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L’Axe Téhéran-Damas: trois angles d’approche

Écrit par Gary Feuerberg, Epoch Times
30.08.2013
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  • Les témoignages de John Bolton, chercheur à l’American Enterprise Institute (g), Mark Dubowitz, directeur exécutif de la Fondation pour la Défense des Démocraties (C), et le Dr Daniel Brumberg, du Centre de gestion des conflits, sont recueillis par la commission des Affaires étrangères de la Chambre sur les relations entre l’Iran et la Syrie le 31 juillet dernier. (Gary Feuerberg/Epoch Times)

WASHINGTON – Ces derniers mois en Syrie, le régime d’Assad a été fortement soutenu matériellement et logistiquement par l’Iran, pendant que sa garde révolutionnaire a assuré les combats.

L'intervention de l’Iran et du Hezbollah (financée par l'Iran) a permis au régime de Damas de reprendre la main et de récupérer les territoires contrôlés par les rebelles. Le 31 juillet, le sous-comité du Comité des affaires étrangères de la Chambre a tenu une audience portant sur l’axe Iran-Syrie.

Ileana Ros-Lehtinen (républicaine à la Chambre des représentants), qui a présidé la sous-commission sur le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord lors d'une audition intitulée l'axe Iran-Syrie et ses implications pour la région, a brossé un tableau syrien macabre et plein de souffrance : plus de 100 000 victimes; 1,85 million de réfugiés ont quitté le pays et plus de 4,5 millions de personnes ont été déplacées.

Ted Deutch, membre démocrate de la Chambre des représentants en Floride, a ajouté que 8000 personnes fuient le pays chaque jour. Elles se réfugient au Liban, en Jordanie, en Turquie, en Irak et en Égypte, où le conflit menace de se propager et de déstabiliser la région.

Selon Deutch, «dans les faits, le conflit syrien est devenu une guerre par procuration pour les forces régionales rivales comme l'Iran».

Ros-Lehtinen a constaté que l'Iran et la Russie sont des fournisseurs vitaux d'armes pour les forces d'Assad. Téhéran a envoyé l’élite de ses gardiens de la révolution pour conseiller et combattre auprès des forces d'Assad et «vient de prolonger son crédit d’aide financière de 4 milliards de dollars supplémentaire afin qu’Assad poursuive sa brutale campagne contre l'opposition», s’est-elle attristée.

Selon les estimations de l'opposition, rapportées par Deutch, l'Iran fournit 500 millions de dollars par mois et récupère cinq tonnes de cargaison militaire par jour. En outre, pour lui, le renfort des combattants étrangers – plus de 8000 combattants du Hezbollah et des gardiens de la révolution iranienne – a permis aux forces d’Assad de reconquérir les territoires perdus au profit des rebelles, notamment aux alentours de Homs et de Damas.

Toutefois, des évènements favorables aux États-Unis viennent de se produire. Hassan Rouhani, perçu comme un modéré, a remporté les élections présidentielles et vient de prendre ses fonctions le 3 août. Les avis divergent radicalement sur l’impact futur de l'élection de Rouhani et la meilleure approche à adopter par les États-Unis.

Le sous-comité a invité trois experts du Moyen-Orient, disposant d’une grande connaissance des relations entre l'Iran et la Syrie. Voici leurs visions respectives de la situation :

John Bolton, ancien ambassadeur américain auprès des Nations Unies

John Bolton a été ambassadeur américain auprès des Nations Unies entre août 2005 et décembre 2006. Selon son curriculum vitae, Bolton a occupé le poste de sous-secrétaire d'État au contrôle de l’armement et à la sécurité internationale de mai 2001 à mai 2005.

Bolton est convaincu que l'Iran parraine le terrorisme international et que sa quête des armes nucléaires et de destruction massive (ADM) représente une menace directe pour les intérêts des Américains et de leurs alliés dans la région. «L'Iran a créé une aire de domination, qui va de son propre territoire au régime al-Maliki en Irak et englobe la famille Assad et le régime du parti Baas en Syrie ainsi que le Hezbollah terroriste du Liban.»

Pour Bolton, le réacteur nucléaire syrien d'Al-Kibar, construit par la Corée du Nord et détruit par les bombardements israéliens en septembre 2007, a été financé par l’Iran.

Téhéran a probablement encore un grand intérêt dans les programmes nucléaires et de destruction massive en Syrie. Pour Bolton, si Rouhani apparaît comme quelqu’un de «très doux et sympathique», on ne peut lui faire confiance. Pour preuve, lorsque entre 2003 et 2005 Rouhani en tant que négociateur nucléaire n’avait accepté la suspension de l'enrichissement qu’en raison des difficultés dans le processus et la conversion. Une fois ces problèmes réglés, l'Iran a rejeté la suspension et repris son programme nucléaire, s’indigne M. Bolton.

Bolton préconise aux États-Unis de déclarer publiquement être favorables à un changement de régime en Iran et de fournir également une assistance matérielle à l'opposition iranienne. C’était une erreur analyse-t-il de poursuivre les négociations avec l’Iran sur son programme nucléaire comme l’a fait l'administration Obama.

«Jamais, des négociations avec Téhéran ne détourneront les mollahs de leur quête des armes nucléaires, et jamais les sanctions ne les empêcheront de devenir une puissance nucléaire.»

