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Le divorce express, raisons et complications

Écrit par David Vives, Epoch Times
15.01.2014
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  • Parmi les 130.000 couples qui divorcent chaque année, plus de la moitié choisissent le divorce par consentement mutuel. (AFP PHOTO/Patrick Kovarik)

Le 3 janvier dernier, la garde des Sceaux Christiane Taubira annonçait sa volonté de réformer le divorce par consentement mutuel, en déléguant aux greffiers la compétence de prononcer le jugement. Cette idée, saluée par le syndicat des greffiers et Dominique Bertinotti, le ministre de la Famille, s’inscrivait dans l’allègement des charges incombant aux juges, submergés par les procédures. De prime abord, cette réforme traduit plus une réflexion sur le fonctionnement de la justice que sur l’aspect sociétal du divorce en France, contrairement à la réforme de 2005, actuellement en cours.

La question fut cependant abordée le 11 janvier lors du colloque «La Justice au XXIe siècle» à la Maison de l’Unesco, attendu par ceux qui souhaitaient en comprendre les implications. Au menu, rien de bien nouveau, si ce n’est l’idée lancée par Madame Taubira: «mettre le citoyen au cœur du service public de la justice». Les concertations autour de cette «meilleure» justice pour le contribuable seront prévues en avril 2014. Le divorce par consentement mutuel ne peut en effet pas se résumer à une simple affaire de calculs comptables sur les montants de pensions, et d’un peu d’administratif.

Contradictions de la mesure

Quelques minutes devant le juge, un coût moins cher à assumer, nombreux sont les avantages du divorce par consentement mutuel aux yeux des Français. Souhaitant que le juge intervienne le moins possible dans leurs vies privées, les couples optant pour cette approche pourraient être d’accord sur l’idée de se passer d’un juge, et de ne voir qu’un greffier. Pourtant, la moitié des couples reviennent devant le juge pour des questions de pensions alimentaires et 20% d’entre eux pour la question de la garde d’enfant. D’après la sociologue Céline Bessière, «à l’heure actuelle, 55% des couples divorcent par consentement mutuel. Mais cela ne veut pas dire que le divorce s’est pacifié, car ils viennent pour renégocier le montant de la pension ou les droits de visite. Toutes procédures confondues, les couples qui repassent au tribunal représentent ainsi un tiers des affaires.»

Or, revenir devant le juge n’est pas si simple, car on ne peut faire appel des décisions prises lors d’un divorce par consentement mutuel. Ainsi, comme le souligne Nicolas Graftieaux, expert en Famille/Patrimoine d’un cabinet parisien, «le souci de rationalisation avancé est poussé à un extrême tel qu’il risque de générer une injustice sociale insupportable et paradoxalement des contentieux post-divorce plus nombreux, à l’encontre de l’objectif recherché».

Le rôle du juge et des avocats

La simplification du divorce par consentement mutuel pose également des questions de fond sur le rôle des acteurs de la justice. D’après Nicolas Graftieaux, «les époux passent  deux filtres: celui de leur avocat tenu à une obligation très spécifique de conseil et celui du juge, dernier tenant de leur liberté. Sans remettre évidemment en cause leurs compétences spécifiques, un simple enregistrement devant le greffier ne pourra jamais apporter les mêmes garanties. Les perspectives sont effrayantes: divorces forcés, sort des enfants ou mesures financières  imposées, incomprises, etc».

Le rôle des avocats est également important dans le calcul du montant de la pension alimentaire. Fonctionnant sous le contrôle du juge, ces derniers défendent l’intérêt de leurs clients. Autre sujet important, qui a soulevé l’inquiétude des magistrats lors de l’annonce de Madame Taubira: l’intérêt des enfants. À ce jour, seul le juge, par sa formation et son expérience, est à même de vérifier s’il n’y a pas de préjudice envers l’enfant; il est le seul à pouvoir s’opposer à l’autorité parentale du couple, dans le cas où certaines mesures seraient jugées inadaptées dans ce sens.

«Une conséquence symbolique»

D’après Christophe Régnard, président de l’USM (syndicat majoritaire des magistrats) «l’examen d’une procédure de divorce par le juge entraîne une conséquence, même symbolique». Avec la question de la simplification du divorce, certains observateurs parlent d’une «fragilisation des liens familiaux». Le divorce est rarement une pilule facile à avaler pour les couples, même s’ils déclarent être d’accord sur le fond.

Pour Gérard Neyrand, sociologue et professeur à l’université de Toulouse, «finalement, le fait de divorcer devant un juge ou un greffier n’est pas si fondamental dans le processus de fragilisation du mariage. Celui-ci a été bien plus fragilisé par la possibilité de divorcer par consentement mutuel, instaurée en 1975. Ce à quoi nous assistons est une conséquence lointaine du basculement du mariage qui s’est effectué dans les années 1970».

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