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De Watteau à Fragonard Les fêtes galantes

Écrit par Michal Bleibtreu Neeman, Epoch Times
19.04.2014
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  • Jean-Honoreu0301 Fragonard (1732-1806), La Fête à Saint-Cloud, vers 1775-1780. (© RMN - Grand Palais/Gérard Blot)

Du 14 mars au 21 juillet, le musée Jacquemart-André réunit 60 œuvres des maîtres de la peinture du XVIIIe siècle, célébrant les plaisirs et la vie insouciante du siècle des Lumières, dans l’exposition De Watteau à Fragonard, les fêtes galantes.

Longtemps considéré comme le chef-d’œuvre par excellence de la peinture française, La fête à Saint-Cloud (1775-1780) de Jean-Honoré Fragonard (1732-1806), est sans doute la toile la plus parfaite et la plus complète de ce genre pictural, situé dans des décors pastoraux, évoquant la vie sociale et l’oisiveté qui précédaient la Révolution française. C’est aussi ce chef-d’œuvre qui conclura une époque tant artistique que sociale.

Prêtée par la Banque de France, propriétaire de La fête à Saint-Cloud depuis 1805, cette œuvre magistrale pourra être appréciée pleinement par le public.

La naissance d’un genre: la fête galante

Exclu des musées et de la collection de la Cour royale, où l’on préfère encore les grandes épopées et les scènes de batailles, les fêtes galantes, ce genre hybride né de l’inspiration de la peinture pastorale des peintres vénitiens et flamands des XVIe et XVIIe siècle et de l’intégration de la mondanité parisienne, sera hautement recherché par les riches collectionneurs d’une bourgeoisie en ascension, aussi bien que par l’aristocratie européenne.

Christoph Martin Vogtherr, Mary Travener Holmes et Nicolas Sainte-Fare Garnot, experts de la peinture du XVIIIe siècle et commissaires de l’exposition, se sont réunis afin de nous présenter l’évolution de ce genre pictural lancé par Watteau, repris par Lancer et Pater, et qui a atteint son apogée avec Boucher et Fragonard.

  • Antoine Watteau (1684-1721) Pierrot content Vers 1712-1713. (© Museo Thyssen -Bornemisza, Madrid)

Antoine Watteau est sans doute le plus grand dessinateur et le plus brillant coloriste du XVIIIe siècle: né en 1684 à Valenciennes, fils d’un maître-couvreur marchand de tuiles, Watteau a connu un parcours artistique peu commun. Il n’aura jamais son propre atelier.

Vers 1702, il part à Paris, mais sans maître ni mécène, donc sans ressources et dans l’obligation de chercher du travail. Il s’installe à Saint-Germain-des-Prés, quartier qui accueille à l’époque de nombreux peintres flamands. Il trouve du travail chez un marchand d’art pour qui il réalisera des copies. Peu à peu, il s’associe aux peintres flamands ainsi qu’au peintre Claude Gillot. Il entrera dans l’atelier de ce dernier pour une courte période, sans doute décisive pour créer ce style qui marquera l’histoire de l’art. Chez Gillot, il développera le goût des scènes théâtrales inspiré de la Commedia dell’arte et des Fêtes galantes.

En 1709, Watteau se présente au concours du Prix de Rome pour perfectionner ses connaissances en peinture. Il ne remporte que la deuxième place. Rome, ainsi que l’Académie de France à Rome lui échappent et il devra retourner au travail.

Cependant, le nouveau style qu’il développe et dont les collectionneurs raffolent lui vaudra sa place à l’Académie royale. En 1717, il y sera reçu avec Pèlerinage à l’île Cythère, aujourd’hui exposé au musée du Louvre. Un nouveau genre pictural sera alors baptisé la fête galante.

L’influence de Watteau

Watteau mourra à 37 ans, laissant derrière lui un nouveau genre pictural qui sera repris et imité par ses contemporains.

N’ayant pas pu définir ce nouveau genre français, à la fois moderne et issu des traditions anciennes, l’Académie laisse malgré elle, mais à la joie de tous, une souplesse qui permet la créativité et l’expérimentation. Nicolas Lancret et Jean-Baptiste Pater profiteront de cet avantage pour faire évoluer le genre et y ajouter leur touche personnelle.

L’un des changements majeurs apportés aux fêtes galantes sera l’intégration des détails réels connus et faciles à identifier dans des scènes imaginaires.

  • François Boucher (1703 -1770) L’Ecole de l’amitié 1760
    © Staatliche Kunsthalle Karlsruhe

Le public identifiant des éléments réels, lieux, œuvres d’art ou célébrités, comme la fameuse danseuse La Camargo(1), est d’autant plus ravi de retrouver des repères de leur quotidien dans des œuvres d’art. Le succès de ce nouveau genre est total.

Le règne de Louis XV sera marqué par le goût pour le luxe et le décor extravagant, étroitement liés dans l’imaginaire collectif au nom de Madame de Pompadour.

François Boucher (1703-1770), devenu premier peintre du roi en 1765, répondra à cet engouement pour l’extravagance, par des scènes visionnaires. Il remplacera les aristocrates somptueusement vêtues et les parisiennes élégantes par des bergères aux courbes gracieuses et féminines. Une épaule généreuse, un cou charmant, pieds nus sous une robe rustique, un livre, Eros lançant des fleurs, un Amour chevauchant un dauphin, une couronne de fleurs symbole de la femme, une flûte symbole de l’homme, une rose symbole de l’amour, un panier, quelques animaux, une ruine dans le fond d’un cadre naturel et dans une harmonie des couleurs, voici la nouvelle codification des fêtes galantes proposée par Boucher. Idylle pastorale et sentiments délicats de l’amour glorifient l’imagination, faisant de ces tableaux de véritables escapades oniriques.

Fragonard, élève de Boucher, réalisera des œuvres monumentales dans leur dimension aussi bien que dans leur esthétique. Il sera le dernier maître des fêtes galantes. C’est sous son pinceau que ce genre pictural brillera de son plus bel éclat. Mais il assistera aux changements capricieux de la mode et les commanditaires lui tourneront le dos. Peu avant la révolution, la Fête galante sera dépréciée et cédera la place au style néoclassique. Il faudra attendre le XIXe siècle pour revoir son heure de gloire inscrit, non seulement dans les acquisitions du Louvre, mais aussi dans la littérature de Théophile Gautier, Paul Verlaine et Charles Baudelaire.

(1) On retrouve La Camargo dans l’œuvre de Nicolas Lancret Fête galante avec La Camargo dansant avec un partenaire.

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