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Comment pourraient se terminer les manifestations à Hong Kong?

Écrit par Matthew Robertson, Epoch Times
08.11.2014
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  • Un manifestant bien protégé devant la ligne de front d’une confrontation entre manifestants et policiers à Mong Kok, Hong Kong, le 5 novembre 2014. (Benjamin Chasteen/Epoch Times)

HONG KONG – Il y a un mois, le professeur de droit chinois Zhang Qianfan à l’esprit libéral écrivait un texte, encourageant les étudiants de Hong Kong à remballer leurs affaires et à libérer les rues.

L’essai était intitulé : La sagesse de la démocratie, c’est d’arrêter quand vous avez fait valoir votre point. «Si les étudiants de Pékin en 1989 avaient pu partir à la dernière minute, il n’y aurait eu aucune excuse pour une répression violente», a écrit Zhang Qianfan.

Selon lui, les étudiants de Hong Kong ont atteint leurs objectifs rien qu’en sortant, en exprimant leur point de vue et en occupant les rues pendant une semaine. Poursuivre l’occupation risque de la transformer en «acte simplement illégal», avertissait-il.

Un mois plus tard, cependant, les étudiants sont toujours là – et ils ne montrent aucun signe de vouloir partir. Personne n’a osé prédire la fin du mouvement, et les deux parties semblent être dans l’impasse.

Il y a toutefois moins de gens dans les rues et le froid s’installe. Les leaders étudiants qui prennent la parole pour le mouvement n’avancent plus certaines des demandes du début, indiquant qu’ils pourraient être satisfaits par de plus petites concessions du gouvernement.

Pas de «bon résultat»

Le titre de l’article de Zhang Qianfan contient une signification absente de la traduction française : jianhao jiushou signifie «Si tu vois un bon résultat, fais ton sac.»

Jones Tam, une manifestante bouquineuse, conceptrice publicitaire pour un magazine de mode, a attentivement lu un exemplaire de l’article et a contredit l’idée selon laquelle les manifestants avaient obtenu un «bon résultat». 

«Je pense que "voir un bon résultat et faire son sac" est une bonne idée, mais le gouvernement de Hong Kong ne nous a pas encore donné un bon résultat à contempler et nous ne savons pas comment faire nos sacs», a dit la jeune femme en reprenant l’expression.

  • Des manifestants devant la ligne de front d’une confrontation entre manifestants et policiers à Mong Kok, Hong Kong, le 5 novembre 2014. (Benjamin Chasteen/Epoch Times)

Elle est venue dans le quartier de l’Amirauté, la plus grande des zones occupées autour des bureaux gouvernementaux, presque tous les jours du mois dernier, passant des heures sur le site après le travail, pour exprimer son soutien.

«Nous avons eu un dialogue avec le gouvernement, mais il n’avait pas de réel contenu. Chaque partie n’a fait que répéter ses exigences, il n’y a pas eu de discussion plus profonde», a-t-elle dit en référence à la rencontre publicisée du 21 octobre.

Elle a fait remarquer que le gouvernement de Hong Kong se trouve dans une position «embarrassante», car il n’a pas de pouvoir réel. «Ils écoutent juste les autorités centrales [de Pékin].»

Impasse

L’impasse est simple : les étudiants demandent un «véritable suffrage universel», soit le droit d’élire un dirigeant parmi des candidats désignés par la population, plutôt que des candidats sélectionnés par une élite fidèle à Pékin, comme c’est actuellement le cas.

Ils veulent également l’abolition des «circonscriptions fonctionnelles» où les diverses professions et les intérêts économiques sont répartis dans des blocs électoraux pour l’élection des membres du Conseil législatif et la nomination des candidats à l’élection du chef de l’exécutif.

Dans l’ensemble, il semble n’y avoir que deux façons d’amener les étudiants à quitter les rues : une répression sanglante et soutenue, suffisamment violente pour les chasser, ou répondre à leurs attentes en adoptant des élections libres.

«Les autorités centrales ne céderont pas. Elles l’ont fait clairement comprendre, mais elles n’auront pas non plus recours à des moyens violents pour réprimer le mouvement. C’est un dilemme», a commenté Andrew To, ancien dirigeant de la Ligue des sociaux-démocrates, dans un entretien.

«Ce n’est pas seulement un dilemme pour les manifestants, mais aussi pour le gouvernement», a-t-il ajouté. «Les deux objectifs sont contradictoires : ils peuvent apporter une solution pacifique en cédant ou ils peuvent utiliser des moyens violents pour disperser la foule. Je ne vois aucune possibilité que les gens partent autrement. Je pense que cela pourrait durer des mois.»

Selon les politiciens progouvernement, il n’y a aucune possibilité que le Parti communiste chinois (PCC) abandonne son droit de veto pour écarter des candidats qu’il trouve politiquement inacceptables.

«Il n’y a aucune possibilité que les deux parties arrivent à un compromis qui désamorce la situation de façon pacifique», a dit Tsang Yok-sing, président du Conseil législatif, dans une interview avec le journal Straits Times.

  • Une perruque posée sur l’image de Xi Jinping durant les célébrations d’Halloween dans le quartier Central de Hong Kong le 3 novembre 2014. Les manifestants ont utilisé l’image de Xi jinping comme protection: les policiers n’oseraient pas l’enlever de peur que leur action ne soit filmée et utilisée contre eux. (Benjamin Chasteen/Epoch Times)

«Nous reviendrons tout de suite»

Bosco Wu, un collégien de 16 ans, a assuré qu’il n’y avait aucun moyen que lui ni aucune des personnes qu’il connaît sur le site de Mong Kok ne partent avant d’avoir obtenu les concessions du gouvernement.

