Anglais | Chinois | Coréen | Français | Allemand | Espagnol | Japonais | Russe | Ukrainien | Hébreu | Roumain | Bulgare | Slovaque | Tchèque | Indonésien | Vietnamien
Faites un don

Jordaens, la gloire d’Anvers

Écrit par Michal Bleibtreu Neeman, Epoch Times
12.01.2014
| A-/A+
  • Autoportrait de l’artiste avec sa femme Catharina van Noort, leur fille Elisabeth et une servante dans un jardin, 1621-1622. (© Madrid, Musée national du Prado)

Parmi les peintres qui ont fait la gloire d’Anvers au cours du XVIIe siècle, ce sont le grand maître Pierre Rubens et son élève préféré Van Dyke qui sont sans doute restés gravés dans notre mémoire. Nous avons donc tendance à oublier Jacob Jordaens, qui signait Jacques Jordaens.

Le Petit Palais consacre cette exposition à l’un des plus grands maîtres classiques de la ville portuaire, bien que moins connu en France, car Jordaens, contrairement à Rubens et Van Dyke, n’a jamais quitté Anvers. Il deviendra le premier peintre de la ville d’Anvers après la disparition de Rubens en 1640, puis celle de son élève prodige un an plus tard. Il recevra alors des commandes locales et internationales de la part des institutions et des aristocrates et possédera l’un des plus grands ateliers de l’époque.

Jacques Jordaens est né en 1593, dans une famille de marchands de toiles. À l’âge de 14 ans, Jordaens révèle une affinité pour le dessin et entre dans l’atelier d’Adam Van Noort, dont Rubens lui-même était élève et avec qui Jordaens collaborera sur plusieurs chantiers. Il épousera ensuite Catherine, la fille de Van Noort.

La ville d’Anvers est devenue au XVIe siècle l’une des plus grandes villes d’Europe. Située sur l’Escaut, elle joue un rôle prédominant dans le commerce des épices et des métaux venant d’Inde et d’Afrique et devient la tête de pont de l’empire commercial portugais. L’art et la culture y fleurissent. Après la reconquête d’Anvers par les Espagnols en 1585, les Augustins et les Jésuites s’y installent. La ville connaît alors un essor artistique et architectural. La rénovation de la cathédrale et la construction des églises fournissent du travail aux peintres, décorateurs et sculpteurs.

Ce contexte marque le début de la carrière de Jordaens. Ses premières peintures révèlent l’influence de Caravage dans l’usage de la lumière, et celle de Rubens avec qui il a travaillé entre 1617 et 1620, dans la monumentalité et le lyrisme, ainsi que son propre langage pictural s’affirmant déjà.

Jordaens, admiratif de la Réforme, se convertit au calvinisme. Mais il réalisera des fresques et des retables pour l’église catholique afin de maintenir  au moins son grand atelier. Parmi ceux-ci, La Sainte Famille (1620), Le Sacrifice d’Isaac (1625-1630), Les Quatre Évangélistes (1625-1630) ou Le Christ chassant les marchands du temple (1650), dans lequel chaque personnage exprime un sentiment différent.

Certes, l’une des parties les plus captivantes de cette exposition réside dans la richesse des études de Jordaens: des dessins, des esquisses préparatoires, des aquarelles ou des gouaches. Dans la démarche d’un travail d’équipe, le maître prépare d’avance une série d’études qui seront utilisées à maintes reprises dans les tableaux, car n’oublions pas qu’il faut encore penser des compositions, des décors, des jeux de lumières ou de couleurs.

  • Les Quatre évangélistes, 1625-1630. (© RMN-GP (musée du Louvre)/René-Gabriel Ojéda)

Des études des membres de la famille du peintre ou des amis de Jordaens ont ainsi été réalisées sur le vif. Deux études de Têtes de vieille femme (1617-1620) révèlent sans doute le portrait de la mère du peintre. Le visage est peint sans complaisance et met en relief les rides, le menton tombant et le nez débordant. La lumière est centrée sur ce visage et les contrastes des couleurs captent avec fascination le regard du spectateur.

Sans complaisance, c’est la manière de Jordaens de dépeindre ses proches, sa mère, son beau-père et lui-même. Ainsi, dans Le Roi boit! (1638-1640), présentant une réunion de famille à l’Épiphanie où l’on boit un peu trop, Jordaens peint son beau-père Adam Van Noort dans le rôle du roi de la fête. Le peintre lui-même apparaît aussi, ridé et recroquevillé, vomissant au premier plan... Comme un clin d’œil, la scène réunit les deux peintres, Jordaens et son beau-père, à la même table. Le tableau a eu beaucoup de succès et a connu plusieurs versions réalisées par Jordaens lui-même. Le côté moralisateur de Jordaens accompagné d’une poignée d’humour et de bienveillance, appelant ici à la modération, est également un aspect non négligeable de son oeuvre.

Ce sont en effet les fables et le quotidien moralisateur peint par Jordaens qui ont fait la réputation de l’artiste et ce, non sans raison.

Ainsi, l’œuvre Comme les vieux ont chanté, ainsi les jeunes jouent de la flûte (1577-1660), illustre un dicton populaire qui encourage les parents à bien se comporter puisqu’ils sont un exemple pour leurs rejetons.

L’un des tableaux le plus remarquable est L’Amour mal assorti (1638-1640). Ce petit tableau attire par sa luminosité. Les traits clairs et rayonnants de la jeune femme contrastent avec ceux d’un vieil homme se penchant derrière elle. Ce thème a connu un franc succès dans la société protestante de l’Europe du nord aussi bien que dans la culture latine.

Dans tous ces tableaux, figurent des animaux, des chiens, des coqs, des hiboux ou encore des perroquets que Jordaens excellait à peindre. Ces animaux apportent une note de joie tout en évoquant le quotidien, mais sont également sources de connotations liées aux caractéristiques de l’animal.

  • Servante avec une corbeille de fruits et un couple d’amoureux, vers 1628-1630. (©CSG CIC Glasgow Museums Collection)

L’ambiance gaie et festive des scènes est sans doute due à la sensation d’abondance évoquée par la nourriture, les étoffes, les expressions, la présence de différentes générations et celle des animaux dans une même scène sans qu’il y ait aucune hiérarchie apparente. Les personnages se trouvent en pleine action, mangeant, buvant, jouant des instruments de musique, faisant des gestes triviaux. Cette abondance visuelle qui stimule l’odorat, l’ouïe, le toucher et le goût, a traversé les siècles.

La dernière section de l’exposition est dédiée à ce festin de sensations présenté de façon si vive dans les tableaux de Jordaens. Un grand meuble inspiré des cabinets de curiosités, très en vogue au XVIIe siècle, est dressé à l’intention des visiteurs: disposant de tiroirs, d’étagères et de portes secrètes, il abrite des étoffes de soie ou de lin, des pots diffusant des parfums de vanille, de cannelle ou même d’huître et invite les visiteurs à toucher les objets et à porter les pots odorants à leur nez, pour ressusciter ainsi le monde sensuel de Jordaens.

Informations pratiques

Jordaens (1593-1678), la gloire d’Anvers.

Du 19 septembre 2013 au 19 janvier 2014.

Exposition présentée au Petit Palais, Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, avenue Winston Churchill, 75008, Paris

Tél.: 01 53 43 40 00

Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 18h, le jeudi jusqu’à 20h.

Tarif: 11 € (tarifs réduits: 5,50 €, 8 €)

Epoch Times est publié en 21 langues et dans 35 pays.

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.