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Abus, rançon et survie: récit d’une Canadienne enlevée en Somalie

Écrit par Epoch Times
05.09.2013
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  • Le livre A House in the Sky raconte quinze mois de captivité brutale vécue par la journaliste canadienne Amanda Lindhout et le photographe australien Nigel Brennan. (simonandschuster.com)

Amanda Lindhout a décidé de se suicider après une année de captivité, au cours de laquelle elle a été privée de nourriture, rouée de coups et abusée sexuellement. La jeune femme originaire de l’Alberta (Canada), enlevée en Somalie, en août 2008, dit avoir atteint la limite du supportable après trois jours passés, ligotée comme un animal, les mains et les pieds raidis dans son dos, au point de ne presque plus pouvoir respirer. Lorsque enfin ses ravisseurs l'ont détachée, ils l’ont avertie que ce n’était qu’un sursis et que chaque jour ils utiliseraient la même torture jusqu’au paiement de la rançon qu’ils ont réclamée.

Lindhout est persuadée qu’il valait mieux mourir. Laissée seule, elle décide de s’entailler les veines du poignet avec une lame de rasoir rouillée. Avant qu’elle ne se coupe les veines, un petit oiseau brun est entré par la porte de la pièce où elle était en détention. Il s’est posé sur le sol, la regarda et s'envola. C’était le premier oiseau qu'elle voyait depuis son récent enlèvement.

«J'ai toujours cru dans les signes... et maintenant, dans un moment aussi crucial, j'en voyais un», écrit-elle. «J’allai m’en sortir et je rentrerai chez moi. Peu importe ce qui allait m’arriver et ce que je devrais endurer. Je savais maintenant que j’allais m’en sortir.»

Dans une présentation de son livre, qui sort le mois prochain, la jeune femme de 32 ans donne des détails sur les 15 mois de sa brutale captivité, avec le photographe australien Nigel Brennan. Le livre intitulé A House in the Sky, est coécrit avec Sara Corbett, qui écrit pour le New York Times Magazine. Le livre raconte comment les familles Lindhout et Brennan ont fini par organiser elles-mêmes la libération des leurs, après avoir renoncé à l’aide des gouvernements canadien et australien.

Leur libération a coûté en tout 1,2 million de dollars. La rançon versée aux ravisseurs est d’environ 600 000 dollars. Ces derniers réclamaient 3 millions de dollars. La somme restante a servi à couvrir les autres dépenses dont 2000 $ de frais journaliers, pour un négociateur privé. Les deux familles se sont partagé équitablement les frais. Si la famille de Brennan était plus riche, celle de Lindhout a eu recours aux dons pour rassembler sa part.

Lindhout révèle que les gouvernements canadien et australien avaient offert 250 000 dollars aux ravisseurs. Cet argent qualifié de «frais» permet de maintenir les politiques officielles de ne pas payer de rançons. L’offre a été rejetée. Les fonctionnaires d'Ottawa ont également essayé d'obtenir l'aide de leurs relations au sein du gouvernement somalien, écrit-elle, la classe dirigeante était constamment dans le chaos.

Sans s’en prendre au gouvernement fédéral qui a échoué à la secourir, Lindhout parle des pays qui acceptent de payer la rançon ou «concluent des accords diplomatiques à défaut d’envoyer des commandos armés» pour libérer leurs citoyens.

«De nombreux États, comme les États-Unis ou le Canada, essaient d’apporter leur soutien aux familles, tout en gardant une position inflexible face au terrorisme et aux preneurs d'otage en refusant de payer des rançons... mais, allez expliquer le bien-fondé de cette position à une mère, un père, un mari ou une femme dans l'agonie d’une attente impuissante», peut-on lire dans le livre.

Une expédition très risquée

Lindhout reconnaît avoir été naïve et imprudente pour assouvir sa quête de frisson et d’aventure dans un pays dangereux. Ancienne serveuse à Calgary, elle connaissait des techniques de randonnée pédestre, qui lui ont été utiles pour parcourir le monde avant de se tourner vers le journalisme et la pige afin de financer la suite de ses voyages.

Quelque temps plus tôt, elle s’était rendue en Afghanistan toute seule et avait pu revendre une histoire au journal local the Red Deer Advocate à son retour, ainsi que quelques photos à un magazine afghan. Ayant décroché un emploi à la Bagdad for Press (l’antenne anglaise de la télévision d’État iranienne), elle croyait que sa carrière décollait. Mais très vite, dit-elle, elle a eu le sentiment de «faire partie d'une machine de propagande».

C’est alors qu’elle décide de faire cap sur la Somalie. «Pourquoi la Somalie? C’était très simple. Le pays était dans le chaos. Il y aurait des histoires à raconter – une guerre faisait rage, la famine était imminente, des extrémistes religieux y étaient actifs et la culture locale loin des projecteurs.»

Elle savait que c'était dangereux, mais était convaincue de trouver une histoire qui allait relancer sa carrière. Elle a appelé Brennan, un ancien petit ami rencontré lors d'un précédent voyage en Éthiopie, pour l’inviter à la rejoindre et à prendre des photos, pendant qu'elle enregistrerait des informations pour la télévision. Il était partant.

