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Le soulèvement bulgare – avec une fête de plage

Écrit par Kremena Krumova, Epoch Times
05.08.2013
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  • Des manifestants chantent des slogans durant une manifestation contre le gouvernement le 18 juillet 2013 à Sofia, Bulgarie. (Nikolay Doychinov/AFP/Getty Images)

SOFIA, Bulgarie – L'appel à la révolution en Bulgarie se lit comme une invitation à une fête de plage.

«Apportez vos costumes de bain et vos serviettes et venez à la plage en face des édifices [du Parlement]. Invitez vos amis, emmenez vos enfants et vos chiens, mettez de la crème solaire et préparez-vous un cocktail […] Faisons pression pour la démission immédiate du gouvernement – dans la bonne humeur – en assiégeant le parlement tôt le matin. Ils [les politiciens] ont transformé le Parlement en cirque. Nous allons transformer le siège en plage. Ce n'est pas exactement une station balnéaire, mais il ne faut pas abandonner. La mer (oups, la victoire) est proche!»

Ainsi se lit une des dernières invitations à manifester dans la capitale bulgare, Sofia. Les manifestations ont lieu depuis déjà plus de 50 jours et pourraient se poursuivre malgré les températures les plus chaudes de l'été et les vacances des parlementaires qui débutent le 5 août.

Mais ne soyez pas trompés par le message jovial ou nonchalant des contestataires; le soulèvement de masse est des plus sérieux. Il ne s'agit pas seulement de revendiquer certains avantages sociaux ou même de faire tomber le gouvernement.

Le paradigme politique est ciblé. Les contestataires demandent l'abolition des structures mafieuses et oligarchiques qui dominent le pays depuis la chute du communisme en 1989.

«Le moment est venu pour un changement fondamental, où la Bulgarie va se transformer en pays dirigé par la loi plutôt que par les règles de la mafia de la “transition”», a écrit Petko Kovachev, membre du Parti vert et participant actif aux manifestations.

Les Verts, avec quatre autres partis politiques de centre-droit, ont établi une coalition le 7 juillet pour renverser le gouvernement de gauche et pour mener la charge contre le pouvoir de la mafia.

«Si le changement survient, ce sera vraiment la fin de la transition du communisme et du pouvoir mafieux des ex-communistes et des magnats à une société démocratique en Bulgarie», ajoute M. Kovachev.

Lilia Kostova, député des Verts à l'assemblée nationale, affirme que les manifestations tournent autour d'un mot clé : «mafia».

«Les gens comprennent très bien que le système politique et le crime organisé ne font qu'un», explique Mme Kostova. Ils savent que c'est comme une guerre dans laquelle ils n'ont plus rien à perdre. Descendre dans la rue, c'est une question d'honneur et de dignité.»

Mme Kostova, qui participe aux manifestations, décrit comment la fusion entre la mafia et l'État affecte toutes les facettes de la vie dans le pays. Selon elle, les Bulgares rencontrent de nombreuses difficultés dans leurs vies quotidiennes, comme la difficulté de faire des affaires, d'élever et d'éduquer des enfants, de se fier au système judiciaire, de vivre sans peur et de croire aux médias (qui sont manipulés par l'État).

«Même si les gens n'arrivent pas à le formuler clairement, ils veulent une chose : une vie normale et de qualité dans leur patrie.»

L'élément déclencheur

Depuis la chute du mur de Berlin à la fin de la guerre froide, la transition a été marquée par l'injustice, les valeurs tordues et la corruption dans toutes les sphères de la société, affirment les contestataires. Les Bulgares ont appris à ne pas s'exprimer librement, à exprimer leur insatisfaction en privé seulement et à fermer leurs yeux sur les méfaits.

En juin dernier, une goutte a fait déborder le vase de la tolérance collective.

Lorsque Delyan Peevski, un jeune magnat des médias, a été nommé directeur de l'Agence d'État pour la Sécurité nationale, une vague de manifestations a engouffré le pays de l'Europe orientale.

