Anglais | Chinois | Coréen | Français | Allemand | Espagnol | Japonais | Russe | Ukrainien | Hébreu | Roumain | Bulgare | Slovaque | Tchèque | Indonésien | Vietnamien
Faites un don

Birmanie en transition: le sort des Rohingyas apatrides

Écrit par Venus Upadhayaya, Epoch Times
12.03.2014
| A-/A+
  • Une fille de réfugiés rohingyas se tient dans l’enceinte de la tombe de Rakhbour Pir Baba, un saint musulman local dans la région de Narwal, dans le Jammu en Inde. (Venus Upadhayaya/Epoch Times)

Il y a huit ans maintenant, Deelara a voyagé par train de la Birmanie au Bangladesh. Elle a ensuite pris un autobus de la frontière du Bengale jusqu’au Jammu-et-Cachemire, l’État indien le plus septentrional.

«Nous ne pouvions rester là parce qu’ils traitaient nos jeunes garçons avec cruauté […] Nous n’avions pas de nourriture», explique Deelara, âgée de 15 ans.

Elle est l’une des nombreux membres de la minorité ethnique Rohingya à avoir dû fuir la Birmanie. Sur le plan religieux et linguistique, les Rohingyas sont reliés au groupe ethnique Chittagong au Bangladesh et se font appeler «Bengalais» en Birmanie.

La vie en Inde n’est toutefois pas plus facile.

«Au Myanmar [Birmanie], les Rohingyas se font dire “Bengalais, retourne dans ton pays!”. Au Bangladesh, on leur dit : “Birman, retourne dans ton pays!”», explique Chris Lewa de l'Asian Forum for Human Rights and Development.

«Leur sort peut se résumer en trois questions que se posent souvent les réfugiés rohingyas au Bangladesh : “Qui suis-je? Où devrais-je aller? Que devrais-je faire?”»

Dans une déclaration au Groupe de travail sur les minorités de la Commission des droits de l’homme de l’ONU, M. Lewa a décrit l’absence de droits des Rohingyas.

«Le gouvernement a identifié “135 races nationales” et les Rohingyas n’en font pas partie. Leur statut légal actuel équivaut, selon le droit international, à un état apatride de facto», indique M. Lewa.

Selon M. Lewa, une telle politique a encouragé les tensions intercommunales et a provoqué deux exodes de 250 000 Rohingyas de la Birmanie vers le Bangladesh en 1978 et en 1991-1992.

De ces 250 000, seulement 20 000 sont enregistrés et vivent dans des conditions consternantes dans des camps de réfugiés au Bangladesh, alors qu’environ 200 000 survivent illégalement dans le pays. Des milliers de ces réfugiés de Birmanie ont été transportés illégalement en Inde, en Malaisie, au Pakistan et en Arabie saoudite.

Des organisations œuvrant auprès des Rohingyas ont indiqué qu’il est important d’apporter des réformes constitutionnelles pour mettre fin à l’exode et à la persécution des Rohingyas.

Andrea Gittleman, conseiller législatif principal chez Physicians for Human Rights (PHR), une organisation qui documente les violations des droits de l’homme contre les minorités ethniques et religieuses en Birmanie depuis dix ans, affirme : «Le gouvernement birman devrait appuyer de telles réformes avec des efforts crédibles afin de bannir le rejet verbal. À tout le moins, les dirigeants birmans devraient publiquement et sans équivoque condamner tous gestes de violence contre les minorités ethniques ou religieuses.»

L’organisation à but non lucratif PHR rapporte que 140 000 Rohingyas ont été déplacés de Birmanie depuis juin 2012 lors de différentes flambées de violence.

«Nous voulons retourner, mais ils vont nous tuer. Ils brûlent nos mosquées et ne nous permettent même pas de réciter namaz [prière musulmane]», commente Deelara.

 

Fuir la Birmanie n’est pas non plus une tâche facile. Le 2 novembre 2013, une embarcation transportant 70 Rohingyas de la Birmanie au Bangladesh a coulé au large des côtes birmanes, selon un rapport de PHR.

«Des dizaines demeurent disparus, alors que les très rares survivants ont été renvoyés dans ces mêmes camps où ils avaient risqué leurs vies pour fuir», indique le rapport.

Conditions consternantes en Inde et au Bangladesh

Deelara habite avec sept autres familles sur un petit terrain vague dans la région de Narwal, dans le Jammu. Leurs maisons sont faites de planches de bois, de vieux tissus sales et de bâches. Il y a deux chaises en plastique dans un coin et un immense sac de chiffons dans l’autre coin. Sur le chemin à l’extérieur, une femme rohingya, portant un châle sale sur sa tête, lave des vêtements près d’un tuyau d’eau brisé.

Selon Suchita Mehta, une relationniste du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR), il y a 4000 réfugiés et 2000 demandeurs d’asile rohingyas en Inde. «Ils habitent dans différents endroits en Inde, entre autres, dans l’Andhra Pradesh, à Delhi, au Jammu, à Haryana, au Rajasthan et dans l’Uttar Pradesh», explique Mme Mehta.

  • Des enfants de réfugiés rohingyas étudient dans une petite école dans l’enceinte de la tombe de Rakhbour Pir Baba, un saint musulman local dans la région de Narwal, dans le Jammu en Inde. (Venus Upadhayaya/Epoch Times)

Environ 3700 réfugiés et demandeurs d’asile rohingyas au Jammu enregistrés avec l’UNHCR vivent probablement dans des meilleures conditions que ceux habitant au Bangladesh et en Birmanie. Selon Relief International, les Rohingyas qui vivent dans les camps de réfugiés officiels au Bangladesh n’ont pas le droit de travailler ou de quitter les camps.

«Au moins ici on nous offre des chaises pour s’asseoir. Mais en Birmanie et au Bangladesh, ils ne nous offrent même pas ça», déplore Deelara.

Deelara a été mariée en Inde il y a trois ans, un droit pour lequel elle aurait fait face à plusieurs restrictions en Birmanie. Toutefois, cela signifie aussi qu’elle a été mariée quand elle avait seulement 12 ans. Son mari travaille à 572 km de là à Delhi dans le domaine de la construction et lui rend visite une fois par mois.

«Les Rohingyas se retrouvent dans un environnement urbain étranger avec une éducation limitée. Ils travaillent souvent comme journaliers, le maigre salaire ne peut couvrir leurs besoins essentiels», explique Mme Mehta.

Les femmes et les filles rohingyas sont particulièrement vulnérables à l’exploitation et à l’abus.

«Nous gagnons notre argent en ramassant les chiffons. Certains jours, nous gagnons 50 ou 100 roupies (1,70 $), parfois seulement 20», affirme Naseema, une voisine de Deelara.

Sur le chemin à l’extérieur du petit peuplement, une dame âgée rohingya mendie pendant que la jeune Deelara est debout et détourne le regard.

Habitant en Inde, Deelara n’est pas au courant des changements politiques en Birmanie. Elle ne sait même pas qu’Aung San Suu Kyi n’est plus en détention à domicile et elle pense que si Suu Kyi peut faire son «travail», elle va rapatrier tous les Rohingyas en Birmanie. Cependant, pour cela, il faudrait l’établissement d’institutions démocratiques solides, ce qui représente un long processus.

Version originale : Burma in Transition: The Plight of the Stateless Rohingya

Plus de 204 718 434 personnes ont démissionné du PCC et de ses organisations.