En outre, pour Bolton, il faut soutenir Israël avant, pendant et après le déclenchement d’une attaque préventive contre le programme nucléaire iranien. La communauté internationale, annonce-t-il doit être prête à défendre «le droit inhérent et légitime» d’Israël à «se défendre». Bolton est persuadé qu’il ne faut pas armer l'opposition syrienne, car pour le moment elle est «fragmentée et peu fiable».

Daniel Brumberg, Centre de gestion des conflits

À l’opposé de l'ambassadeur Bolton, le Dr Daniel Brumberg est convaincu que l'élection-surprise du président Rouhani a été très importante et offre une ouverture et une opportunité sur laquelle les États-Unis doivent compter. Pour lui : «les États-Unis devraient le mettre à l’épreuve, ainsi que son nouveau gouvernement pour voir si un règlement par des négociations est envisageable».

Brumberg est actuellement en poste au Centre de gestion des conflits. Son entreprise est liée au United States Institute of Peace, mais Brumberg précise que son témoignage n’engage que lui et ne représente pas les positions de l'USIP. Comme le rapporte sa biographie de l’USIP, Brumberg a écrit de nombreux articles sur le changement politique et social au Moyen-Orient et dans le monde islamique en général.

Il est peu probable, selon Brumberg que le nouveau président se risque à provoquer la ligne dure et le chef suprême en préconisant un changement radical dans les relations de l'Iran avec la Syrie ou le Hezbollah. Rouhani cherchera probablement à promouvoir une politique étrangère plus souple.

Le discours prononcé par Rouhani lors de l'élection montre d’après lui que ce dernier veut changer le système politique en y intégrant des responsables réformistes iraniens. Le Mouvement Vert, favorable à l'ouverture et la réforme, a été muselé par Mahmoud Ahmadinejad, et les intégristes iraniens se sont tournés vers les conservateurs, qui avaient déjà soutenu Ahmadinejad. Aujourd'hui, certains de ces mêmes conservateurs, en particulier les chefs d'entreprises qui souffrent des sanctions internationales, veulent du changement et soutiennent Rouhani.

Si Rouhani veut améliorer l'économie, il doit négocier la réduction, voire la suppression des sanctions internationales, estime Brumberg. En outre, pour que Rouhani réussisse son ouverture du système politique dans le pays et affaiblisse la marge de manœuvre des jusqu'au-boutistes, il devra réduire les conflits de l'Iran avec ses voisins et la communauté internationale dans son ensemble.

Brumberg est persuadé que les dirigeants iraniens sont préoccupés par «l’escalade du conflit sectaire» dans le golfe Persique et la région syrienne. Une autre guerre civile au Liban pourrait déstabiliser toute la région, et «l'Irak en particulier, où les djihadistes sunnites accroissent leurs attaques contre le gouvernement», explique-t-il.

Contrairement à l'ambassadeur Bolton, Brumberg déclare que les États-Unis devraient envisager un allègement modeste des sanctions, afin d’inciter «le nouveau gouvernement à s'éloigner des positions radicales de ces prédécesseurs».

Mark Dubowitz, directeur exécutif de la Fondation pour la Défense des Démocraties

Une troisième approche est celle de Mark Dubowitz, directeur exécutif de la Fondation pour la Défense des Démocraties, pour qui il était «naïf d’espérer un changement important dans la politique étrangère de la République islamique en raison de l'issue de l'élection présidentielle».

Dans son témoignage écrit, Dubowitz accuse Rouhani «d’être un loyaliste du régime et un maître de la tromperie nucléaire».

Rouhani a été le négociateur nucléaire iranien d’octobre 2003 à août 2005. Lorsque Ahmadinejad est devenu président et que des désaccords sont apparus entre les deux hommes, Rouhani a démissionné. Pendant la campagne présidentielle, Rouhani a accusé l’actuel négociateur en chef du pays, à cause des sanctions internationales.

Mais Dubowitz prévient que Rouhani a «induit en erreur la communauté internationale tout en poursuivant sans relâche son programme d'armes nucléaires». Pour lui, on ne peut pas faire confiance à Rouhani pour mettre fin à l'effusion de sang en Syrie.

Et de poursuivre, «si M. Rouhani veut prouver qu’il est un interlocuteur influent et fiable, il doit mettre fin aux activités militaires et financières néfastes de l'Iran en Syrie». Il doit mettre fin au «massacre des femmes et des enfants musulmans et chrétiens syriens», a-t-il dit.

Dubowitz veut une intensification des sanctions et une pression de la communauté internationale pour mettre à terre l'économie iranienne. Il condamne le manque d'application de certaines sanctions, telles que les sanctions de l'or qui permettent toujours à l'Iran d'obtenir des réserves de change. Nous accordons déjà des allégements dans les sanctions, sans obtenir la moindre concession nucléaire, lâche-t-il.

Le 1er août, jour de l'audience, la Chambre a adopté la Loi sur la prévention nucléaire en Iran, qui renforce les sanctions antérieures et rend encore plus difficile l’accès de l'Iran aux réserves des devises étrangères. Le Représentant Eliot Engel (représentant démocrate de N.Y.) pense que si le président Rouhani veut vraiment poser un acte positif, comme suspendre l'enrichissement, il doit le faire avant que ce projet de loi ne soit acté.

Dubowitz n’est pas du même avis que Brumberg et croit qu’il ne faut faire aucune concession ni alléger les sanctions, «tant que Téhéran n’a pas satisfait à toutes ses obligations nucléaires en vertu du droit international».

Version originale : The Iran-Syria Nexus: Three Viewpoints

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