«La nomination de Peevski a été l'élément déclencheur», indique Asen Genov, un des organisateurs du mouvement et un blogueur politique.

«Cela a fait tomber […] la façade de la démocratie corrompue en Bulgarie, où l'argent, les intérêts financiers privés […] et le pouvoir politique sont entremêlés dans une seule chaîne alimentaire criminelle», affirme-t-il.

Les gens sont descendus dans la rue et ont demandé la démission immédiate du gouvernement. Depuis le 14 juin, des milliers de gens marchent dans les rues de Sofia pratiquement chaque jour. Les marches ont rassemblé des dizaines de milliers de personnes quotidiennement dans la capitale d'environ 1,5 million. Le mouvement a aussi surgi à la campagne et dans d'autres villes.

 

Le président se joint au mouvement

Le gouvernement actuel est arrivé au pouvoir en mai dernier après la démission du gouvernement précédent en février à la suite des manifestations dénonçant le coût élevé de l'électricité. Ce gouvernement était mené par le parti de centre Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie (Grazhdani za evropeysko razvitie na Balgariya, GERB).

Bien que le GERB ait démissionné, il a quand même remporté une majorité de sièges à l'élection suivante, mais a dû former une coalition avec le Parti socialiste bulgare, le parti turc Mouvement pour les droits et la liberté et le parti nationaliste Ataka.

Le GERB a finalement joué les seconds violons, alors que ses partenaires ont assumé les rôles importants, dont celui de président du Parlement, ce qui a été une première dans l'histoire bulgare.

Dans une autre première, le président de la Bulgarie a appuyé ouvertement les manifestations.

Le président Rosen Plevneliev s'oppose aux politiciens qui ont orchestré ce qu'on appelle la «transition» du communisme. Nayo Tizin, un journaliste et l'une des figures emblématiques du mouvement, explique : «En ce moment, les ingénieurs de la transition sont très nerveux, parce que c'est la première fois qu'un président n'est pas dépendant de leur ingénierie et qu'il se penche sur les résultats de cette ingénierie, soit l'oligarchie et l'expropriation du pays par la mafia.»

«Finalement, un politicien actif est du côté des citoyens», remarque M. Tizin. Le parti au pouvoir de Plevneliev, GERB, a quitté le Parlement pour dénoncer les gestes de ses partenaires de coalition. Quant au Parlement européen, il fait écho au GERB en demandant du changement au sein du Parlement bulgare.

Malgré les chants de protestation dans les rues, les trois partis restant dans la coalition ont continué comme si de rien n'était, procédant même à d'autres nominations qui ont attisé la colère.

GERB appelle à la tenue d'élections en mai prochain. Un sondage Gallup international du 1er août indique que 72 % des Bulgares sont d'accord avec cette position.

Dehors les communistes

«Il est déjà trop tard. Il n'y a plus aucune confiance dans le gouvernement. La seule issue est la tenue d'élections», estime Andey Kovatchev, un membre du Parlement européen et du GERB.

«J'espère que la majorité dans le prochain Parlement ira au centre-droit. Et j'espère que ce nouveau gouvernement concentrera tous ses efforts sur l'objectif principal : éliminer du pouvoir tous les anciens communistes, une fois pour toutes», affirme M. Kovatchev.

«Le Parti socialiste bulgare a une grande faille qu'il ne peut corriger : il est fier de son passé communiste», mentionne M. Kovatchev.

«Il n'a toujours pas condamné son passé et propage encore la nostalgie du communisme : comment c'était bien, comment c'était peu dispendieux, comment c'était sécuritaire, comment il y avait beaucoup d'industries, comment les services secrets défendaient nos intérêts nationaux et comment seuls des agents des services secrets devraient avoir le droit d'être nos diplomates», ajoute M. Kovatchev.

«Tout cela représente un danger fatal pour la Bulgarie démocratique et européenne», estime-t-il.

Version originale : Bulgarian Uprising—With a Beach Party

 

 

 

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