvent associés au design, cette discipline qui vise à la création d’objets qui doivent répondre tant au critère de fonctionnalité que d’esthétisme, tout en étant conformes aux exigences d’une certaine production industrielle et au respect des règles en lien avec la notion de développement durable.

La venue du monde des idées et du concept semble apporter de cette manière, une nouvelle dimension à la filière minérale que représentent les arts du feu. Ces arts, qui consistent à façonner la matière minérale élastique et lui donner une forme, semblent appartenir à un monde qui repose sur la complémentarité que peut donner le matériel allié à l’immatériel.

Alors c’est toute une approche transversale qui se met en place de manière à établir une plate-forme entre ces deux mondes: les industriels et les designers. Pour les aider, des structures de promotion et d’accompagnement, tels de véritables viviers, permettent à ces deux mondes de se rencontrer pour le meilleur.

C’est le cas du CRAFT, Centre de Recherche sur les Arts du Feu et de la Terre, situé dans la région du Limousin et qui, depuis vingt ans, propose cette plate-forme qui permet «d’établir un lien expérimental et artistique entre industriels et designers, architectes et plasticiens» autour de la céramique qui devient l’objet de tous les défis. Ou encore le CERFAV, Centre Européen de Recherche et de Formation aux Arts Verriers, à Vannes-le-Châtel, près de Nancy. Fortes de leurs passés historiques dans le domaine de la céramique pour le CRAFT et le verre pour le CERFAV, ces structures ont su tirer partie de l’apport que pouvait leur fournir le monde de l’innovation et de la recherche et devenir des centres de références, des éléments indispensables face à la concurrence qui nécessite de pouvoir passer de la phase artisanale à la phase industrielle. Elles ont aussi su relever le défi posé par l’obligation d’adopter une logique prônant le développement durable et le respect de l’environnement autour des concepts de design industriel et d’éco-design.

C’est un peu tout ce renouveau de la filière minérale que nous offre aujourd’hui le Lieu du Design. Le design, source de renaissance pour les arts du feu, ou les arts du feu, sources de nouvelles inspirations pour les arts nouveaux déclinés autour de l’objet et de sa réalisation. On peut dire que dans ce mariage raisonné, les deux sortent gagnants et s’enrichissent pour transmettre une idée de l’art qui comblerait Leonard de Vinci qui avait coutume de le désigner «comme étant cosa mentale, une chose de l’esprit», mais nous rajouterons: une chose de l’esprit qui a su être matérialisée avec le meilleur de l’esprit de l’homme.

Informations pratiques:

Exposition Mineral Design

Du 25 avril au 6 juillet 2013

Le Lieu du Design

74, rue du Faubourg Saint-Antoine

75012 Paris

Métro: Bastille ou Ledru Rollin

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