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Livraison des Mistral: le revers de la parole française?

Écrit par David Vives, Epoch Times
01.12.2014
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  • François Hollande a décidé de suspendre jusqu’à nouvel ordre la livraison des Mistral à la Russie. (Georges Gobet/AFP/Getty Images)

Le 25 novembre, François Hollande a suspendu jusqu’à nouvel ordre la livraison des deux navires de guerre Mistral aux Russes en exigeant l’application intégrale du plan de paix en Ukraine et un «cessez-le-feu entièrement respecté». Le président français s’est placé ainsi dans une cohérence de discours envers ses alliés de l’OTAN. Mais les facteurs qui entrent en jeu dans cette vente sont plus complexes. Le respect d’un cessez-le-feu et la dénonciation d’une politique étrangère russe agressive et unilatérale, vaut-elle un contrat pesant 1,2 milliard d’euros?

La Russie trop «agressive» envers ses voisins

«Un pays qui a tant de problèmes avec sa démographie n'est pas un pays qui, spontanément, et l'histoire nous le montre sur tous les continents, est porté à une agressivité militaire avec ses voisins». L’auteur de ces paroles: Nicolas Sarkozy en 2009, lors d’un discours à Munich. La France et la Russie étaient alors prêtes à sortir les stylos pour le contrat des Mistral. Une «grave erreur d’analyse», selon Bruno Tertrais, Maître de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique, qui affirme qu’à ce moment, peu de voix s’élevaient à l’encontre de cet accord.

À l’époque, Dimitri Medvedev était aux commandes du Kremlin, et les Occidentaux croyaient encore aux promesses d’une Russie pacifique avec ses voisins. Nicolas Sarkozy ne croyait pas une «agression militaire de la Russie» possible. Le Wall Street Journal, à New York, rapportait que «Nicolas Sarkozy avait négocié le contrat en signe de bonne volonté envers Moscou après l’invasion de la Géorgie par les troupes russes en 2008». Côté américain, George W. Bush dénonçait la politique étrangère russe basée sur la «brutalité» et «l'intimidation».

Ce pari français justifiant le contrat des Mistral s’inscrit dans une ligne politique souvent défavorable côté Atlantique: vouloir pacifier les relations avec des pays peu à cheval sur les processus démocratiques, et croire en la bonne volonté créée par les liens économiques. Bref, croire en une Russie non belliciste. Dans les faits, le gouvernement du Kremlin n’a montré que peu de conviction à freiner ses ambitions territoriales ; que ce soit  en 2008 en Géorgie, d’où les troupes russes ne se sont retirées qu’après un fort grincement de dents du monde occidental, ou plus récemment, le conflit en Crimée.

D’après Olivier Brisou, homme d’affaires français installé en Russie et président d’Ural Atlantic, entreprise spécialisée dans l’armement terrestre, «Paris et Moscou ont chacun leur perception de la situation […]. Lier la solution d'une affaire, y compris "commerciale", à une compréhension réciproque ne pourrait être possible qu'en partageant une analyse commune. Or, les points de vue [entre Paris et Moscou] sont diamétralement opposés».

La livraison des Mistral, une «bourde majeure»

Le geste français de suspendre la livraison des Mistral serait-il annonciateur d’une rupture avec une certaine forme de diplomatie? Toujours est-il que côté russe, les journaux pro-gouvernementaux affirment à qui veut l’entendre qu’il n’y a plus tant besoin des Mistral français. La Voix de la Russie, radio d’État russe,  mentionne ainsi  un «asservissement [français] aux intérêts étasuniens». Ou encore, Igor Korotchenko, directeur du Centre d’analyse du commerce mondial de l’armement et membre du Conseil public du ministère de la Défense de la Fédération de Russie, se déclare «calme et patient» face à une France qui «devra déjà rembourser en intégralité l’argent qu’elle a reçu pour ce contrat et en plus payer une grande pénalité». Avant de prédire la «perdition» de M. Hollande, qui pourrait «devenir le politicien ayant ouvertement trahi les intérêts nationaux de la France».

Peut-être que cette pique prononcée sans rire  était le meilleur encouragement que l’on puisse faire au président français. Pour Bruno Tertrais, «On ne peut pas vouloir construire l'Europe politique et l'Europe de la défense, avec des pays qui sont nos voisins et nos alliés, en livrant ces navires. C'est impossible !». L’expert français qualifie des contrats du Mistral de «bourde majeure». « Pensons à demain: une livraison n'apporterait aucun bénéfice dans la relation avec la Russie, tandis que le coût politique serait maximal en Europe», analyse t-il.

Le marché de l’armement russe est peu intéressant pour les Français

Après l’épisode des Mistral, Jean-Yves le Driant, ministre de la Défense, devra rassurer sur la crédibilité des engagements français. Le secteur, dynamique et très stratégique pour l’industrie française, concerne près de 40.000 emplois dans notre pays. Récemment, le ministre de la Défense est devenu VRP de luxe pour l’industrie de l’armement tricolore. Sitôt l’annonce de report de livraison faite par François Hollande, il a entamé une tournée auprès de ses clients : Pologne, Inde, Arabie Saoudite.

Les contrats avec la Russie ne pèsent en effet pas très lourd; si l’on écarte les 946 millions proposés par les Russes pour les Mistral, la Russie a dépensé 322 millions sur les cinq dernières années. En comparaison les trois premiers clients, l’Arabie Saoudite, le Brésil et l’Inde ont signé à eux trois pour plus de 13 milliards sur cette période.

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