Quelques jours après leur arrivée en Somalie, ils prenaient une voiture avec un cadreur, un chauffeur et des gardes de sécurité et se dirigèrent vers un camp de personnes déplacées hors de la capitale Mogadiscio. Sur le chemin, des hommes armés les ont attaqués et les ont fait sortir du véhicule. Lindhout racontera plus tard, avoir appris que ces groupes armés les surveillaient à l’hôtel et ciblaient en réalité deux hommes, un écrivain et un photographe du National Geographic. Les ravisseurs ne s’attendaient pas à voir une femme, dit-elle.

Lindhout et Brennan ont été enlevés ensemble, mais ce qu’ils ont vécu en captivité est très différent. Si Brennan était détenu dans une pièce munie de fenêtres, de meubles et de livres, Lindhout était, elle, enfermée dans une pièce sombre avec des rats. La raison? Brennan était un homme, et Lindhout, une femme. Les deux otages ont déclaré à leurs ravisseurs leur désir de se convertir à l’islam. Aussi récitaient-ils le Coran et priaient-ils cinq fois par jour, dans l’espoir que cela leur offrirait une certaine protection.

La famille canadienne de Lindhout craignait que leur fille ne soit sexuellement agressée, mais les autorités canadiennes leur ont assuré que les musulmans étaient peu susceptibles de telles pratiques. Amanda parle toutefois d’un ravisseur, qui se faufilait régulièrement dans sa chambre et se soulageait sur elle. La situation a empiré, lorsque Brennan et elle ont tenté une évasion début 2009, relate-t-elle.

À l’aide d’un coupe-ongle, le couple a creusé les briques des barreaux d’une fenêtre de salle de bains, avant de ramper et de courir vers la mosquée voisine. Quand les ravisseurs armés jusqu'aux dents qui les avaient enlevés sont venus, personne dans la foule n’a osé s’interposer, excepté une vieille femme.

Elle s'est accrochée aux bras de Lindhout avant de se jeter sur le corps de la Canadienne pour la protéger. Mais des hommes ont traîné leurs otages hors du bâtiment. Lindhout dit avoir entendu un peu plus tard, un écho de coup de feu à l'intérieur de la mosquée, sans jamais savoir ce qu’est devenue la vieille dame. Les ravisseurs ont accusé Lindhout d’être à l’origine de l'évasion, même si l’idée venait de Brennan. Le lendemain, dans une salle de prière, ils lui ont recouvert la tête d’un drap l’ont déshabillée et l’ont violée à tour de rôle.

Libération

En novembre 2009, Lindhout a été informée qu’elle et Brennan seraient vendus à un groupe rival plus violent. Lors de leur livraison à des étrangers, Lindhout s’est accrochée à la portière de la voiture et a dû être poussée à l’intérieur dans des hurlements. Quelques minutes plus tard, elle réalisait qu'ils venaient d’être libérés. Une rançon avait été payée. Lindhout a été transporté dans un hôpital au Kenya. Elle s'était cassé quelques dents, certaines côtes la faisaient souffrir à la suite des coups de pieds reçus en captivité. En outre, elle avait un champignon dermatologique qui s'était répandu sur son visage.

Des touffes entières de ses cheveux étaient tombées. Elle avait été très mal nourrie et marchait péniblement, ses pieds ayant été attachés si longtemps. Après avoir passé une semaine à l’hôpital, elle a pu rentrer au Canada. Elle a suivi un programme de traitement spécialisé pour gérer le syndrome du stress post-traumatique. Elle a vu à plusieurs reprises des thérapeutes, psychologues, psychiatres, nutritionnistes, acupuncteurs et même des guides de méditation.

Où a-t-elle puisé la force de tenir 459 jours? Lindhout écrit avoir pu traverser les moments les plus douloureux en imaginant dans son esprit une maison dans le ciel, où elle pouvait manger tout ce qu'elle désirait et profiter de la compagnie de ses amis et de sa famille. Elle s’était fait la promesse qu’une fois libérée, elle trouverait le moyen d'honorer la femme qui a tenté de la sauver à la mosquée. En 2010, elle a créé la fondation à but non lucratif, la Global Enrichment Foundation pour encourager l'éducation des filles et des femmes en Somalie et au Kenya.

Aujourd'hui, elle vit à Canmore, Alberta, et pense souvent à ses anciens ravisseurs. Elle essaie de ne pas les haïr et de comprendre qu’ils sont les produits d'un environnement violent et d’une guerre sans fin.

«Toutefois, le pardon n’est pas facile à accorder. Certains jours, ce n’est qu’un petit point à l'horizon. Je tends vers lui. J’oriente mes pas dans sa direction. J’y arrive certains jours, et d’autres jours pas».

«Plus que toute autre chose, c'est pourtant ce qui m'a aidé à avancer et à poursuivre ma vie.»

Version originale : An Alberta Woman’s Tale of Abuse, Ransom, and Survival in Somalia

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