«Nous descendons dans les rues depuis plus d’une décennie», a-t-il dit en faisant référence aux marches et manifestations régulières qui ont lieu chaque année à Hong Kong. «Le gouvernement ne fait jamais rien. Nous voulons qu’ils changent maintenant. Les chances sont minces, mais ils doivent faire quelque chose.»

Bosco, comme beaucoup d’autres, a adapté sa vie en fonction de la longue occupation. Il travaille bénévolement dans l’une des tentes de ravitaillement à Mong Kok, l’un des principaux quartiers des manifestations occupés principalement par des travailleurs. Il remplit des bouteilles d’eau et offre de la nourriture aux militants.

Il a admis qu’en cas de nettoyage violent «Oui, nous partirions». Avant d’ajouter : «Mais nous reviendrions tout de suite.»

Un échéancier

Alors que les premières exigences des groupes étudiants étaient inflexibles, il est possible qu’à ce point une proportion suffisamment grande de manifestants puisse accepter une seconde option : les promesses du gouvernement d’un échéancier pour apporter une plus grande démocratie dans le processus de nomination.

«Je pense qu’un nombre important de gens ne reviendraient plus dans les rues si le gouvernement faisait une promesse réaliste et proposait un échéancier», a affirmé Kist Chan, un manifestant de 25 ans qui a démontré de bonnes connaissances des questions constitutionnelles en jeu et une forte implication dans le mouvement. Il dort à Mong Kok depuis près d’un mois.

  • Un manifestant bien protégé devant la ligne de front d’une confrontation entre manifestants et policiers à Mong Kok, Hong Kong, le 5 novembre 2014. (Benjamin Chasteen/Epoch Times)

Accepter un échéancier est un objectif bien moindre que la demande initiale, mais les étudiants ont déjà retiré leurs précédentes exigences, parmi lesquelles la démission du chef de l’exécutif, Leung Chun-ying, et le retrait de la décision du Comité permanent du Congrès national du peuple du 31 août qui a mis le feu aux poudres à Hong Kong.

Pommes pourries

«Vous voulez que je choisisse une pomme pour la manger, mais vous ne m’avez donné que des pommes pourries à choisir», a illustré Kist Chan. «Il y en a des bonnes que je pourrais manger. Pourquoi voudrais-je manger une pomme pourrie?»

«S’ils nous proposent un plan dans lequel ils nous montrent comment ils vont nous donner le droit de choisir nos propres dirigeants, cela irait. Même s’ils nous trompaient», a-t-il ajouté. «Dans l’immédiat, ils ne veulent même pas nous tromper.»

Une autre possibilité serait que le président chinois, Xi Jinping, s’avance pour résoudre lui-même la crise directement.

Une décision exécutive?

La possibilité d’une telle conclusion pourrait se présenter d’elle-même après que le gouvernement de Hong Kong aura soumis un nouveau rapport au PCC – ce que Carrie Lam, première secrétaire de l’administration de Hong Kong, a promis de faire – qui reflète la frustration et les sentiments du public.

Dans ce scénario optimiste, Xi Jinping et les hauts dirigeants communistes pourraient alors utiliser ce prétexte pour revenir sur la décision du Comité permanent du Congrès national du peuple, qui est dirigé par Zhang Dejiang, un allié de Jiang Zemin, l’ennemi politique de Xi Jinping et ancien dirigeant du régime chinois.

Malgré la ravageuse campagne de lutte contre la corruption et la purge de ses puissants opposants, parmi lesquels Zhou Yongkang, ancien chef de la sécurité chinoise, et Xu Caihou, ancien haut dirigeant de l’armée chinoise, Xi Jinping n’a pas encore totalement assis son pouvoir sur tous les départements du Parti et des autorités communistes.

  • Des manifestants devant la ligne de front d’une confrontation entre manifestants et policiers à Mong Kok, Hong Kong, le 5 novembre 2014. (Benjamin Chasteen/Epoch Times)

Cette analyse a déjà été avancée par les journaux politiques de Hong Kong et d’outre-mer et semble être acceptée dans la sphère politique de Hong Kong. Quelques fidèles de Jiang Zemin, parmi lesquels Zhang Dejiang, ont toujours la liberté de suivre des politiques nuisant aux intérêts de Xi Jinping. Leung Chun-ying est lui-même connu pour être lié au grand réseau politique de Jiang Zemin.

La position de Xi Jinping sur Hong Kong n’a pas été aussi dure que celle de Zhang Dejiang. Li Keqiang a récemment dit que «le peuple de Hong Kong a la sagesse» de résoudre la crise, ce qui a été interprété comme la pensée de Xi Jinping lui-même.

Après avoir fait retirer et amender la décision originale du Congrès national du peuple, Xi Jinping pourrait présenter une nouvelle interprétation, moins absolue, de la façon dont les candidats au poste de chef de l’exécutif pourront être nommés. En guise de monnaie d’échange avec les manifestants, Xi Jinping pourrait ensuite renvoyer Leung Chun-ying, largement détesté par les Hongkongais, en raison de son implication dans des transactions commerciales douteuses découvertes en octobre dernier.

Le processus inclurait sans doute encore un niveau de contrôle et de veto de Pékin envers les candidats, mais ces gestes conciliateurs pourraient suffire à désamorcer la crise sans effusion de sang. Ce scénario, qui semble aujourd’hui encore bien loin, ne serait bien sûr atteint que si les manifestants restent là où ils sont : dans les rues de Hong Kong.

 

Version originale: How Might Hong Kong’s Pro-Democracy Protests End?

 

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.